BLOGUE. Ce n'est pas exactement avec la meilleure des annonces, que le nouveau président du conseil de Rona, Robert Chevrier, et son nouveau chef de direction, Robert Sawyer, ont pour la première fois rencontré leurs actionnaires, mardi, à Boucherville.
Les résultats du premier trimestre, publiés en matinée, étaient fort décevants: une perte de 0,19$ par action, comparativement à un consensus pour une perte de 0,10$ et une perte de 0,11$ l'an dernier.
Sur les marchés, le titre de Rona a mal réagi, reculant de près de 5%.
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C'est avec une assez bonne confiance dans la nouvelle direction de Rona que l'on est ressorti de l'assemblée annuelle. Une confiance malheureusement accompagnée d'un mauvais pressentiment sur les perspectives de son secteur à moyen terme.
Allons-y dans le détail.
Ce que l'on entrevoit du plan de match
Le plan de match de monsieur Sawyer n'est pas encore très clair. Il doit en fait le soumettre au conseil d'administration dans quelques semaines.
Quelques axes d'interventions ont cependant été établis.
Rona transformera Réno-Dépôt en un véritable magasin entrepôt, qui ciblera dorénavant davantage le client de gros, qui achète en volume.
Surtout, elle ne fermera pas sa trentaine de grandes surfaces au Canada anglais. Toutes ne sont pas rentables, mais Robert Sawyer croit que la rentabilité de plusieurs peut être améliorée.
Non seulement le croit-il, mais, en creusant un peu en conférence de presse, on a cru comprendre qu'on songe même à en faire un tremplin pour une expansion significative du réseau avec de plus petits formats.
Monsieur Sawyer n'a en effet pas caché qu'il se pourrait effectivement que Rona profite de son expertise dans toutes sortes de formats pour en ajouter au Canada anglais. Interrogé si ce serait sous une forme « corporative » ou « franchisée », le dirigeant a précisé que l'on évoluait « dans un monde corpo. ». Monsieur Chevrier a même renchéri qu'il était aujourd'hui possible d'avoir des programmes d'intéressement d'employés clefs qui s'occuperaient d'une affaire comme si elle leur appartenait.
Dans ce contexte, il ne serait pas étonnant de voir la filiale Noble (qui vise le marché commercial et professionnel) être prochainement mise en vente. Histoire de fournir des liquidités additionnelles pour l'expansion.
- Oui, mais, n'y avait-il pas consensus il y a quelques mois qu'il y avait trop de joueurs sur le marché et qu'il fallait consolider (d'où la fusion projetée Lowe's-Rona)?, a-t-on demandé un peu plus loin.
Robert Sawyer n'a pas semblé inquiet de la chose. Lowe's n'est pas encore tellement présente, et Home Depot, dit-il, n'offre pas la même chose que Rona. « Nous sommes notamment fort dans le bois, l'isolant et des choses du genre, les constructeurs viennent nous voir et l'on va se concentrer sur nos forces. En région, ce sont souvent les petits joueurs qui nous affectent, nous allons être plus proactifs. Je viens d'un secteur, l'alimentation, où la concurrence était nettement plus forte », a-t-il dit.
Ce que peu de gens semblent voir
Ce que peu de gens semblent voir
À la fois en assemblée générale et en conférence de presse, les dirigeants ont répété qu'ils ne voulaient pas créer d'attentes. Ils ont de même prévenu que 2013 serait une année « exigeante ».
Une bonne nouvelle se cachait toutefois dans les allocutions des dirigeants. Dans sa présentation, le chef de la direction financière, Dominique Boies, a parlé du Plan Nouvelles Réalités qui a généré des retombées récurrentes de 10,5 M$.
Dans son discours, monsieur Sawyer a quant à lui indiqué que des économies de près de 17 M$ ont été réalisées sur une base annualisée grâce à une diminution d'effectif et des renégociations d'ententes avec des fournisseurs. À terme, a-t-il précisé, l'objectif est d'arriver à des économies de 35-45 M$.
Voici la bonne nouvelle. Des 10,5 M$ de mesures identifiées au Plan Nouvelles Réalités, seulement 2-2,5 M$ se sont réalisées et ont été inscrites dans les états financiers de 2012. C'est donc autour de 8 M$ qui se présenteront au bénéfice 2013. À ces économies, on peut additionner la majeure partie des 17 M$ auxquelles faisait allusion monsieur Sawyer, parce que ces économies n'ont été identifiées que depuis le mois de janvier.
Il est fort probable que Rona soit en conséquence en route pour augmenter son bénéfice de 20-25 M$ en 2013. Puis, subséquemment, dans les trimestres suivants, de 18 à 28 M$ supplémentaires (l'objectif étant de se rendre à 35-45 M$).
En appliquant le multiple BAIIA moyen du secteur de 8,7 pour 2014 (Rona, Lowe's, Home Depot), c'est une valeur de 1,45$-1,80$ par action qui pourrait être créée sur ces 20-25 M$ en 2013. Et pratiquement la même chose dans les trimestres suivants si les objectifs sont atteints.
Évidemment, cette plus-value risque de se perdre dans le courant de l'exercice 2013, alors que les nouvelles initiatives demanderont probablement des dépenses extraordinaires, mais elle devrait pleinement ressortir en 2014.
Le marché ayant tendance à tout anticiper, c'est un potentiel minimal de quelque 15% et peut-être même plus (25%) pour le titre, quelque part en 2014.
Ce qui gâche la fête
Pour que la chose se réalise, il faut cependant aussi que les revenus tiennent. Or, c'est ici que ça se complique. La SCHL prévoit que les mises en chantier d'habitations devraient reculer de 11% (de 214 827 à 190 300) au Canada en 2013, idem au Québec (de 47 367 à 42 300).
Pour 2014, elle ne prévoit qu'un léger rebond au Canada (à 194 100) et un marché stable au Québec (à 42 200).
C'est un recul des revenus assez prononcé par rapport à aujourd'hui qui semble dans les cartons si le pronostic se matérialise, un recul qui pourrait bien venir annuler tout le potentiel discuté plus haut.
À moins que l'économie ne redémarre plus fortement que prévu, c'est donc tout un travail de stimulation des revenus que devront accomplir messieurs Sawyer et Chevrier.
Comme dirait les partisans d'une certaine formation tricolore, l'équipe travaille fort, mais le puck ne semble pas vouloir rouler pour elle.
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