BLOGUE. Enbridge, qui souhaite inverser le flux d'un de ses oléoducs pour transporter du pétrole à Montréal. Et TransCanada, qui songe à en construire un nouveau jusqu'au Nouveau-Brunswick (en passant par Québec et sa raffinerie Ultramar), en plus de deux ports d'exportation. Des noms à jouer avec le fameux bouchon pétrolier ?
L'idée nous est venue d'examiner la situation pour voir s'il ne s'y trouverait pas quelques titres gagnants.
Le problème actuel
L'histoire n'est pas nouvelle, mais elle est souvent confuse. Situons d'abord le problème auquel on tente de remédier grâce aux projets de pipeline.
Depuis deux ans, le prix du baril de pétrole canadien (PAR pour le léger, WCS pour le lourd) est inférieur à celui du baril WTI aux États-Unis et à celui du Brent en Europe. Au dernier trimestre, le Brent s'est en moyenne négocié à 111,36 $ US, le WTI, à 94,36 $ US et les pétroles canadiens, respectivement à 90 $ et 67 $ US (WCS).
La majorité des raffineries de la côte Est n'ont accès qu'au Brent, ce qui les place en désavantage concurrentiel avec plusieurs raffineries américaines.
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La cause de l'écart de prix tient à deux ou trois phénomènes. D'abord, une forte augmentation de la production des sables bitumineux canadiens, de même que l'arrivée inattendue du pétrole de schiste du Dakota du Nord (dont la production excède maintenant en volume celle de l'Équateur, un pays membre de l'OPEP). La majeure partie de ces nouveaux volumes ont été dirigés par pipeline au centre des États-Unis (au hub de Cushing, en Oklahama) et y sont actuellement enclavés, faute d'un nombre de conduites pour les faire sortir.
Le WTI est moins cher que le Brent pour cette raison, et les pétroles canadiens, moins chers que le WTI, car le pétrole du Dakota crée lui-même un premier bouchon en amont.
Les projets d'Enbridge et de TransCanada visent à désengorger tout cela, à permettre aux pétrolières albertaines d'obtenir des prix plus élevés et aux raffineries de l'Est d'obtenir des prix moins élevés.
Ces projets s'ajoutent à celui de Keystone XL, le pipeline qui pourrait être construit jusqu'au golfe du Mexique, et dont on attend l'approbation par l'administration Obama. De même qu'à une pléiade d'autres projets d'expansion, qui doivent se faire à plus ou moins long terme.
Quelle sera la suite ?
Quelle sera la suite?
La probabilité de réalisation semble assez bonne pour Keystone XL. Et, sinon, d'autres projets de pipelines devraient se matérialiser.
Dans le contexte, il peut être intéressant de jouer les titres d'oléoduc engagés dans des projets. Personnellement, on maîtrise cependant assez mal le contexte réglementaire de ces sociétés. Et, conséquemment, le potentiel des projets. Il est plus facile de s'interroger sur les conséquences du désengorgement pour les pétrolières canadiennes.
L'équipe de la maison AltaCorp Capital s'est récemment penchée sur la question. La réponse se résume à ceci : tout devrait monter, particulièrement les titres des pétrolières canadiennes engagées dans le pétrole lourd, mais l'on pourrait devoir attendre un an ou deux avant d'assister à l'envolée.
C'est précisément le genre de situation que l'on aime. Celle où les cours des sociétés sont faibles, parce qu'il y a encore peu de lumière au bout du tunnel. Il suffit d'attendre et de récolter les rendements le moment venu.
Ce qui s'en vient
Cela dit, les investisseurs devront avoir des nerfs d'acier au cours des prochains mois, particulièrement si la pétrolière choisie est dans le pétrole lourd.
Des ennuis dans les réseaux de pipeline ont dernièrement amené de nouvelles diminutions de capacité. La récente mise en service du projet de sables bitumineux Kearl (pétrole lourd), d'Imperial, ajoute aussi des volumes dont on se serait passé. Les écarts de prix entre les pétroles canadien et américain, de même que ceux entre le brut et le léger canadien, pourraient donc prochainement s'accentuer.
À compter de la deuxième moitié de 2014 toutefois, des accroissements de capacité dans les oléoducs, notamment grâce à la mise en service du projet Flanagan South, devraient permettre de défaire pour un temps le noeud dans la tuyauterie canadienne et américaine.
Nouvelle encore plus intéressante, à ce moment, la demande de brut lourd devrait être particulièrement importante. Devant le développement des sables bitumineux (souvent du pétrole lourd), plusieurs raffineries ont en effet, ces dernières années, investi dans des projets tablant sur ce type de pétrole. La capacité de raffinage devrait grimper de 350 millions de barils par jour (Mb/j) en 2013 dans le corridor central des États-Unis, alors que la production de pétrole lourd ne devrait avancer que de 170 Mb/j. Un fort signal sur le prix lorsque tout débouchera.
Qui jouer ?
On n'a pas validé chacun de titres, mais AltaCorp Capital aime bien les moyennes capitalisations suivantes : Bellatrix (Tor., BXE, 6,73 $), Baytex (Tor., BTE, 41,04 $), Enerplus (Tor., ERF, 14,08 $), Legacy (Tor., LEG, 5,57 $) et Southern Pacific (Tor., STP, 0,62 $). Chez les grosses capitalisations, elle aime Cenovus (Tor., CVE, 30,43 $) et Suncor (Tor., SU, 28,82 $).
DANS LE DÉTAIL
Sur le radar
Le titre sur cinq ans
Bellatrix (BXE ; 6,73 $)
Recommandation des analystes
Achat 6
Surperformance 5
Conserver 0
Sous-performance 0
Cible moyenne : 8,80 $
Le titre sur cinq ans
Legacy (LEG ; 10,30 $)
Recommandation des analystes
Achat 4
Surperformance 11
Conserver 1
Sous-performance 0
Cible moyenne : 10,30 $
Le titre sur cinq ans
Suncor (SU ; 28,82 $)
Recommandation des analystes
Achat 6
Surperformance 15
Conserver 1
Conserver 0
Cible moyenne : 41,90 $
francois.pouliot@tc.tc
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