BLOGUE. Dommage que la récompense n'existe plus, car Yves Michaud aurait bien mérité un MetroStar, mardi, à l'assemblée annuelle de Metro, pour sa performance dans le rôle de l'activiste dérangeant. De loin le meilleur spectacle corporatif de l'année. Et, sur la question de franciser l'enseigne au Québec, on lui donnerait même raison.
L'assemblée était à peine entamée de quelques minutes, qu'il était au micro. Le président du conseil, Pierre H. Lessard, venait de demander un "secondeur" pour entériner la proposition sur la nomination des nouveaux administrateurs.
-Je ne veux pas être tatillon, monsieur le président, mais on ne "seconde" pas. On "appuie" une résolution. "Seconder" est un anglicisme!, est intervenu monsieur Michaud.
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Il a ensuite tenté de faire ajouter une administratrice au conseil, en déplorant la faible présence de femmes (deux). Choux blanc, la personne qu'il proposait n'étant pas présente dans la salle pour accepter sa mise en candidature, la proposition n'a pas eu de suite.
Battu sur sa première démarche, Yves Michaud allait revenir quelques minutes plus tard en proposant la nomination d'un deuxième vérificateur financier. "Ed quis custodiet ipsos custodes (et qui surveille le surveillant)?" s'est-il interrogé en latin.
Autre revers.
Nullement désarmé, l'orateur s'est alors rabattu sur une nouvelle résolution de la société l'autorisant à tenir son assemblée annuelle à l'extérieur du Québec. Sans s'objecter à ce que l'assemblée puisse être tenue à l'extérieur de la province, il souhaitait ajouter à la résolution "à condition que le nombre des actionnaires le justifie".
Monsieur Lessard a expliqué qu'il n'était pas dans l'intention de Metro de tenir son assemblée hors Québec, mais que la direction souhaitait amender ses statuts de manière à ce qu'ils soient conformes à la nouvelle loi sur les sociétés par action du Québec.
Nouvel échec. L'amendement a été battu par un vote à main levée, non sans jeter des doutes dans l'esprit du tribun sur la légalité de l'opération et valoir à monsieur Lessard cet avertissement :"Je vous mets en garde, monsieur le président, vous vous engagez sur un sentier parsemé de fourches caudines".
Cent fois sur le métier, remet ton travail. Monsieur Michaud est encore une fois revenu à l'attaque en attirant cette fois l'attention de la direction sur l'annexe A de la circulaire où il était mentionné que les actions de catégorie A seraient "redésignées" en actions B. "Pas français", a-t-il dit, en se demandant comment des juristes avaient pu commettre "la grave erreur" d'utiliser un mot qui n'existait pas.
-Quel serait le terme juste alors?, a tout bonnement demandé Pierre Lessard sourire en coin, ce qui lui a valu d'obtenir quelques suggestions.
Ça grogne
Si monsieur Lessard s'est somme toute montré bon prince face aux interventions de celui qui aura bientôt 82 ans, celles-ci n'ont pas jeté le sourire sur tous les visages.
Particulièrement lorsqu'il s'est amené au micro pour se plaindre du manque de lumière et de l'absence d'un lutrin, disant qu'il ne parvenait pas à lire ses documents en raison de l'aménagement bancal des lieux.
Un actionnaire a ouvertement manifesté son mécontentement.
-Mais quel est ce malotru!, s'est écrié Yves Michaud, en enjoignant le président à le rappeler à l'ordre.
Ce qui fut fait, alors qu'au même moment, comme par enchantement, la lumière augmentait d'intensité dans la salle.
Ce devait être le premier et le dernier gain de la journée de monsieur Michaud.
Là où il a perdu, mais aurait dû gagner
Sa plus importante défaite restait malheureusement à venir.
Il y a quelques jours, Yves Michaud a déposé une plainte à l'Office de la langue française dans laquelle il demande que Metro ajoute un accent aigu sur la seconde lettre de son appellation. Le terme "metro" n'existe qu'uniquement en anglais fait-il valoir.
La direction de Metro soutient quant à elle que l'appellation n'est ni française, ni anglaise, qu'elle est sa marque de commerce depuis toujours, et que, conséquemment, elle n'est pas en violation de la loi.
C'est ici que s'arrête la rigolade, et que l'on a plus de difficulté à suivre le raisonnement de Metro.
Il ne s'agit pas d'en faire tout un plat. Mais il est vrai que Metro est l'un des fleurons et un symbole de Québec inc. Où serait le mal à franciser son nom au Québec?
Il y aurait évidemment des coûts à tout cela, mais toutes les enseignes n'ont pas à être modifiées du jour au lendemain.
Les motifs historiques sont bien expliqués. Il suffirait de dire que l'on entend remplacer graduellement ses bannières dans le temps lorsque les occasions se présenteront, et ce afin de les rendre encore mieux adaptées au paysage linguistique québécois.
Ce serait en plus un bon coup de… "marketing".
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