BLOGUE. La direction de Genivar marchait visiblement sur des œufs, jeudi matin, lors de son assemblée annuelle. Après une présentation des mesures mises en place pour renforcer l'éthique et les processus de contrôle dans l'ensemble de l'entreprise, la société a prévenu qu'elle ne prendrait aucune question sur le sujet.
Un mot d'ordre que les actionnaires se sont bien gardés de contester, puisque, à la période des questions, il n'y a eu aucune question. Sur la Commission Charbonneau, sur ses conséquences, ou encore sur l'acquisition de WSP. Rien.
Heureusement, la direction a finalement accepté d'ouvrir davantage, plus tard, avec les journalistes.
« Si quelqu'un de la haute direction était impliqué, on ne serait pas assis ici devant vous », a notamment indiqué le chef de la direction financière, Alexandre L'Heureux.
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La Commission Charbonneau arrive à un bien mauvais moment pour Genivar, qui aurait assurément préféré que la discussion porte davantage sur ses projets d'expansion.
Elle arrive d'autant à un mauvais moment qu'en lisant la circulaire de direction, on s'est aperçu que le grand patron, Pierre Shoiry, le chef de la direction financière, et le chef de l'exploitation, avaient reçu des bonis supplémentaires pour l'exercice 2012. Des bonis attribués à l'extérieur de ce qui était prévu au programme de rémunération (où les bonis sont en fonction de cibles à atteindre) adopté l'an dernier. Le supplément de récompense est de 200 000$ pour monsieur Shoiry, idem pour le chef de la direction financière, et 60 000$ pour le chef de l'exploitation.
En conférence de presse, le président du conseil, Christopher Cole, a expliqué que les bonis avaient été accordés en dehors de l'enveloppe prévue de rétribution parce que celle-ci ne reconnaissait pas suffisamment la valeur qu'avaient créée les dirigeants dans la dernière année, grâce à l'acquisition de l'européenne WSP.
Vrai, il ne s'agit pas d'une première. À quelques reprises dans le passé, des entreprises ont accordé des bonis spéciaux à des dirigeants lors de situations spéciales. Il faut aussi noter que, depuis la création du programme d'options en 2011, les dirigeants n' en ont reçu aucune. Et que l'on a vu, chez d'autres sociétés, des rémunérations de hauts dirigeants nettement plus extravagantes que celles des dirigeants de Genivar. À titre d'illustration, en incluant le fameux boni de 200 000$, la rémunération de monsieur Shoiry n'a atteint qu'un peu plus de 1 M$ en 2012.
Oui, mais…
Oui, mais...
Quand même. On savait dès l'an dernier que Genivar allait dans les trimestres qui allaient suivre jouer audacieusement. Elle qui était uniquement présente au Canada déclarait notamment à sa dernière assemblée qu'elle visait à générer 50% de ses revenus à partir de ses activités internationales d'ici 2014.
On est aujourd'hui à plus de 60%, et un peu avant le temps, mais sur une seule acquisition. Si WSP avait eu un chiffre d'affaires un peu moindre, il n'y aurait vraisemblablement pas eu de récompense supplémentaire. On ne peut conséquemment pas dire qu'il y a l'évidence « d'un travail exceptionnel par rapport à ce qui était au plan ».
En outre, il est aussi indiqué dans la politique de rémunération qu'un des objectifs à prendre en compte est « le ralliement des employés autour des valeurs fondamentales et de la culture de Genivar ».
Dans le contexte du départ d'un important vice-président pour des gestes illicites, et d'un certain nombre de contributions illégales à des partis politiques, il y avait ici forte matière à réflexion avant d'accorder le bonus supplémentaire.
En résumé: la rémunération des dirigeants n'est peut-être pas exagérée, à la lumière du travail accompli et des autres rémunérations du secteur. Mais l'octroi du bonus supplémentaire - dans le contexte de la Commission Charbonneau et compte tenu que le plan de récompense préétabli considérait déjà d'importants objectifs de croissance – est difficilement défendable.
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