BLOGUE. Le rapport D'Amours est-il sur le point d'être tabletté? Non. Mais l'une de ses principales raisons d'être, le renflouement des régimes de retraite publics, est effectivement à haut risque d'être repoussée aux calendes grecques.
Deux choses nous ont particulièrement surpris à la lecture du rapport de la commission parlementaire sur les recommandations du comité D'Amours.
On y dit une chose et son contraire
D'accord avec les parlementaires, la rente de longévité peut difficilement être implantée du jour au lendemain.
La proposition vise à permettre l'établissement d'une rente annuelle de 10 000$ à compter de 75 ans, qui serait financée à la fois par l'employé et l'employeur à raison d'une cotisation équivalente à 1,6% du salaire admissible (843,15$ par année pour un salarié gagnant plus de 51 100$, l'équivalent pour l'employeur).
Des discussions doivent avoir lieu avec Ottawa pour que son implantation ne vienne pas diminuer le Supplément de revenu garanti. Pour cette raison, un délai est justifiable.
La commission parlementaire poursuit cependant en recommandant que des études supplémentaires viennent évaluer l'impact de la rente sur les entreprises et l'économie, puis, que l'on examine la possibilité de bonifier le régime des rentes du Québec de manière à porter le taux de remplacement du revenu de 25% à 50%.
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Il est difficile de trouver plus incohérent et antinomique. Pendant que l'on s'interroge si l'effort demandé aux entreprises ne sera pas trop important, on pense aussi à leur demander plus de coûts que ce que suggère le rapport D'Amours. Le mémoire de la Fédération des femmes du Québec, qui s'appuie sur les calculs d'un ancien actuaire en chef du régime de pension du Canada, estime que de porter le remplacement du revenu de 25% à 50% nécessiterait des hausses de cotisation RRQ de 3%, à la fois pour l'employeur et l'employé. C'est le double de ce que suggère D'Amours et ça ne passera jamais dans le milieu des affaires.
On ne devrait pas tergiverser en études sur la question de la rente de longévité, et aller de l'avant immédiatement en demandant à Ottawa de simplement harmoniser le Supplément du revenu garanti de manière à ce que les rentiers ne soient pas pénalisés pour leur bon comportement.
Québec doit imposer un cadre aux villes et université
Québec doit imposer un cadre aux villes et universités
L'autre élément décevant du rapport des parlementaires est qu'il laisse totalement en friche la façon dont on règlera les déficits passés des régimes de retraite. "Les parlementaires constatent que les organisations syndicales s'opposent à toute réduction des droits relatifs au service passé. Devant les positions aussi divergentes des deux parties, la solution n'apparaît pas évidente pour la Commission."
Glissons ici un aparté pour dire que certains intervenants ont raison de remettre en question la méthode de capitalisation améliorée suggérée par le rapport D'Amours. Si, dans le passé, les actuaires ont visé trop haut avec leurs hypothèses actuarielles, la proposition de capitalisation améliorée semble cette fois viser un peu trop bas. Il y aurait lieu d'y avoir une approche intermédiaire qui ferait moins gonfler les déficits.
Revenons à la déception pour dire que le gouvernement a aussi raison de ne pas suivre la demande du maire de Québec de permettre aux villes de décréter les conditions des régimes de retraite (demande qui est aussi celle de Montréal, mais formulée plus subrepticement).
Les villes contribuent déjà à une certaine hauteur au renflouement des déficits passés. Les comparutions en commission parlementaire nous ont cependant laissé sur l'impression que certaines villes ne souhaitent plus avoir à contribuer aux déficits passés. Dit autrement, elles profiteraient d'un pouvoir de décret pour refiler aux employés une partie de la facture qu'elles paient déjà dans le simple but d'utiliser les économies pour financer d'autres services.
La réflexion sur les régimes de retraite n'a pas pour but d'améliorer les budgets actuels des municipalités, elle a pour but d'empêcher une nouvelle détérioration. Il faut se garder de les laisser agir unilatéralement.
On a beau y regarder de tous les côtés, on ne voit pas comment le renflouement des régimes de retraite des municipalités et des universités pourra s'effectuer sans que le Parlement ne déclare par loi quelle est la part que les employés et quelle est celle que les entités doivent assumer dans les déficits passés.
Une fois cette part déclarée, les négociations pourront enfin se mettre en route. Si des pénalités sont prévues pour chacune des parties en cas d'une absence d'accord au bout d'un moment, tous se mettront à négocier de bonne foi.
Il est temps que le gouvernement du Québec et la ministre Agnès Maltais se positionnent sur cette question. Tout comme les partis d'opposition.
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