Ça niaise dans le dossier du pétrole de l'Ile d'Anticosti et, même si personne ne l'a encore dit publiquement, on est sur le point de devoir reporter les premiers travaux qui devaient avoir lieu cet été à l'île d'Anticosti.
Deux choses menacent la réalisation des travaux préliminaires.
Dans un premier temps, le nouveau gouvernement jongle avec l'idée de faire un grand pas arrière et soumettre le projet à une vaste évaluation stratégique, qui engloberait plusieurs autres questions, dont celle du gaz de schiste des Basses-Terres du Saint-Laurent et celle de Old Harry. Pareille décision viendrait assurément reporter les travaux de 2014, et on peut même se demander si une réalisation en 2015 ne serait pas trop optimiste.
L'autre menace vient d'un recours judiciaire du Centre québécois du droit de l'environnement (CQDE), qui n'a pas fait beaucoup de bruit médiatique jusqu'à maintenant, mais est probablement sur le point de tout arrêter pour un temps.
SUIVRE SUR TWITTER: F_POULIOT
Le CQDE demande à la Cour supérieure de soumettre les 15 à 18 sondages stratigraphiques prévus cet été à un processus de consultation publique prévu à la Loi sur la qualité de l'environnement. Le gouvernement croyait initialement qu'il n'avait pas de certificat d'autorisation à émettre pour de tels sondages (et conséquemment aucune audience publique à tenir préalablement), mais la Cour d'appel vient de lui dire que ce n'est pas à lui de décider. Elle retourne le dossier à la Cour supérieure et lui demande de statuer si, selon la loi, les travaux stratigraphiques sont assujettis ou non à un certificat d'autorisation. S'ils le sont, des audiences publiques seront automatiquement nécessaires.
On voit d'ici les pages du calendrier tourner. Dans un atelier de formation, des avocats de Fasken Martineau estimaient en début de semaine qu'un processus d'autorisation comportant des audiences pourrait s'étirer sur 3 mois et peut-être plus. Ajoutons le temps pour le déroulement de la procédure judiciaire actuelle, celui pour rendre jugement, et celui d'un éventuel appel de la décision à la Cour d'appel, et l'on est assurément bien au-delà de l'été 2014.
Qui a raison?
Qui a raison?
Il est encore trop tôt pour trancher entre les pro-pétrole et les environnementalistes. Mais, côté tergiversation, on commence à s'approcher du ridicule.
Ces sondages stratigraphiques et les travaux de fracturation qui doivent avoir lieu en 2015 ont pour but de déterminer le type et la quantité de pétrole sur l'île, de même que son potentiel économique. Tout en jaugeant le risque environnemental.
Il ne s'agit pas de dire que le CQDE est mal fondé en droit lorsqu'il réclame un processus d'audience. Il y a une zone grise juridique. En pratique cependant, la démarche ne vise qu'à faire traîner en longueur. Il faut en effet un certificat d'autorisation pour les travaux de fracturation prévus en 2015, ce qui veut dire qu'un processus d'audience publique est garanti pour ce moment. Pour cet été, nous ne sommes qu'à l'étape des sondages, qui n'ont pas le même impact environnemental. Le recours a pour seul but d'amener pour l'île d'Anticosti un processus où il faudrait faire deux consultations publiques environnementales.
Le gouvernement pendant ce temps envoie de curieux signaux sur le respect des ententes signées. C'est une chose de voir les travaux bloqués par un tiers qui utilise la voie judiciaire (ce risque est présent pour tout projet), c'en est une tout autre de renier une entente partenariale. La parole du gouvernement donnée à Pétrolia, Corridor et Maurel & Prom devrait être sacrée. Dans le cas actuel, Québec n'a pas promis qu'il donnerait les autorisations nécessaires à l'exploitation, mais il a assurément promis de ne pas ajouter d'embûches et de délais à ce qui était prévu pour 2014.
S'il tient à intégrer le pétrole d'Anticosti dans une évaluation stratégique globale, le gouvernement devrait à tout le moins rapidement indiqué que l'exercice ne suspend pas l'entente sur les travaux d'exploration qu'il a conclue. Il n'y aurait rien d'antinomique dans cela, puisque l'entente sert aussi à mener des vérifications environnementales. Le gouvernement devrait également songé à clarifier dès maintenant la réglementation, de manière à éviter une double consultation publique sur Anticosti.
S'il est vrai qu'il faut avancer avec prudence dans ce dossier, il ne faut pas non plus tomber dans la procrastination et le non-respect des engagements.
SUIVRE SUR TWITTER: F_POULIOT