Maintenant que les épargnants ont droit de contribuer jusqu'à 10 000$ annuellement dans leur CELI, une grande question se pose. Est-il plus avantageux de cotiser dans un REER? Quel véhicule rapportera-t-il le plus sur une longue période d'accumulation?
Bien des gens effectuent des calculs en incorporant toutes sortes de facteurs externes à la question. Par exemple, cotiser à un REER et rembourser l'hypothèque avec le retour d'impôt semble bien alléchant. Toutefois, cette stratégie implique simplement que l'on investisse moins dans le REER, afin d'utiliser une partie du montant prévu initialement à d'autres fins. Il faut donc tout d'abord s'assurer de procéder à une juste comparaison.
Pour bien comprendre ce point, prenons l'exemple d'un travailleur autonome désirant cotiser 10 000$. Ce montant sera prélevé à même les revenus qu'il perçoit directement de ses clients. Ainsi, l'argent n'est pas imposé avant de servir à la contribution. Donc, le travailleur autonome se retrouve avec 10 000$ dans son REER, et l'impôt qui aurait normalement dû être remis au gouvernement sur ce montant gagné est évité.
Différence notable pour le salarié
Différence notable pour le salarié
Le salarié quant à lui vit une situation différente. Supposons un taux total de 40% remis au gouvernement : il ne recevra que 6000$. Afin de contribuer 10 000$, il devra réinvestir son remboursement, qui devrait avoisiner les 2400$ (6000$ x 40%). Ce dernier montant donne droit à un autre remboursement, à percevoir l'année suivante, et ainsi de suite. Au fil du temps, on se rapproche des 10 000$. Si le salarié applique plutôt son premier remboursement à l'hypothèque, le REER ne totalisera que 6000$. L'idée n'est pas mauvaise si l'on souhaite réduire son endettement. Tout dépend de ce que l'on recherche.
Pour obtenir 10 000$ dans le REER dès le départ et ainsi se mettre à niveau avec le travailleur autonome, le salarié peut contribuer 6000$, et emprunter les 4000$ manquants. Il obtient ainsi les 10 000$ prévus, et le remboursement servira à éponger la dette. L'emprunt temporaire ne sert que de pont entre la cotisation et le remboursement.
Si l'on opte plutôt pour le CELI, le montant équivalent correspond à 6000$, puisque l'impôt doit être payé, autant pour le salarié que pour le travailleur autonome. Donc, si vous appliquez un taux de rendement similaire aux deux véhicules de placement, vous obtiendrez exactement le même résultat après impôts. Autrement dit, tout étant égal par ailleurs, 6000$ dans un CELI investi à 10% par an procurera le même montant que 10 000$ dans un REER aux mêmes conditions. Ce constat demeure valable peu importe le nombre d'années utilisées aux fins du calcul. Bien sûr, nous appliquons un taux d'impôt identique lors de l'accumulation et au moment des retraits.
Les avantages de chacun
Les avantages de chacun
Donc, le REER sera plus avantageux dans les situations suivantes :
- vous pensez payer moins d'impôts au moment de la retraite qu'en ce moment;
- vous pensez être à risque de vous retrouver sans emploi, et ainsi, vous espérez pouvoir décaisser au moment où vos revenus sont nuls ou très faibles;
- vous êtes assujettis aux tentations de retirer de l'argent quand elle est disponible : l'impôt du REER constitue un bon élément dissuasif;
- vous pensez bénéficier d'une année sabbatique de temps à autre, et ainsi utiliser votre REER pour remplacer votre revenu.
Le CELI sera plus avantageux dans ces cas-ci :
- vous pensez éventuellement utiliser tout ou une partie de l'argent pour un investissement non admissible (ex : immobilier)
- vous souhaitez détenir un fonds d'urgence significatif, disponible sans taxation au moment voulu
- vous pensez optimiser vos impôts à la retraite en incorporant un revenu non imposable
- votre revenu imposable actuel est nul ou faible.
Il existe probablement plusieurs autres avantages pour chacun. Toutefois, comme nous ne connaissons pas l'avenir, nous pensons que détenir les deux types de véhicule constitue la meilleure stratégie pour la majorité des gens qui épargnent sérieusement. Vous bénéficiez ainsi du meilleur des deux mondes. Dans le doute, ou afin de savoir lequel devrait être priorisé dans votre situation, utilisez les services d'un planificateur financier!
P.S.: Un lecteur nous a fait remarquer qu'il s'avère possible pour le salarié d'effectuer une demande auprès du gouvernement afin de réduire les déductions à la source. Il s'agit du formulaire T1213 au fédéral. Aussi, à travers un régime enregistré collectif, le salarié peut bénéficier d'une déduction immédiate. Par conséquent, le recours à l'emprunt temporaire peut être évité.
Au sujet des auteurs du blogue : Patrick Thénière et Rémy Morel sont analystes financiers et propriétaires de Barrage Capital, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com