BLOGUE. C'est avec étonnement que l'on a assisté cette semaine à un barrage de critiques de la part d'investisseurs de notre entourage à l'endroit de Bombardier. « Pas de commandes pour le CSeries au Salon aéronautique du Bourget, ça va mal, c'est vraiment décevant », disait-on.
L'étonnement vient du fait que, personnellement, on n'en attendait aucune.
À quelques semaines d'un premier vol d'essai, et avec 177 commandes fermes (sur un objectif de 300 pour le milieu 2014) on ne voit pas trop quel pouvait être l'intérêt de Bombardier de continuer à donner des escomptes pour ses appareils CSeries. En l'absence d'escomptes importants, on ne voit pas trop non plus pourquoi les clients intéressés se seraient bousculés avant que démonstration soit faite que les performances promises sur papier sont celles livrées sur le terrain.
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Les semaines qui viennent seront cruciales pour l'avenir du CSeries. L'appareil doit notamment livrer une économie de 15% sur les coûts d'exploitation, une meilleur efficacité-carburant de l'ordre de 20%, des réductions d'émissions de CO2 de 20%, et une empreinte sonore quatre fois moindre.
Des écarts significatifs de résultats sur ces promesses pourraient ébranler le plan d'affaires, forçant soit des réinvestissements, soit des abaissements de prix, soit les deux à la fois.
À l'inverse, une atteinte des objectifs, ou encore un dépassement de ceux-ci, est susceptible de ramener pas mal d'intérêt pour la famille d'appareils. Dans le 110-160 passagers, le CSeries deviendrait l'appareil le plus performant sur le marché. Malgré les opérations de remotorisation des concurrents (Airbus, Boeing et Embraer), il est difficile d'imaginer que Bombardier ne puisse alors se tailler une bonne part de marché.
Là où la donne pourrait avoir changé
Là où la donne pourrait avoir changé
Cela dit, on est en partie d'accord avec la critique. Le Salon de Paris est décevant pour Bombardier.
Pas en raison de l'absence de commandes pour le CSeries. Plutôt à cause de l'enthousiasme avec lequel a été reçu le projet de nouvelle famille d'avions d'Embraer.
L'avionneur brésilien veut remotoriser ses appareils, modifier leurs ailes et augmenter la capacité de son plus gros porteur. La nouvelle famille E-Jet offrira des modèles d'avions qui pourront transporter de 70 jusqu'à 144 passagers.
Sur papier, la nouvelle famille d'Embraer n'apparaît pas une formidable menace pour le CSeries. La direction d'Embraer soutient que son plus gros porteur offre une économie de coût par siège de 5% par rapport au A319neo, le nouvel appareil remotorisé d'Airbus. L'analyste Cameron Doerksen, de Financière Banque Nationale, note cependant avec justesse que le CS300 de Bombardier doit avoir un avantage de 12% sur le A319neo.
Là où les choses se compliquent, c'est cependant avec les autres avions régionaux de Bombardier, les actuels CRJ. Ces appareils viennent soudainement de devenir nettement moins compétitifs.
Or, pour que le CSeries puisse créer de la valeur pour les actionnaires, il faut que les commandes actuelles de CRJ puissent se maintenir.
Évidemment, tout comme pour le CSeries, les économies prévues par Embraer ne sont que sur papier et ne sont pas encore acquises. Mais Bombardier peut-elle courir le risque de les laisser se matérialiser sans réagir?
L'entrée en service des E-Jet doit s'amorcer en 2018 et se poursuivre jusqu'en 2020.
Quelque chose nous dit que, dès le CSeries sur les rails, Bombardier devra réinvestir dans sa famille d'avions CRJ pour tenter d'améliorer leur performance. Pour que l'opération puisse bien fonctionner, il faudra cependant que le nouvel appareil (CSeries) fonctionne selon les attentes ou que ses carences ne nécessitent pas d'investissements majeurs.
Les prochaines semaines seront vraiment révélatrices de l'avenir de Bombardier aéronautique.
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