BLOGUE. Les travailleurs de l'usine de Bombardier à La Pocatière sont en grève. Difficile de trancher sur qui a raison ou à tort dans la dispute sur la sous-traitance. Le conflit donne cependant à penser que le gouvernement de l'époque s'est, soit fait passer un sapin, soit a menti.
Les travailleurs prétendent que du travail qui devait se faire à l'intérieur de l'usine se fait maintenant en sous-traitance à l'extérieur, en contravention des engagements qui avaient été pris envers le syndicat.
La confusion est fort grande dans ce dossier, et règne entre les parties elles-mêmes.
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On comprend que l'enjeu de la sous-traitance fait déjà l'objet de deux griefs qui regardent une lettre d'entente signée en 2010 par Bombardier et le syndicat. Cette lettre encadrait le travail qui serait effectué par Bombardier La Pocatière advenant qu'elle obtienne le contrat de renouvellement du métro de Montréal.
Le syndicat estime que s'il avait gain de cause sur ces deux griefs, le contrat du métro de Montréal lui garantirait un effectif de 400 travailleurs. Il évalue que dans la situation actuelle, il sera à peine de 200 lorsque la production tournera à plein régime.
Lorsque l'on demande à Bombardier quel serait l'effectif supplémentaire qu'elle devrait placer à La Pocatière si jamais elle perdait ces deux griefs, elle parle plutôt de… 10 à 15 emplois!
Elle se défend d'être chiche et explique que si l'embauche d'une douzaine d'employés ne lui coûterait pas tellement plus cher, elle nécessiterait cependant d'importants investissements en machinerie.
Là où le gouvernement paraît mal
Là où le gouvernement paraît mal
Il est difficile de déterminer qui a raison sur les lettres d'entente, et la portée qu'elles devraient avoir sur l'effectif. On laissera ce soin à un arbitre.
Il est cependant fort préoccupant de voir comment au printemps 2010 le gouvernement du Québec s'est complètement gouré dans son évaluation de la situation.
Les libéraux avait à l'époque présenté une loi spéciale pour accorder le contrat de renouvellement du métro de Montréal à Bombardier, mettant ainsi fin à l'appel d'offres en cours.
La société espagnole CAF était en course avec Bombardier pour construire les wagons et se conformait à toutes les exigences.
Le processus faisait suite à une série d'imbroglios que Bombardier avait notamment entretenus en soumettant une soumission de 3,5 M$ par wagon alors que les experts de la STM évaluait le projet à 2,6 M$ par wagon. Devant un écart si important, la société de transport n'avait pas eu le choix de rejeter sa soumission.
Le gouvernement du Québec avait justifié sa loi spéciale par le besoin de sauvegarder les emplois de l'usine de La Pocatière, qui avait à ce moment un carnet de commandes relativement léger.
Une décision qui n'avait pas manqué de faire rouler la controverse.
L'usine de La Pocatière a toujours affiché des variations d'effectif importants et il est permis de se demander si Bombardier était vraiment craintive face à son avenir, elle qui, quelques mois auparavant, se permettait de soumettre une proposition nettement plus élevée que les évaluations initiales (elle allait finalement signer à 2,6 M$ par voiture).
Pour défendre un geste protectionniste sans précédent, Québec indiquait que sa décision allait permettre de fournir du travail à 775 travailleurs pendant 8 ans.
Un porte-parole de Bombardier nous a expliqué que le gouvernement s'était alors trompé, et qu'il avait additionné à l'effectif des 375 employés de l'époque, les 400 employés qui devraient être affairés à l'usine au moment où se réaliseraient les voitures du métro de Montréal. Québec n'aurait pas dû faire cette addition et simplement comprendre que l'usine afficherait un effectif de 400 employés.
Ce n'est pas tout à fait les mêmes retombées économiques.
Bombardier dit aujourd'hui que 80% des retombées du métro de Montréal sont canadiennes et qu'en fait, 70% sont québécoises. Ce qui laisse entendre qu'une partie de la sous-traitance se fait peut-être quand même au Québec. Malheureusement, la vérification de l'affirmation est difficile et le dernier quiproquo permet de se demander si les mécanismes de contrôle du gouvernement sont au point (ou existants!).
La situation ne frise pas le ridicule, elle l'est.
De deux choses l'une: ou bien Québec s'est véritablement fait passer un sapin dans son processus d'analyse, ou bien quelqu'un ment quelque part.
Dans un cas comme dans l'autre, il n'y a pas à être fier.
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