C'est Goldcorp qui a dû avoir toute une surprise. Après que sa direction eut laissé entendre qu'Osisko ne trouvait pas d'options à son offre, elle s'est réveillée mercredi avec un tapis en train de lui glisser sous les pieds. Yamana, la Caisse et le Fonds de pension fédéral font équipe avec Osisko pour lui permettre de rester en vie et indépendante. Le sauvetage est-il pour autant assuré?
Le montage financier qui rend Yamana et Osisko partenaires dans tous les actifs miniers de d'Osisko (le principal étant la mine Malartic) est d'une grande complexité.
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Essentiellement, Osisko transporte tous ses actifs dans une ou des sociétés en commandites où elle conservera une participation de 50%. Yamana détiendra également un intérêt de 50%. L'opération demande à la Caisse de dépôt et à l'Office d'investissement du RPC (l'équivalent fédéral du Régime des rentes) d'importants financements, qui permettent au final à Osisko de conserver son siège social à Montréal, et sa pleine autonomie pour le développement de nouveaux projets dans l'avenir.
La beauté de l'affaire est que la torontoise Yamana n'a plus d'exploitation minière au Canada depuis quelques années et qu'Osisko cherchait justement depuis longtemps à tisser des liens avec d'autres minières pour pouvoir être exploitante de projets au Québec et au Canada. C'est en poursuivant cet objectif qu'elle en était venue, il y a quelques années, à entreprendre des discussions avec Goldcorp. Osisko, a-t-on appris récemment, souhaitait notamment prendre part au gisement Éléonore. Avec Yamana, elle vient de trouver une partenaire idéale.
L'affaire est-elle dans le sac?
L'affaire est-elle dans le sac?
S'il faut saluer l'ingéniosité du partenariat et du montage financier, il reste maintenant à voir ce que sera la réplique de Goldcorp. Et si la proposition Yamana-Osisko pourra demeurer plus alléchante pour les actionnaires d'Osisko.
La proposition de Golcorp est actuellement à 6,20$ (avec une composante 2,26$ en argent comptant, 3,95$ en actions de Goldcorp).
La proposition de Yamana-Osisko est autour de 7,60$.
C'est à première vue une prime de 22% sur l'offre de Goldcorp.
Il y a cependant une pièce mobile de plus dans l'offre de Yamana-Osisko, qui pourrait devenir embêtante pour les actionnaires d'Osisko.
Le 7,60$ de l'offre se compose des pièces suivantes:
-2,19$ en argent comptant. La somme provient de Yamana et d'emprunts d'Osisko qui sont redistribués aux actionnaires. Cette composante est sûre. Comme on dit dans le milieu, cash is king.
-2,06$ en actions de Yamana. Cette composante est de nature à soulever quelques interrogations. Les actions de Yamana peuvent reculer dans l'avenir plus que celles de Goldcorp. Ça ne devrait cependant pas être une considération si pesante pour les actionnaires d'Osisko. Notre univers de recherche fait voir que 14 analystes sont à "achat" sur Yamana, 4 à "conserver" et 3 à "vendre". Pour Goldcorp, 13 sont à "achat", 7 à "conserver", et 1 à "vendre". Du côté des cibles, la cible moyenne est pour une progression de 37,5% du titre de Yamana dans les prochains mois et de 21% pour Goldcorp. Avantage Yamana dans les deux cas. C'est pour cela que l'on dit que cette composante ne devrait pas trop peser dans le choix des investisseurs. Elle sera vraisemblablement un facteur neutre.
-3,35$ en nouvelles actions d'Osisko. C'est ici que ça se corse pour Yamana-Osisko. Ces nouvelles actions d'Osisko vaudront-elles vraiment 3,35$ lorsqu'elles arriveront sur le marché? Les deux directions ont longuement plaidé que oui, mercredi, et que leur valeur devrait même être plus élevée. Simplement parce que cette valeur (3,35$) est établie en fonction de la rentabilité actuelle de la mine Malartic, et que la rentabilité de la mine doit augmenter dans l'avenir. Le marché escomptera cette amélioration.
C'est possible. En attendant, il faut cependant aussi constater que cette valeur de 3,35$ est établie en fonction du prix que paie Yamana pour acheter les actifs d'Osisko. Or, Yamana surenchérit sur le prix offert par Goldcorp. La valeur est donc établie en fonction d'un prix d'OPA, et il n'est pas sûr que le marché soit prêt à continuer à reconnaître un tel prix après la transaction. D'ordinaire, un titre se négocie à un prix plus faible qu'un prix d'OPA. Certains diront que le prix pourrait tenir puisque Yamana est prête à le payer. Encore ici, il y a cependant un "mais". Yamana le paie parce qu'un recul pourra éventuellement être compensé par de vieilles pertes fiscales canadiennes qu'elle pourra désormais utiliser. Osisko n'a pas cet avantage.
Conclusion?
Au final, le 22% d'écart entre l'offre de Goldcorp et celle de Yamana-Osisko est actuellement suffisant pour faire de la dernière la plus attrayante dans l'esprit des actionnaires. Mais il ne faudrait pas nécessairement une super contre-offre de Goldcorp pour semer le doute.
Ceux qui espèrent qu'Osisko reste québécoise ne devraient pas éteindre trop vite leur lampion.
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