C'est toute une culbute que vient de prendre le titre de Chorus Aviation. L'action de la société mère de Jazz, a perdu plus de 25% de sa valeur en deux jours, après que l'entreprise eut annoncé qu'elle coupait son dividende de moitié.
Depuis, le débat a cours chez les analystes. Qu'arrive-t-il à Chorus et combien peut bien valoir son action?
Pourquoi la coupe
Essentiellement l'affaire tient à une pomme de discorde avec Air Canada sur la cote que se prend Chorus pour assurer les dessertes régionales du grand transporteur. À 12,5%, celle-ci fait présentement l'objet d'un arbitrage. Les parties ne s'entendent pas sur les variables et même certaines constantes du calcul.
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Chorus estime que malgré différents ajustements, sa marge devrait demeurer autour de 12,5%. Air Canada dit qu'elle devrait être de 11,41%, mais sans tenir compte d'un facteur d'ajustement pour le remplacement de la flotte d'appareils. Un tel facteur doit être pris en compte, précise Air Canada, mais à son bénéfice à elle. Ce qui risque d'envoyer la marge de Chorus à un niveau plus faible encore, que personne ne quantifie réellement.
La coupe du dividende semble survenir de façon préventive. La direction de Chorus indique que si elle perd contre Air Canada, elle pourrait devoir rembourser certains éléments prévus à l'entente, rétroactivement en 2010. C'est près de 90 M$ qui sont au bâton, alors que ses liquidité sont actuellement à 118 M$ et qu'un renouvellement de débentures de 80 M$ arrive en 2014.
En diminuant de moitié son dividende, Chorus économise 36 M$ par année.
Alors, combien vaut Jazz?
Alors, combien vaut Jazz?
Ce n'est pas aisé à dire.
RBC Marchés des capitaux estime que Chorus joue prudemment et ramène son dividende en fonction d'un scénario de marge à 9,5%, chiffre qu'avait initialement avancé Air Canada en octobre 2011, comme l'interprétation adéquate à donner à l'entente actuelle.
Sous cette perspective, le titre pourrait bien être un achat fort intéressant. Au cours actuel (2,68$), le nouveau dividende donne en effet un rendement annuel de 11,2%.
Tous ne voient cependant pas les choses ainsi.
David Tyerman, de Canaccord Genuity, estime lui que la situation est encore plus compliquée qu'elle n'en a l'air.
Le litige permet de se demander si, dès le départ, Chorus n'aurait pas été mal structurée. On n'aurait notamment pas suffisamment tenu compte des besoins de renouvellement de la flotte.
S'ajoute le fait que les coûts d'exploitation de Jazz semblent les plus élevés en Amérique, ce qui est insoutenable à long terme. Particulièrement dans une situation où WestJet ajoute de la capacité à faible coût avec Encore, et où Porter et Sky Regional accentuent la lutte.
En théorie, dit l'analyste, l'entente avec Chorus va jusqu'en 2020, et il est fort possible qu'effectivement elle remporte en bonne partie l'arbitrage. Dans les faits, même si tel était le cas, elle devra cependant vraisemblablement renégocier son entente avec Air Canada avant 2020. À moindre coût et probablement pour une durée plus étendue. Simplement pour éviter qu'Air Canada ne perde trop de parts de marché (ce qui diminuerait ses propres volumes futurs), et pour pouvoir renouveler sa flotte dans un horizon d'amortissement réaliste.
En ajustant son modèle pour tenir compte des changements nécessaires, monsieur Tyerman arrive à une cible à 1,50$. De loin inférieure au cours actuel.
Que penser?
Sur la lecture de situation, monsieur Tyerman pourrait bien être assez juste. Et l'avenir ne pas être très ensoleillé pour les employés de Jazz. Chorus semble en voie de se présenter plus tôt que tard avec des demandes de concessions importantes.
Sur la valeur du titre, l'hypothèse de 1,50$ donne probablement trop dans le pessimiste, étant donné les concessions qui seront sans doute obtenues des employés. Elle est cependant indicative d'une visibilité fort limitée. Et de la prudence qui devrait guider l'investisseur.
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