Le gouvernement du Québec annonce l'attribution de 800 MW pour de nouveaux projets dans l'éolien. Cette décision est surprenante, et n'est évidemment accompagnée d'aucune évaluation économique.
C'était 700 MW qui restaient à être alloués sur le projet de 4000 MW qu'avait adopté la province il y a quelques années. À la veille de la dernière campagne électorale, le gouvernement Charest avait fait quelques vagues en annonçant que ces 700 MW allaient être attribués. L'annonce était cependant devenue incertaine avec l'arrivée du Parti québécois au pouvoir et sa décision d'annuler pour 50 MW de projets de minicentrales.
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La rumeur avait couru à l'effet que le gouvernement pourrait au final n'accorder qu'une partie des mégawatts. La ministre des ressources naturelles, Martine Ouellet, avait semblé accréditer la chose en déclarant; « Il devra y avoir de nouveaux projets qui se réaliseront, mais nous sommes en train d'analyser l'ampleur et comment les choses vont se dérouler. »
Surprise, le projet n'est pas diminué, il est plutôt augmenté! Probablement parce qu'on veut qu'Hydro-Québec Production fasse son entrée dans le domaine (200 MW).
La difficulté est que le Québec nage déjà dans les surplus d'électricité et qu'il n'a pas besoin de cette électricité. La projection fait état de surplus jusqu'en 2027, et encore là, cette fin des surplus ne veut pas dire que la province aurait manqué d'électricité. Elle veut simplement dire que l'on aurait acheté à Hydro-Québec de l'électricité qu'elle envoie actuellement sur les marchés de l'exportation (à des prix peu élevés).
À chaque fois que les pâles des nouvelles éoliennes tourneront, c'est le contribuable qui paiera pour quelque chose dont il n'a pas besoin. Hydro achètera cette électricité et la revendra à perte sur les marchés extérieurs.
Il est décevant de voir comment le gouvernement tente de faire du millage politique sur cette histoire, et omet de nuancer ses communications.
Il est vrai que sans cette annonce, l'industrie éolienne, qui compte 5000 emplois, dont 2300 liés à la fabrication d'équipements, était en danger de très forte attrition.
La probabilité de succès de l'opération de sauvetage est cependant onéreuse et hautement aléatoire.
Il n'y a aucune garantie que les trois grands manufacturiers - GE, Enercon et REpower – continueront de produire au Québec, si, après l'appel d'offres de 800 MW, il n'y a plus de contrats à obtenir ici. On reluque sans doute les États-Unis, mais le marché éolien est lui aussi en difficulté là-bas alors que les producteurs d'électricité au gaz naturel sont avantagés côté coûts.
Les manufacturier américains étaient venus s'approvisionner ici parce qu'une partie des équipements devaient être produits au Québec pour qu'ils puissent se qualifier. Non pas pour y développer de l'expertise.
Dans ce contexte, il serait plutôt étonnant que ces joueurs choisissent de faire du Québec une plaque tournante de production. Québec semble en être conscient et fait allusion au renouvellement du parc éolien québécois qui doit s'amorcer en 2025. C'est un espoir de relais, mais il reste à voir s'il y aura suffisamment de nouveaux équipements pour que les exigences actuelles de contenus québécois puissent être reconduites.
Le risque semble important que l'industrie éolienne manufacturière ne s'amincisse significativement dans quelques années. Et elle aura coûté cher au trésor public.
C'est pourquoi l'on est assez fortement convaincu que Québec vient de commettre une erreur.