Le titre de SNC-Lavalin est-il une aubaine ou surévalué ?
La question nous est venue, il y a quelques jours, en faisant une recension de points de vue, au lendemain des derniers résultats de l'entreprise.
«Nous continuons de croire que le niveau auquel se négocie l'action n'offre pas un rapport risque/rendement attrayant», écrit l'analyste Corey Hammill, de Paradigm Capital, en réitérant un cours cible de 40 $.
«Nous croyons que le risque de recul du titre est très limité, avec un potentiel de hausse significatif. Au niveau actuel, l'action est un no-brainer», écrit de son côté Maxim Sytchev, de Dundee Marchés des capitaux, en maintenant une recommandation d'achat et une cible de 59 $.
L'un voit le titre de SNC reculer de près de 15 % dans les prochains mois, tandis que l'autre analyste le voit progresser de plus de 25 %.
Qu'en est-il ?
Les résultats du géant montréalais n'ont pas vraiment été à la hauteur des espoirs au dernier trimestre. Le consensus n'a pas été raté par beaucoup, mais le carnet de commandes a continué de reculer. À 8,3 G$, celui-ci est inférieur de 8 % par rapport au dernier trimestre, et de 18 % par rapport à l'an dernier.
Ce n'est pas nécessairement une mauvaise chose. Dans les derniers mois, SNC nous a habitués à des résultats sans lustre, où, finalement, elle avait signé de nombreux contrats, mais à de mauvais prix. Il vaut mieux avoir un peu moins de travail, mais s'assurer que l'on récolte au moins quatre trente sous pour chaque dollar qu'on dépense.
Résultats trimestriels OK, situation du carnet de commandes pas nécessairement alarmante, voilà cependant que l'aperçu des bénéfices pour 2014, communiqué par la direction (de 2,25 $ à 2,50 $ par action), est arrivé sous les attentes d'à peu près tout le monde (2,67 $ par action).
Les vieux projets de l'ancienne direction continuent d'avoir un impact sur les marges, principalement dans la division infrastructures (hôpitaux, transports), et il devrait en être ainsi pour l'ensemble de 2014. À la fin de l'année, les deux tiers de ces vieux projets devraient toutefois être achevés et 2015 s'annonce nettement mieux sur le plan financier.
Comment aborder la situation ?
Jetons un oeil sur chacune des évaluations.
Comment Paradigm voit les choses
Malgré le plan d'amélioration des bénéfices mis en place par l'entreprise, Paradigm Capital s'appuie sur les commentaires de la direction et ne croit pas à une amélioration des bénéfices avant quelque part en 2015. Un horizon trop lointain et trop incertain à son goût.
L'analyste Corey Hammill préfère se rabattre sur le bénéfice qu'il anticipe de la division d'ingénierie en 2014. Il lui accole un multiple de 12, soit un escompte de 15 % par rapport au multiple moyen historique (14), ce qui donne une valeur de 14,50 $ par action.
Il ajoute ensuite à ce chiffre la valeur comptable des concessions de SNC (autoroute 407, AltaLink, etc.), qui est de 25,75 $.
Total global : 40,25 $.
Comment Dundee voit les choses
Il ne fait aucun doute dans l'esprit de Dundee que la rentabilité de 2014 sera moyenne. En fait, le bénéfice qu'elle prévoit est même plus faible que celui de Paradigm. L'analyste Maxim Sytchev préfère cependant utiliser le bénéfice qu'il anticipe pour l'exercice 2015. Il lui applique un multiple de 13, légèrement inférieur à la moyenne historique, et obtient une valeur de 19 $ pour les activités d'ingénierie et de construction.
L'écart d'évaluation des deux analystes pour ces activités est important. Mais il se creuse encore davantage lorsqu'on passe à l'évaluation des concessions. Plutôt que la valeur comptable, c'est une estimation de la valeur au marché qui est utilisée par Dundee. Valeur estimée du portefeuille : 36,25 $.
Ajoutons 3,64 $ d'encaisse, ramenons les 19 $ attachés aux activités d'ingénierie, on en arrive à un total de 58,90 $.
Qui a raison ?
Le cours cible de 40 $ de Paradigm est trop faible.
Il est vrai qu'il y a de l'incertitude au chapitre du carnet de commandes. Mais l'exercice 2015 s'annonce plus rentable. Dans quelques mois, le marché regardera l'anticipation pour 2015. Or, le multiple qu'utilise Paradigm (12) est déjà faible et sera vraisemblablement appliqué à la prévision 2015 sans pénalité.
La maison semble excessivement prudente dans son évaluation des activités d'ingénierie. Et elle l'est aussi dans celle des concessions. AltaLink, qui est un grand morceau en processus de vente, est notamment valorisée au coût d'acquisition. Il est nettement probable qu'on obtienne prochainement un meilleur prix que celui auquel l'entreprise a été achetée.
À l'inverse, l'évaluation de Dundee semble un peu élevée. Le portefeuille des concessions affiche une valeur de 36,25 $, tandis que la moyenne de notre univers est d'environ 30 $.
En utilisant cette moyenne, en retenant le multiple de Paradigm, mais en l'appliquant à la prévision de bénéfice 2015, et en tenant compte de l'encaisse, on arrive plutôt à une cible de près de 52 $ sur un horizon de 12 mois.
Sur le radar
SNC-Lavalin (SNC, 46,40 $)
Sources : Bloomberg, Thomson Reuters
Recommandations des analystes
2 achat
4 Surperforme
7 Conserver
Cible des analystes
Moyenne 51,85 $
Plus élevée 59,00 $
Plus basse 40,00 $