L'industrie du papier est en déclin et il est impossible d'y faire de l'argent. Humm, Domtar est en hausse de 700 % sur trois ans et Fortress Paper, de 370 %. Perçues comme à l'agonie, certaines papetières ont en fait été de solides créatrices de richesse ces dernières années. Ces titres peuvent-ils encore progresser ?
Un aveu : on a un peu maximalisé les rendements indiqués plus haut en allant chercher les creux de février 2009. Il n'en reste pas moins qu'une partie des progressions vient du fait que les sociétés les plus futées ne sont pas restées inactives et se sont dotées de plans d'avenir.
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Attardons-nous à quatre d'entre elles.
Cascades (CAS, 4,26 $)
Productrice d'emballages cartons et de tissus, Cascades a beaucoup souffert depuis 2010 de la flambée du prix du papier recyclé, principale matière première de ses produits (le vieux papier représente 76 % de ses volumes d'approvisionnement par rapport à 24 % pour la fibre végétale).
Le cours du papier recyclé a subi une correction, mais il est constamment un point d'interrogation.
Pour améliorer la rentabilité, le plan d'action est simple. Cascades ferme les usines déficitaires et centralise la production dans d'autres unités. Elle vend aussi les moins rentables et réinvestit l'argent dans de nouvelles, plus performantes. L'usine de carton d'emballage Greenpac (à Niagara Falls) est un exemple. Elle doit amorcer sa production en 2013 et sera l'une des plus importantes et des plus productives en Amérique du Nord.
Une difficulté toutefois : un taux d'endettement de 5,8 fois le bénéfice avant intérêts, impôts et amortissements (BAIIA). C'est élevé. L'objectif est de le ramener à 3 fois, mais, comme le fait remarquer la Financière Banque Nationale, la dette ralentira le plan d'action. La société doit éviter de se retrouver prise dans un revirement de secteur.
Verdict : moyen.
Domtar (UFS, 84,51 $)
La société diversifie ses activités. En 2007, 52 % des ventes venaient du papier de bureau. Ce n'est plus que 21 % aujourd'hui, alors que la pâte en flocons et les tissus occupent désormais une plus large place.
L'effort de diversification n'est en plus qu'à ses premiers pas. Domtar veut ajouter de 300 à 500 M$ à son BAIIA d'ici cinq ans en tablant sur de nouveaux débouchés. Un objectif ambitieux : le BAIIA de 2011 a été de 239 M$ US.
Les soins personnels sont un des créneaux visés. L'entreprise a acquis Attends Healthcare, un fournisseur de produits pour incontinence. Non seulement peut-elle maintenant bénéficier de la marge sur la vente des produits, mais elle pourra aussi éventuellement approvisionner Attends en pâte en flocons, matière première des couches. RBC Marchés des Capitaux note que le secteur des soins personnels croît de 6 à 8 % par année.
La dette est faible et l'entreprise vient encore d'augmenter son dividende.
Verdict : beaucoup d'analystes aiment, et on aime aussi, bien qu'il faille être prêt à accepter que des reculs cycliques surviendront en cours de route et sèmeront des doutes.
Le pari de la pâte dissolvante
C'est celui que font Fortress Paper (FTP, 24,56 $) et Tembec (TMB, 2,83 $), de façon fort différente toutefois. La pâte dissolvante traditionnelle entre dans la fabrication de la rayonne, un tissu spécial qui sert notamment à la confection d'espadrilles.
Le prix de la pâte a explosé au début de 2011, lorsque le cours du coton s'est envolé et que la rayonne est devenue un tissu moins cher. De 2 800 $ US la tonne métrique, il est redescendu depuis à un peu plus de 1 000 $ US.
Fortress a deux importants projets de production de pâte dissolvante : Thurso et Lebel-sur-Quévillon (LSQ). Thurso devrait atteindre sa capacité de production maximale à la fin du second trimestre. LSQ doit de son côté entrer en activité à la fin de 2013.
Beaucoup d'analystes sont optimistes et certains voient le titre doubler. On est cependant moins convaincu. Il y a un risque d'exécution dans la conversion. Et, surtout, le secteur est trop intéressant. RBC indique qu'il y a pour 3 millions de tonnes (Mt) de nouveaux projets de pâte dissolvante prévus sur l'horizon 2012-2014. Or, la capacité actuelle de l'industrie est de 4 Mt.
Pour ceux qui doutent, Tembec est peut-être une meilleure option. Elle fabrique une pâte dissolvante spécialisée, utilisée dans les filtres de cigarette, les écrans ACL, le dentifrice, etc. La fabrication de cette pâte demande des investissements beaucoup plus importants et une expertise supérieure. Les barrières à l'entrée sont nettement plus élevées.
Tembec a des projets d'expansion pour l'usine de Témiscaming, qui en produit. En attendant, elle se concentre sur la construction d'une usine de cogénération qui devrait entrer en service en 2014 et ajouter de 40 à 45 M$ à son BAIIA. Assez significatif sur le BAIIA de 60 M$ attendu par le marché en 2012 (septembre). Attention cependant, les résultats de Tembec sont souvent en dents de scie.
DANS LE DÉTAIL
Le titre sur cinq ans
DOMTAR (UFS ; 84,51 $)
Recommandation des analystes
Achat 4
Surperformance 2
Conserver 5
Sous-performance 2
Cible moyenne : 109,35 $ US
Le titre sur cinq ans
FORTRESS PAPER (FTP ; 24,56 $)
Recommandation des analystes
Achat 2
Surperformance 5
Conserver 0
Vendre 1
Cible moyenne : 42,00 $
Le titre sur cinq ans
TEMBEC (TMB ; 2,83 $)
Recommandation des analystes
Achat 1
Surperformance 3
Conserver 0
Sous-performance 1
Cible moyenne : 4,10 $
Sources : Thomson Reuters, Bloomberg
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