BLOGUE. Si elle veut revenir pour acheter Rona, Lowe's devra vraiment aiguiser son crayon. Et même à cela, il n'est pas certain que le nouveau président du conseil d'administration de Rona, Robert Chevrier, sera beaucoup plus partant que ses prédécesseurs.
« Pourquoi faudrait-il vendre toute entreprise au milieu de déboires? Fallait-il vendre Jean Coutu lorsqu'ils ont acheté aux Etats-Unis et que les choses se sont mises à mal aller? Ils ont redressé. Fallait-il vendre Canadian Tire quand ils ont acheté White Stores aux États-Unis (Texas, au début des années 80) et faisaient des pertes? Ils ont redressé. Rona est un joyau canadien. On n'est pas pour donner ça à 14,50$. On verra à 25-30$ ce que pensent nos actionnaires, et s'ils ne veulent pas attendre 50$ », lance-t-il en entrevue, en exagérant pour illustrer sa forte conviction.
Monsieur Chevier a, ces jours-ci, les allures d'un super pompier. À la fin de l'année dernière, il a reçu un appel au secours d'Uni-Sélect, la société qu'il a lui-même construite dans les années 80.
Le détaillant de pièces automobiles vit lui aussi des jours plus difficiles. Contre toute attente, le candidat qu'on avait pressenti pour prendre la direction du conseil d'administration n'a soudainement pas pu la prendre. L'épouse de monsieur Chevrier, qui était au conseil, a pensé qu'il serait bon de le rappeler en renfort. Et le CA a dit de même.
SUIVRE SUR TWITTER: F_POULIOT
Le nouveau président arrive chez Rona avec une solide expérience dans le secteur de la distribution. Il a passé les 20 dernières années au conseil de Quincaillerie Richelieu, une société qui fait flèche de tout bois en vendant des produits novateurs à des quincailliers et à des fabricants de toutes sortes (armoires, meubles, etc.).
Surtout, il n'en est pas à ses premières armes comme redresseur. À l'été 2001, le confrère René Lewandoski avait dressé pour le magazine CA le portrait de son passage à la tête du distributeur industriel Westburne. Une fascinante histoire de repositionnement.
À l'arrivée de Robert Chevrier, à la fin de 1993, l'entreprise faisait face à de lourdes pertes et était au bord du gouffre. Fortement endettée, elle avait dû interrompre le versement de son dividende.
Une vaste restructuration avait alors été entreprise. Près de 1200 personnes avaient perdu leur emploi, dont 450 immédiatement. Presque toute l'équipe de direction avait été remerciée. Ce qui n'était pas performant avait été fermé.
Fini la croissance pour la croissance. La nouvelle mission édictée par Chevrier: être rentable, quitte à devenir plus petit.
La suite des choses
La suite des choses
Avec le temps, la machine était repartie et de nouvelles acquisitions de distributeurs avaient suivi.
Résultat: au début des années 2000, les actionnaires avaient fait quelques fois leur mise.
La recette pourrait bien être imitée pour Rona. « Monsieur (Dominique) Boies (PDG intérimaire) a déjà un bon travail de fait. Ils sont à identifier des pistes de rationalisation et de redressement », dit Robert Chevrier.
Plus difficile de redresser une entreprise avec des franchisés?, lui a-t-on demandé.
« Je ne pense pas que ce soit plus difficile. Ce sont nos associés. Il y a peut-être un défi additionnel de communication. On ne leur dit pas qu'on va amener un bouquet de roses sans épines, mais nos intérêts sont les mêmes. »
Et le temps? Vous en restera-t-il avec Uni-Select qui doit aussi être redressée?
« Je ne serai pas chez Rona (ou Uni-Sélect) tous les jours. Il y aura un chef de direction pour l'exécution (qui doit être nommé en février). J'y serai plus souvent au début, mais j'espère pouvoir quitter le rôle d'exécution dans un an, un an et demi. Je viens ici pour donner le ton. Si on ne joue pas assez vite ou assez fort, j'augmente le ton et fais aller la baguette », répond le super pompier de 68 ans.
La note est donnée.