J’ai eu l’occasion de manipuler le BlackBerry PlayBook durant quelques minutes le matin de son lancement, le 19 avril dernier. Néanmoins, si j’ai pu relever ce matin-là que les clients ne se sont pas rués sur l’appareil, quelques minutes n’étaient pas suffisantes pour bien l’évaluer. Une semaine après son lancement, alors que j’ai eu l’occasion de passer de nombreuses heures les yeux fixés sur son petit écran de 7 pouces, je vous livre ici mes commentaires sur la tablette tant attendue de Research In Motion (RIM).
QNX : un système d’exploitation d’une qualité exceptionnelle
L’interface du système d’exploitation QNX est d’une efficacité qui n’a d’égal que sa simplicité. Malgré tout, les concepteurs de la PlayBook ont cru bon d’ajouter un court tutoriel interactif à l’appareil, que devront traverser ses acheteurs la première fois qu’ils allumeront la tablette. Du reste, l’interface est si intuitive qu’une telle précaution n’était pas nécessaire.
L’écran tactile multipoint du PlayBook est précis et a cela de particulier que la couche tactile qui le compose s’étend sur toute la surface de la tablette, pourtant encadrée d’une bordure noire d’environ 1,5 centimètre. En plaçant son doigt sur cette bordure, et en le glissant vers l’intérieur, on sort généralement de l’application ou du menu qu’on était en train d’utiliser. Le même mouvement, effectué sans toucher à la bordure, aura par ailleurs un effet tout à fait différent, circonscrit à l’application ou au menu en cours d’utilisation. Ce principe général permet ainsi à l’utilisateur d’accéder à n’importe quelle fonction ou application ouverte en un seul mouvement du doigt.
La plus grande force du système d’exploitation de la PlayBook est sans contredit sa capacité à gérer de manière très harmonieuse plusieurs tâches à la fois. Ainsi, par exemple, il est possible de lire un rapport annuel en format PDF grâce à l’application Adobe Reader, tout en écoutant de la musique sur YouTube et, à l’occasion, passer du rapport financier à l’application calculatrice en un seul mouvement, et ce, sans que la musique issue de YouTube ne s’arrête pour autant.
Une petite tablette… qui en a sous le capot
La PlayBook, dont l’écran ne mesure que 7 pouces, est plus petite que l’iPad d’Apple ou que la Xoom de Motorola, deux tablettes de plus ou moins 10 pouces. L’écran de la tablette, dont la définition de 1024 par 600 pixels est par ailleurs très bonne, est un peu petit pour y visionner des films. Néanmoins, ce qu’on perd en potentiel de divertissement, on le gagne en mobilité, puisque la tablette se glisse aisément dans la poche et peut être utilisée d’une seule main. D’ailleurs, contrairement à la coque métallique du iPad, celle du PlayBook est constituée d’un plastique dont la texture rappelle celle du caoutchouc, qui a pour avantage que la tablette ne glisse pas d’entre les mains.
Malgré l’efficacité de son interface tactile, la PlayBook est dotée de quatre boutons physiques, dont deux servent à ajuster le volume sonore, un atout pour quiconque étant susceptible de devoir baisser le son rapidement, durant une conférence, par exemple. Un autre bouton, dont je n’ai pas eu besoin, permet de faire pause lorsqu’on est en train d’écouter de la musique ou de regarder une vidéo. Finalement, le dernier bouton, qui permet d’allumer et d’éteindre la tablette, est si petit qu’après l’avoir pressé, je me suis plusieurs fois demandé si mon doigt n’était pas trop gros pour l’enfoncer. Je me suis d’autant plus posé la question que la tablette met quelques secondes avant de s’éteindre ou de s’allumer. Bref, si ce dernier bouton fonctionne correctement, il va s’en dire qu’il aurait pu être mieux conçu.
Dotée d’un microphone, de haut-parleurs relativement puissants pour une tablette, et de deux appareils photo (3 mégapixels à l’avant, 6 mégapixels à l’arrière), la PlayBook a tout ce qu’il lui faut pour être utilisée comme support pour la téléconférence. Bien entendu, il est possible de prendre des photos et de tourner des vidéos avec les objectifs avant et arrière. La possibilité d’utiliser l’objectif avant, dont la résolution n’est que de 3 mégapixels, permet ainsi aux couples de se prendre en photo devant un monument, par exemple, sans devoir confier leur précieuse tablette à un inconnu. Pour retourner aux usages professionnels, mentionnons également la présence d’une application préinstallée faisant office de dictaphone, pour prendre des notes vocales.
