BLOGUE. La Caisse de dépôt est placement du Québec n’est pas restée les bras croisés au cours de la dernière ronde d’assemblées annuelles aux États-Unis.
Un rapide tour du vote de ses procurations permet de voir qu’elle a fortement réprimandé Walmart, tout en ne se gênant pas pour secouer Google et Facebook.
Chez Wal-Mart, elle a voté contre ses trois principaux administrateurs : le chef de direction actuel Michael Duke, l’ancien chef de direction Lee Scott, et le président du conseil, Rob Walton, fils du défunt fondateur Sam Walton.
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La charge a été nettement moindre chez Google. La Caisse ne s’en est pas moins abstenue de voter pour le président exécutif de Google, Erick Schmidt. Et elle a ensuite voté en faveur d’une proposition d’actionnaires enlevant le droit de vote multiple aux actions des fondateurs Larry Page et Segey Brin.
Enfin, la Caisse s’est aussi abstenue de voter à l’élection comme administrateur du numéro un de Facebook, Mark Zuckerberg. Puis elle a voté contre le programme de rémunération de l’entreprise.
Voyons voir chacun des cas, avec un commentaire personnel.
Wal-Mart : risque mal surveillé
C’est toute une réprimande que l’institution sert à Wal-Mart, en votant contre ses trois principaux dirigeants, et un autre administrateur, Christopher William, qui est, lui, au comité de vérification.
Appelée à préciser son action, l’institution nous a indiqué que l’entreprise fait face à des allégations graves de corruption. Il s’agit en fait des fameux pots-de-vin de 24 M$ US qui auraient été versés pour gagner des parts de marché au Mexique.
À l’époque des malversations, Michael Duke était à la tête de Walmart International, Lee Scott était le grand patron de Walmart, et Rob Walton était déjà président du conseil.
La Caisse dit avoir voté contre chacun parce qu’aucun « n’a assuré une surveillance adéquate des risques ».
Commentaire. La position de la Caisse était autour de 121 M$ US dans Walmart au 31 mars 2013 (selon Edgar). C’est une goutte dans l’océan. Chacun des administrateurs a été reconduit dans ses fonctions, avec un taux de désapprobation qui s’est en moyenne situé à 12%. Bravo quand même à la Caisse. Lors de l’éclatement des premiers scandales chez SNC Lavalin, elle avait été une des rares à poser publiquement des questions et à demander plus de transparence. Sa position chez Walmart témoigne de nouveau qu’elle n’a pas l’intention de cautionner le laxisme au plan éthique.
Google : une abstention technique, mais une surprise importante
Google: une abstention technique, mais une surprise importante
Chez Google, la Caisse dit s’être abstenue de voter sur la candidature d’Eric Schmidt parce qu’il n’a pas le statut d’indépendant et est président du conseil. En outre, ajoute-t-elle, le conseil n’a pas nommé un administrateur indépendant pour veiller au déroulement efficace de ses séances.
Commentaire. L’affaire n’est pas sans rappeler le vote controversé de la Caisse chez JP Morgan, concernant le rôle de Jamie Diamond comme président du conseil et chef de direction. Il y a quelques semaines, la Caisse s’était rabattue sur l’administrateur indépendant supervisant les travaux du conseil pour justifier son vote contre la séparation des pouvoirs. Quelques observations pourraient être faîtes ici, mais passons, il y a plus intéressant.
La Caisse vote en effet en faveur d’une proposition demandant un droit de vote unique. Ce qui revient à demander à Larry Page et Sergey Brin d’abandonner leurs multivotantes.
Interrogée sur comment elle concilie son vote avec ses positions inverses chez plusieurs sociétés québécoises, l’institution dit favoriser le droit de vote unique, mais ne pas s’objecter systématiquement aux actions à droit de vote multiple. Dans le cas d’entrepreneurs fondateurs ou de familles, elle juge que le droit de vote multiple pourra même être bénéfique aux actionnaires en ce que de tels investisseurs seront enclins à instaurer des contrôles serrés sur les investissements en capitaux, sur la gestion des opérations, et miseront généralement sur des stratégies de création de richesse à long terme.
Chaque situation est au cas par cas, dit la Caisse, en précisant s’attarder particulièrement à la transparence dont font preuve les sociétés.
Commentaire. La position peut sembler étonnante. Les fondateurs de Google sont les idoles de plusieurs parce que leur pensée est souvent tout aussi sociale que capitaliste. On les voit essayer nombre de projets à l’extérieur du cadre de leurs activités (l’automobile automatisée par exemple). Page et Brin sont à redéfinir le capitalisme et on est personnellement fort heureux qu’ils conservent leurs actions multivotantes. Sans elles, ils ne pourraient explorer ces horizons incertains, mais socialement bénéfiques. Il est cependant compréhensible que certains investisseurs aimeraient assister à une allocation de capital plus optimale.
La Caisse a 219 M$ US dans Google.
Facebook : la rémunération est mal balisée
Facebook: la rémunération est mal balisée
La participation de la Caisse dans Facebook est minimale. Elle parle de 7,4 M$ au 31 décembre. On voit 11 M$ US sur Edgar au 31 mars.
Première surprise : abstention à l’élection comme administrateur de Mark Zuckerberg.
Motif : Il n’y a pas de comité de candidatures chez Facebook. La Caisse s’attend à ce qu’un comité de candidatures établisse un profil des expériences et expertises souhaitées pour le conseil et adopte une procédure de sélection des candidats.
Deuxième surprise : la Caisse vote contre la politique de rémunération de Facebook.
Motif : Le régime incitatif à long terme repose sur le seul passage du temps. Il y a absence de critères de performance.
Commentaire. Totalement en accord avec la Caisse sur les deux positions.
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