BLOGUE. Noel Biderman, fondateur d’AshleyMadison.com, a fait des millions en facilitant la vie aux époux infidèles. Cela n’a toutefois pas été facile à faire, puisqu’il a bâti son petit empire, qui compte aujourd’hui 240 employés, malgré la censure des médias, des réseaux publicitaires et des agences pub. De passage à Montréal pour lancer la version québécoise de son site Web, il m’a parlé des mille et une difficultés qu’il a eues à le faire croître dans un environnement d’affaires puritain.
Fondé à Toronto en 2002, AshleyMadison.com est aujourd’hui un des plus importants sites de rencontres dans le monde. Or, le faire connaître n’a pas été facile. D’abord, faute d’agence de publicité réputée souhaitant travailler avec l’entreprise, elle a dû développer sa stratégie marketing à l’interne.
Dans ce contexte, l’équipe d’AshleyMadison.com a dû se montrer innovatrice afin de faire passer son message. Notamment, elle a mis sur pied une campagne de publicité supportant Bill Clinton malgré (ou plutôt en raison de) son infidélité. En 2009, Noel Biderman a attiré l’attention en offrant cinq millions de dollars à Tiger Woods pour endosser AshleyMadison.com : « L’idée, c’était que plutôt qu’aller faire son mea culpa dans les médias, il aurait pu s’expliquer sur notre plateforme, et dire qu’il était désolé d’avoir été pris et ainsi de suite. » Le golfeur, bien entendu, n’a pas répondu à l’appel de l’homme d’affaires canadien.
Parmi les médias où on lui a fait savoir qu’il ne pourrait pas annoncer, mentionnons les chaînes sportives ESPN aux États-Unis et TSN au Canada.Le réseau social Facebook, lui non plus, ne veut pas de ses publicités.
Le site Web controversé a également été banni du SuperBowl, malgré le fait que l'entreprise avait reçu le feu vert de NBC : « À la dernière minute, ils m’ont appelé pour me dire que la NFL était intervenue et que la publicité dans laquelle on avait investi ne pourrait pas être diffusée ».
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Noel Biderman ne cherche pas la controverse
Contrairement à GoDaddy.com, qui conçoit chaque année une publicité qu’on refuse de diffuser durant le Super Bowl, Noel Biderman explique que ses publicités ne sont pas osées : « Le contenu de notre publicité n’était pas en cause, c’est la nature de nos activités qui l’était. Or, avoir une liaison est 100 % légal et la NFL ne semble pas avoir de problème avec le sexe, puisqu’ils laissent passer des publicités de viagra. »
L'attention découlant du fait de voir sa publicité bannie, selon Noel Biderman, n’a pas une grande valeur : « Si les brasseurs de bières et les fabricants automobiles investissent année après année dans le Super Bowl, c’est parce que la constance est payante en publicité. Si nous avions pu annoncer Ashley Madison avec constance sur les réseaux de notre choix, on aurait aujourd’hui 100 millions de membres dans le monde plutôt que 19 millions. »
Malgré tout, la publicité ne semble pas essentielle pour rejoindre les maris et les femmes infidèles. Sans avoir fait aucune publicité au Québec, AshleyMadison.com y compterait 150 000 utilisateurs, un nombre que Noel Biderman souhaite doubler avec le lancement de la version française.
Malgré que ses affaires vont bien, Noel Biderman croit que la censure avec laquelle il doit composer au quotidien est foncièrement inquiétante : « Je ne pense pas qu’on veut devenir une société comme l’Iran, où on décide pour les gens ce qui est bon pour eux. En refusant de diffuser des publicités en raison de la nature du produit annoncé, on peut tuer des produits, ce qui est l’équivalent de supprimer des idées.»