BLOGUE. Qui a gagné ce deuxième débat, mardi soir, entre Barack Obama et Mitt Romney?
C'est avec surprise que l'on a vu plusieurs commentateurs parlé d'un affrontement serré. Au terme du débat, on était plutôt sur l'impression qu'Obama l'avait emporté haut la main.
Pourquoi?
Dès les premiers instants du débat, monsieur Romney a avancé avec ses propositions de baisses d'impôt. Il n'a pas fallu très longtemps au président pour sauter sur l'occasion et mettre en relief que ces nouvelles baisses allaient faire exploser le déficit.
Il y a dans la proposition Romney de nombreux engagements (ramener de 35% à 28% le taux d'imposition le plus élevé des particuliers, abaisser de 20% le taux de tous les payeurs d'impôt, ramener le taux d'imposition maximal des sociétés de 35% à 25%, éliminer le taux d'imposition de 15% sur tous les gains en capitaux pour ceux qui font moins de 200 000$, éliminer tout impôt sur les dividendes et revenus d'intérêts).
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Évidemment, l'ancien patron de Bain Capital, n'est pas sans savoir compter. Il veut aussi récupérer ce qu'il promet en abaissant des crédits d'impôts et en sabrant dans les dépenses.
Le problème, c'est qu'il a été assez flou dans ces éclaircissements sur ces coupes. On comprend que le contribuable aurait peut-être le choix d'une enveloppe fourre-tout de déductions qui serait plafonnée. Mais on ne sait pas pour combien d'argent ces bouquets de déductions pèsent dans l'effort de compression et, surtout, d'où proviendront les autres coupes nécessaires à éponger les promesses.
Bref, le cadre financier des Républicains n'est pas clair. Il n'a en outre aucune cible de déficits. À une quinzaine de jours des élections, c'est étonnant. Et c'est encore plus étonnant que l'on puisse juger qu'un débat est serré dans ce contexte.
Faut-il craindre le déficit US?
Faut-il craindre le déficit US?
La discussion ne nous en a pas moins rappelé qu'il y a quelques jours, le gouvernement fédéral américain bouclait son exercice financier (30 septembre).
Constat?
La situation est nettement meilleure que ce qui était anticipé. Le fédéral ferme son exercice avec un déficit de 1,089 billion $ US (trillion en anglais). C'est l'équivalent de 7% du PIB. Il y a un an, les prévisionnistes estimaient que le déficit se situerait plutôt autour de 8 ou même 9% du PIB.
Une compression plus importante des dépenses et de meilleures entrées fiscales expliquent la performance.
Pendant longtemps, on était personnellement convaincu que les États-Unis ne parviendraient pas à retrouver l'équilibre budgétaire sans déclencher par la même occasion une récession. Éponger un déficit équivalent à 8-9% du PIB, même sur quelques années, est forcément un puissant frein à la croissance.
Cette conviction est cependant désormais beaucoup moins forte.
Pour l'année qui s'amorce, la dernière cible budgétaire de la Maison Blanche n'est que 100 G$ US sous le déficit de 2012. Ça peut sembler un gros montant à renflouer, mais l'an dernier (30 septembre 2012), les Américains ont réussi à abaisser leur déficit de 208 G$, sans que l'économie ne tombe en panne. Réduire le déficit de 100 G$ cette année n'apparaît dans le contexte pas très demandant. Pour 2014, la commande est plus importante et la cible demande une réduction de 233 G$. Tout de même, toujours sur la base de la réduction observée en 2012, l'atteinte de l'objectif n'apparaît pas si difficile.
Encore plus intéressant se trouve dans le fait qu'après 2014 (668 G$ de déficit à ce moment), les projections financières de l'administration Obama ne prévoient pas un réel abaissement du déficit. Jusqu'en 2022, il évolue constamment dans une fourchette 575 -700 G$ US. Il faut maintenir le cap, mais il n'y a pas d'efforts surhumains à faire pour y parvenir.
La Commission Simpson-Bowles, chargée en 2010 de faire des recommandations sur les finances publiques, suggérait des réductions plus importantes qui ramenaient le déficit à 300 G$ qu'en 2018. Une administration Romney voudrait sans doute aller plus loin que l'administration Obama (monsieur Romney a dit mardi soir qu'on ne réduisait pas assez le déficit) et il ne serait pas étonnant qu'elle reprenne les cibles de Simpson Bowles. Même à cela, réduire le déficit de 350 G$ sur quatre ans, n'apparaît pas si complexe.
Il semble y avoir consensus chez les Américains pour ajouter chaque année des déficits à la dette plutôt que d'atteindre le déficit zéro. Ce faisant, nos voisins font le pari que leur dette croîtra, mais de façon proportionnelle avec l'économie.
On n'est personnellement pas un fan de l'approche parce qu'elle a généralement pour effet de maintenir un niveau de dette assez élevé, ce qui complique les choses lorsque l'on rencontre des cycles de recul économique.
Mais il est possible qu'à cause de cette approche moins rigoureuse, l'assainissement des finances fédérales américaines ne déclenche effectivement pas une récession.
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