BLOGUE. Ainsi va le vieux gag: c'est une fois un avocat en charge d'un prospectus d'entrée en bourse. Il doit y inscrire la valeur à laquelle les actions seront émises. Pour mettre sa responsabilité à l'abri, il décide de tester la force de son équipe financière avec une petite question arithmétique. "Messieurs- dames, combien font 2 + 2?".
Réponse unanime: "combien veux-tu que ça donne?"
L'entrée en bourse de Twitter, le fameux réseau social, est une belle illustration de la situation.
Donnez-nous un actif, et on pourra à la fois doubler sa valeur, ou la couper en deux. Avec une argumentation financière que personne ne pourra qualifier de fanfaronne. Tout est question de perspective, d'anticipations et d'humeur de marché au moment où on se parle.
Lorsque l'on achète une entreprise, la règle est que l'on paie pour le bénéfice qu'elle générera dans l'avenir. Si l'on croit que les résultats progresseront fortement, on paiera plusieurs fois le bénéfice actuel. Si on croit que la croissance sera modérée, on appliquera un multiple plus faible.
Là se trouve toute la question pour Twitter.
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Certains ont soutenu que les financiers responsables de l'émission d'action avaient joué avec plus de prudence qu'avec Facebook.
On ne dirait pas cela. En 2012, Facebook était arrivée en bourse à 15 fois les revenus de l'année à venir. Selon Sterne Agee, le titre de Twitter a été vendu aux premiers investisseurs à 16 fois les revenus anticipés pour 2014.
Facebook avait fait une solide marche arrière lors de l'émission, Twitter a plutôt fait un faramineux bond en avant (+ 73%).
Une simple question d'humeur et de confiance dans l'avenir de la publicité sur les réseaux sociaux.
Trop cher le titre de Twitter?
Trop cher le titre de Twitter?
Avec le bond de l'ouverture (de 26$ à 44,90$ US), le marché vient de faire augmenter le multiple accolé à Twitter de 16 à 28 fois les revenus anticipés en 2014.
À titre de comparaison, les actions de Facebook, LinkedIn et Yelp se négocient actuellement à un multiple de 11,5.
Il est vrai que Twitter démarre avec un plus petit chiffre d'affaires. Et qu'il est plus facile de faire croître rapidement une petite base qu'une grosse base. C'est pourquoi à 16 fois les ventes, soit le prix de l'émission, le titre semblait afficher une valeur raisonnable.
À 28 fois, c'est cependant maintenant une autre paire de manches.
Prenons Cantor Fitzgerald, qui a une cible à 32$ US sur le titre. La maison calcule que pour l'atteindre, il faudra que Twitter connaisse une croissance de ses revenus de 50% à chacune des cinq prochaines années.
Si tel est le cas, son bénéfice avant intérêts, impôts et amortissements (BAIIA) passera de 155 M$ en 2014 à plus de 4 G$ US en 2019.
On ne doute personnellement pas que Twitter affichera un jour un tel résultat. Il y a un potentiel énorme.
La difficulté est cependant à l'image de ce qui fait le succès de l'entreprise: la contrainte d'espace.
Il est impossible d'aller au-delà de 140 caractères sur Twitter.
Il est aussi impossible pour Twitter d'aller au-delà de cinq ans. Cette marque du 4 G$ de bénéfice ne peut pas être atteinte sur 7 ou 8 ans.
Pour maintenir le cours de son titre, Twitter doit impérativement présenter une croissance de 50% de ses ventes à chaque calendrier dans les prochaines années. Un ou deux mauvais trimestres qui brisent la tendance, et ce sera la descente. En fait, on peut même se demander si livrer la tendance sera suffisant. Le 50% de croissance annuelle des revenus nécessaire est en effet pour atteindre une cible à 32$. Or, le titre se négocie actuellement à plus de 42$.
@moncourtier: vendre position!
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