BLOGUE. Le modèle d'affaires du Cirque du Soleil est vraiment cassé et l'on peut se demander s'il pourra maintenir son rayonnement actuel.
Le Cirque a réalisé en 2012 des revenus records de plus de 1G$, et vendu plus de billets que jamais dans son histoire. Il a cependant réussi à perdre l'argent.
Comment est-ce possible?
Allons-y simplement. Prenez hypothétiquement 10 spectacles qui font de l'argent, ajoutez-en un autre. Continuez à remplir vos dix chapiteaux comme dans le passé, mais ne remplissez le onzième qu'à 10% de capacité. Vous vendrez plus de billets et ferez plus de revenus que jamais dans votre histoire, mais les pertes que vous engrangerez avec le dernier show, s'il est d'envergure, viendront probablement éliminer toute votre rentabilité.
Si la situation du Cirque était celle que l'on vient de dépeindre, il n'y aurait pas encore trop de difficultés. Il serait possible de prendre la perte de l'année, d'éliminer le show, et de repartir avec un nouveau en calculant mieux son affaire ailleurs.
SUIVRE SUR TWITTER: F_POULIOT
La situation est malheureusement beaucoup plus difficile.
Le Cirque du Soleil a dû interrompre plusieurs de ses spectacles dans les dernier mois (Zed au Japon, Zaia à Macao, Viva Elvis à Las Vegas, Iris à Los Angel). On parle de quatre ou cinq, dépendamment que l'on regarde sur un an ou deux.
Dans le passé, le modèle d'affaires pour beaucoup de spectacles (tous ceux de Las Vegas en tout cas) fonctionnait ainsi: le Cirque se trouvait un partenaire qui construisait un théâtre sur mesure et payait une partie de la production. On se partageait ensuite les bénéfices.
« Malheureusement, le partenaire ne veut plus investir », a indiqué une porte-parole.
Normal. Les partenaires potentiels sont devenus craintifs puisque, on le voit bien, beaucoup des derniers associés n'ont pas récupéré leur mise.
Une situation qui devait commencer à compliquer passablement le plan de match du Cirque, qui, à terme, doit remplacer un certain nombre de ses productions par de nouvelles.
Faute de réponse des partenaires, le Cirque devra désormais prendre plus de risques, a-t-on laissé entendre en conférence de presse. Traduction libre: le cirque pourrait bien désormais devoir mettre plus d'argent dans les projets pour acquérir la même part de bénéfices qu'il recevait dans le passé. Et faire miroiter des bénéfices plus sûrs aux partenaires pour les convaincre de revenir.
Comment faire?
Comment faire?
Comment avoir plus de souplesse financière pour mettre plus d'argent? Et comment améliorer les perspectives de bénéfices?
En compressant le plus possible les dépenses.
Afin de préserver la qualité des spectacles et leur attrait, on commencera par couper au siège social, ce qui explique pourquoi les 400 suppressions d'emplois surviennent principalement à Montréal.
Est-ce que les compressions seront suffisantes pour permettre au Cirque d'injecter dans les productions une part d'argent plus importante que dans le passé? On a posé la question de la manière suivante:« Faudra-t-il un nouvel actionnaire dans le Cirque du Soleil pour amener du nouvel argent et le recapitaliser un peu? »
Réponse: « Ce n'est pas une possibilité à laquelle Guy Laliberté a fait allusion ».
Avec les 600 M$ qu'il avait touché en vendant 20% de sa participation à un groupe de Dubaï en 2008, monsieur Laliberté a probablement la latitude financière nécessaire pour une réinjection de fonds si celle-ci devenait nécessaire.
Selon ce qu'on a compris mercredi, il est vraiment déterminé à relancer l'entreprise et n'entend surtout pas se retirer en vendant.
Il ne s'agit pas de tout recommencer à zéro, mais concevoir un nouveau modèle d'affaires qui permette de maintenir le rayonnement actuel du cirque ne sera pas simple. Guy Laliberté est engagé dans un salto-arrière complexe qui demandera autant, sinon plus d'imagination d'affaires, que ceux que le public peut admirer en piste. Retenons notre souffle en espérant qu'il retombe sur ses pieds.
SUIVRE SUR TWITTER: F_POULIOT