Une bonne trousse de départ préinstallée
Du côté des applications préinstallées, les concepteurs de la PlayBook livrent une petite trousse d’applications solides. Les trois applications bureautiques, compatibles avec leur homologue respectif de la suite Office, sont très pratiques. Ainsi, Word To Go (Word), Sheet To Go (Excel) et Slideshow To Go (PowerPoint) sont des applications, quoiqu’aux fonctionnalités limitées, très simples d’utilisation. Le dernier, qui permet d’ouvrir des documents PowerPoint, pourrait aussi servir pour faire des présentations, puisque la PlayBook, outre son port USB, dispose d’une sortie HDMI.
De plus, notons la présence d’une version d’Adobe Reader adaptée spécialement pour la PlayBook dont l’interface est, étonnamment, beaucoup plus conviviale que dans sa version originale pour PC. L’application qui fait office de calculatrice, quoique ce soit un détail, est très solide, se décline en version scientifique, et enregistre les dernières équations effectuées.
Comme plusieurs l’ont déploré, la PlayBook ne dispose pas d’une application de courriel BlackBerry. Les propriétaires de BlackBerry pourront toutefois utiliser l’application BlackBerry Bridge pour bénéficier de l’interface de courriel propre aux BlackBerry. Cependant, un téléphone BlackBerry doit pour ce faire demeurer à proximité de la tablette, puisque BlackBerry Bridge passe par la fréquence Blutooth pour connecter la tablette au téléphone. Étant un utilisateur de Gmail, le service de courriels hébergé de Google, cette « lacune » n’en était pas une pour moi, et ce, d’autant moins que Gmail est très facile d’utilisation dans le navigateur Internet très solide qui vient avec la PlayBook.
Sur le plan de la connectivité, l’appareil dispose de connectivités WiFi et Blutooth, mais ne peut pas se connecter directement aux réseaux cellulaires, contrairement à certains modèles du iPad. Néanmoins, il est possible d’utiliser la connectivité cellulaire d’un BlackBerry pour accéder à Internet, en utilisant BlackBerry Bridge. Les détenteurs de téléphones Android dotés d’une connectivité Bluetooth pourront également passer par leur téléphone pour naviguer sur Internet, en passant par le menu de configuration plutôt que par l’application BlackBerry Bridge.
Le manque d’applications essentielles : là où le bât blesse
Officiellement, la PlayBook offrirait dans son « App World» quelque 3 000 applications, contre 65 000 pour iPad. Néanmoins, personne n’a besoin d’autant d’applications, et si les 3 000 applications iPad les plus pertinentes avaient été adaptées pour la PlayBook, le peu d’applications disponibles sur la plateforme n’aurait pas posé problème. Là où le bât blesse, c’est au niveau de la qualité et de la nature des applications offertes, qui ne couvrent pas même les besoins essentiels de l’utilisateur de tablette moyen. D’ailleurs, malgré je n’aie pas pris le temps de compter les applications disponibles, le chiffre de 3 000 applications semble, du moins de visu, exagéré.
On peut comprendre que l’offre de jeu sur la PlayBook soit très limitée. Par contre, aucune explication logique ne peut justifier le fait que l’offre d’applications d’affaires compatibles avec la tablette professionnelle soit tout autant limitée. Par exemple, la très populaire application de prise de notes Evernote, qui a été adaptée à la plupart des plateformes mobiles, brille par son absence. Le géant de l’informatique en nuages SalesForce.com, utilisé par un nombre exorbitant de professionnels sur la route, n’offre pas non plus d’application pour la PlayBook. Pire encore, si deux applications PlayBook permettent de générer des codes QR, aucune application ne permet de les lire.
Bref, il ne sert à rien d’énumérer les applications essentielles dont est dénuées l’App World de la PlayBook, puisqu’il serait plus court d’établir la liste complète des applications disponibles, dont plusieurs sont d’ailleurs de très piètre qualité. Néanmoins, une plateforme doit être populaire avant de pouvoir disposer d’un écosystème vigoureux de développeurs et celle de la PlayBook vient tout juste de voir le jour.
Les dirigeants de RIM semblent prendre le criant manque d’applications disponibles pour la PlayBook au sérieux. Ainsi, l’entreprise a annoncé que la tablette pourra éventuellement, à la faveur d’une mise à jour, supporter des applications Android. Qui plus est, le fabricant canadien vient de procéder à l’acquisition de Tungle Corp., une entreprise montréalaise spécialisée dans la conception d’applications mobiles… qui, sans aucun doute, consacrera à l’avenir ses énergies à développer pour les plateformes de RIM.