BLOGUE. Le départ Scott Forstall, le vice-président des logiciels mobiles chez Apple, a fait couler beaucoup d’encre. Cet événement a été interprété comme un désaveu par Apple de la vision du cadre en matière de design. Il était d’autant plus facile d’en arriver à cette conclusion que Johnny Ive, vp du design industriel chez Apple et reconnu pour son goût des lignes épurées, ajoute à ses fonctions actuelles celles de Forstall.
La blogosphère techno, qui avait en grippe le parti pris de Forstall pour les «skeuomorphismes», a d’ailleurs applaudi. L’un d’entre eux, Sam Biddle, va jusqu’à qualifier son oeuvre de «crime haineux contre l’humanité » sur Gizmodo. Pour ceux qui n’ont pas suivi le débat, les «skeuomorphismes» sont des éléments de design superflu empruntés à une autre époque. Dans le cas du iPhone, elles se manifestent par l’étagère en bois de l’iBookStore ou la feuille jaune lignée qui caractérise l’application « Notes ».
Les «skeuomorphismes» ne sont pas destinés à plaire aux jeunes blogueurs technos, mais à servir de repères à des utilisateurs plus âgés ou moins avertis. Ces éléments de design servent le même objectif que le choix de doter l’iPhone d’un seul bouton ou de sacrifier des fonctionnalités sous l’autel de la simplicité.
L’ensemble des ces choix ont permis au iPhone de devancer les téléphones Android (dont les parts de marchés absolues sont pourtant supérieures), chez les 35 à 55 ans de même que chez les 55 ans et plus. Il s’agit de groupes d’âge stratégiques, car leurs revenus sont plus élevés. Apple, qui occupe le segment haut de gamme du marché des téléphones intelligents, n’aurait sans aucun doute pas pu écouler 27 millions d’iPhone durant le dernier trimestre sans disposer de cet avantage auprès des consommateurs de plus de 35 ans.
Cette longueur d’avance des téléphones Android chez les moins de 35 ans avait d’ailleurs inspiré cette attaque au président de HTC America, Martin Fichter, l’année dernière : « Nous, on utilise des iPhone, mais nos enfants ne les trouvent plus cool», avait-il lancé.
Depuis le lancement du iPhone, les choix d’Apple en matière de design ont sans aucun doute contribué au succès phénoménal de l’entreprise. Au courant du dernier trimestre, Apple a vendu quelque 27 millions d’iPhone… mais a néanmoins dévoilé des résultats inférieurs aux attentes.
À plus long terme, si Apple veut offrir à ses actionnaires le genre de croissance auquel ils ont été habitués, elle n’aura pas le choix de se soucier des jeunes. Ces derniers n’ont peut-être pas le pouvoir d’achat de leurs grand-parents, mais Apple a tout à perdre en les laissant aux manufacturiers d’appareils Android. Le lancement du iPad Mini, un produit d’entrée de gamme, est un autre signe de la volonté d’Apple d’intéresser une clientèle plus jeune à ses produits.