Blogue. Ca y est, le nouveau régime sur les redevances minières est connu. Bonne ou mauvaise affaire?
D'abord un peu de quincaillerie et de détails, les constats et le verdict après coup.
Jusqu'en janvier 2014, les règles minières continueront d'évoluer selon le régime actuel établi en par le gouvernement libéral. En plus de l'impôt sur le revenu qu'elles doivent payer aux gouvernements provincial et fédéral, les sociétés minières continueront de payer une redevance équivalente à 16% du bénéfice.
Après coup, elles entreront sous un nouveau régime hybride.
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Celui-ci prévoit un impôt minimal sur la valeur du minerai extrait. Si une société extrait pour moins de 80 M$, elle devra payer 1% en redevances. Au-delà de ce premier 80 M$, chaque dollar supplémentaire sera imposé à 4%.
En parallèle à ce régime d'impôt minimal court un régime sur l'imposition des profits, où trois niveaux d'imposition sont prévus dépendamment de la marge bénéficiaire des sociétés (16% pour une marge de 0-35%; 22% pour une marge de 35-50% et 28% pour une marge de 50-100%).
Les deux régimes d'impôt ne s'additionnent pas. L'impôt payé sera celui du régime qui en réclame le plus.
Les partisans d'importantes redevances seront déçus
Ceux qui s'attendaient au pactole seront déçus.
En campagne électorale, le Parti Québécois avait indiqué qu'il pourrait amasser 388 M$ de plus par année avec le nouveau régime hybride. On ne sait trop sur quelles hypothèses il s'appuyait, mais les projections dévoilées lundi sont bien loin de la somme. Si le régime s'était appliqué à l'exercice 2011, il n'aurait généré qu'entre 35 et 50 M$ de plus. Sur l'horizon 2015, on prévoit qu'il générera 370 M$, alors que le régime actuel aurait généré 320 M$.
Pour faire une histoire courte, lorsque les prix des métaux sont moyens (autour de 130$ US la tonne pour le fer et 1500 $ US l'once pour l'or), le nouveau régime devrait faire entrer 15% plus de redevances que l'ancien. Lorsque les prix seront élevés (disons 160$ US pour le fer et 1800$ pour l'or), il pourrait faire entrer jusqu'à 30% plus de revenus.
Ne pariez pas la maison sur des prix forts et ce 30% supplémentaire dans les prochaines années. La demande actuelle en fer de la Chine est insoutenable à long terme et il est même douteux que les prix de l'on observe actuellement (autour de 130$ US) tiennent. Pour l'or, la situation est différente, mais il est également douteux que le prix de 1500 $ US l'once tienne.
Un frein à l'investissement?
Un frein à l'investissement?
C'est ce que fera assurément valoir l'industrie minière.
La redevance minimale sur le minerai pourrait sonner le glas de quelques projets qui ont déjà de la difficulté à atteindre la rentabilité. Il est peu probable que la mesure empêche de nouveaux projets de naître, mais elle pourrait peut-être avoir un impact sur des initiatives de prolongements de vie.
On aurait personnellement préféré un régime uniquement basé sur la rentabilité.
Au niveau de sa compétitivité globale, le nouveau régime québécois n'apparaît pas avoir grandement perdu, mais il est difficile de bien voir.
Le taux effectif d'imposition sur les bénéfices (en additionnant les impôts sur les revenus des deux gouvernements et l'impôt minier) est actuellement de 38,6%. Les documents du ministère soutiennent qu'il grimpera à 39,4% lorsque les marges seront moyennes et à 42,4% lorsque les marges seront fortes.
À titre de comparaison, le taux effectif de l'Australie tourne autour de 45%.
Le nouveau régime ne devrait théoriquement pas freiner les investissements dans le fer puisque l'Australie est le plus important concurrent et que son taux est plus élevé. Mais les bénéfices des mines québécoises sont plus faibles que ceux des mines australiennes. Enfin, on devrait quand même s'en sortir sans trop de dommages.
C'est un peu plus compliqué pour les investissements aurifères cependant. En Ontario, le taux effectif est à 32%, ce qui peut potentiellement être un facteur décisif. Les voisins ont cependant le régime minier le plus généreux au pays. Il faudra voir si la province s'ajustera en partie au régime québécois pour tenter de diminuer son important déficit budgétaire, ou si elle jouera la carte de la juridiction la plus attrayante en misant sur une récolte d'impôt via de nouveaux emplois créés.
L'un dans l'autre?
Le nouveau régime de redevances aidera à la situation de la dette du Québec, mais ce ne devrait être que marginalement.
La compétitivité du régime se détériore, mais on ne dirait pas démesurément.
Quelques interlocuteurs aimaient bien à citer lundi la pièce de Shakespeare « Beaucoup de bruit pour rien ».
Ce n'est pas loin de la vérité, et c'est tant mieux.
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