Cogeco demande au CRTC de mettre sur pied un cadre réglementaire qui lui permettrait de faire son entrée dans la téléphonie sans-fil. Des chances de réussite?
La société souhaite que le Conseil favorise le développement au Canada de ce que l'on appelle des MVNO (Mobile Virtual Network Operators). Le concept existe dans plusieurs pays, et même déjà ici en téléphonie traditionnelle. Il consiste généralement à acheter de la capacité de réseau aux grands joueurs existants, et à y raccorder ses propres équipements et applications.
Longtemps la direction de Cogeco a estimé qu'il n'était pas intéressant pour elle d'entrer dans le sans-fil. Il y a quelques mois, son président, Louis Audet, nous confiait qu'il était plus rentable d'investir son capital sur d'autres projets qu'en téléphonie cellulaire. C'est d'ailleurs ce que fait l'entreprise depuis quelques années, avec ses investissements dans le câble américain et les centres de données.
Comment expliquer alors cet intérêt soudain?
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Probablement deux choses.
Dans un premier temps, deux phénomènes sont simultanément en cours. Les abonnés de la téléphonie filaire abandonnent en plus grand nombre le service pour migrer vers le sans-fil. C'est une tendance qui touche toute l'industrie. En parallèle, Bell entre avec Fibe sur une partie du territoire de Cogeco. Elle offre le sans-fil en bouquet, ce que ne peut faire le câblo.
Tant qu'à perdre des clients, aussi bien tenter de les garder en offrant le sans-fil, même si la marge sur le dernier service devait être petite.
L'autre élément d'explication du renversement de position pourrait bien se trouver dans un développement un peu plus lointain, mais qui apparaît incontournable. Il viendra un jour où une majorité de citoyens utiliseront le sans-fil pour le téléphone, l'Internet et la télé. Tout passera par le tuyau des réseaux sans-fil. La technologie permettra le passage de plus gros débits, et il y aura plus d'argent pour défrayer les coûts. Si ce n'est pas avec les réseaux de quatrième génération, ce sera avec ceux de cinquième. Un opérateur qui ne sera pas à ce moment positionné pour offrir de la mobilité, même à faible marge, risque de ne pas la trouver drôle.
Que dira le CRTC?
Que dira le CRTC?
En conférence téléphonique, monsieur Audet a quelques fois fait allusion au fait qu'il y avait 800 opérateurs virtuels de par le monde, et aucun au Canada. Il a estimé que ces opérateurs aidaient à la concurrence et aux prix.
Il a aussi dit croire que l'installation d'un cadre réglementaire favorisant les MVNO ne nuirait pas à l'arrivée d'un quatrième joueur national. Si on a bien compris, le pdg croit qu'un quatrième joueur décidera au final de ne pas couvrir tous les marchés et que les MVNO seront particulièrement utiles sur les marchés non couverts.
On est moins sûr de la chose. Même avec des frais d'itinérance nettement plus faibles, plusieurs doutent actuellement que Québecor et Wind soient capables de s'établir dans le marché au Canada anglais. Ajouter des nouveaux entrants semble plutôt faire significativement augmenter le risque d'échec d'un quatrième joueur. On notera que la demande de Cogeco ne se borne pas qu'aux territoires qui n'intéresseraient pas un quatrième joueur.
D'un autre côté, peut-on favoriser l'arrivée de nouveaux entrants et empêcher Cogeco de se défendre sur son territoire? Peut-être. Elle a, après tout, déjà eu l'option de faire du sans-fil.
Ce n'est pas une question facile qu'a à trancher le CRTC.
Sa position est d'autant plus complexe qu'il est possible que le gouvernement du Canada et Industrie Canada n'en viennent pas à la même conclusion.
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