BLOGUE. Intéressant colloque que celui de Humaniterre, présenté lundi aux HEC. Probablement le meilleur des événements sur le sujet auxquels on ait assisté dernièrement.
Jusqu'où doit aller l'État? Voici quelques une des questions abordées et ce qu'on en pense.
Le Québec a-t-il vraiment besoin d'un Plan Nord pour développer son potentiel minier?
Au mois de mai, lorsque le projet a été lancé, le Nord comptait 11 projets miniers. Il en compte aujourd'hui une vingtaine.
Non, il ne s'agit pas de dire que le Plan est responsable de la venue de ces nouveaux projets. Le délai est trop court. Ils seraient tous venus quand même.
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Le nerf de la guerre dans l'industrie minière, comme dans toute autre, réside cependant dans le financement. Les capitaux cherchent les régions "hot". De voir Québec débloquer 500 M$ sur cinq ans pour des investissements, construire et améliorer des routes, est certainement indicateur d'un potentiel auquel on croit et susceptible d'amener plus de capitaux ici.
Le Québec minier n'a pas besoin du Plan Nord pour se développer, mais le plan permettra de pousser plus loin son développement.
Québec est-il trop généreux avec ses infrastructures?
Le fameux débat amplifié par Jacques Parizeau sur la construction des routes et la fourniture de l'électricité.
C'est un peu tôt pour dire.
Hydro-Québec a consenti de l'énergie au tarif L à ArcelorMittal pour son projet d'expansion du Mont-Wright et d'agrandissement d'usine de bouletage. Cet investissement est fort discutable et on voit mal comment il pourra être répété dans l'avenir. On vend actuellement la nouvelle électricité à moins cher qu'elle ne nous coûte à produire. C'est mal parti de ce côté.
Sur les investissements routiers cependant, c'est mieux. La construction de la route 167, qui mènera aux Monts Otish, coûtera par exemple 280 M$. Stornoway s'est engagée à rembourser 40 M$. Trois autres projets sont dans le secteur à qui l'on demandera plus cher (lors de l'octroi des permis). Ce n'est pas loin de 200 M$ éventuels d'apports privés. La route ouvre le territoire et il y a en plus des retombées économiques à l'autre bout, ce que l'on n'a pas nécessairement avec toutes les routes du Québec.
On verra la suite.
Québec devrait-il demander plus en redevances minières?
On pensait que le débat était clos avec l'adoption du nouveau régime de redevances. Mais, à l'évidence, pour plusieurs, le Québec ne demande pas encore assez.
La province est actuellement l'une des juridictions qui demande le plus au Canada. Difficile d'avoir un régime minier qui demande plus que les autres, alors que l'on appelle l'industrie dans des territoires aux teneurs inconnues et aux coûts assurément plus élevés.
Laissons l'industrie s'installer et une masse critique se bâtir. Il sera toujours temps d'augmenter les droits miniers plus tard.
Québec doit-il investir plus dans les projets miniers?
Québec doit-il investir plus dans les projets miniers?
Un argument qui revient avec régularité et qui fait peur. Lorsque tous sont convaincus de faire de l'argent à l'infini, c'est que l'on est généralement en bulle.
Investissement Québec prévoit investir 500 M$ sur cinq ans, en prises de participation et prêts. Il vaudrait mieux ne pas aller au-delà. Petit rappel: une étude de la Deutsche Bank prévoit que la Chine atteindra un plateau de consommation du minerai de fer en 2017 et que les prix seront alors passés de 130$ US la tonne à 80$ US la tonne. Des mines devront fermer dans les années suivantes alors que trop de projets auront été construits.
Nos teneurs en fer, a-t-on appris lundi, sont deux fois moindres que celles de l'Australie et le minerai est situé nettement plus loin.
Prudence…
Québec doit-il demander de la deuxième transformation?
Une proposition entendue à quelques reprises en matinée. Ne permettre l'exploitation d'une mine que si la minière prend des engagements de deuxième transformation.
C'est une demande qui paraît hasardeuse et n'est pas facile d'application. Les plus petites sociétés ont souvent de la difficulté à financer un projet, alors en demander deux…
Pour les plus grosses, ce n'est pas évident non plus. S'il y a de la capacité excédentaire dans la transformation du minerai de fer en boulettes, ajouter une autre usine de production ne va pas diminuer cette capacité excédentaire, mais l'augmenter. Ce qui veut dire une non-rentabilité assurée.
Pareille exigence amènerait une nette augmentation des capitaux à investir et encore plus d'incertitude quant aux rendements à attendre.
Trop exigeant.
Hydro-Québec et les contribuables se font-ils avoir?
C'est le talon d'Achille du Plan Nord. Et pourtant les investissements en électricité représentent la part du lion du projet (47 des 80 G$).
Plusieurs se plaignent qu'il est difficile de voir quels sont les besoins anticipés par Hydro-Québec pour l'avenir et si on n'est pas en train de projeter construire des éléphants blancs.
Un intervenant laissait entendre que la plupart des projets de barrages ne seraient pas reliés au réseau actuel, ce qui laisse croire qu'ils serviraient exclusivement aux activités minières. Un pari potentiellement très dangereux si les marchés des métaux tombent en cours de route. Mais peut-être moins risqué que celui de raccorder les barrages au réseau et d'être obligé de vendre à perte parce que notre électricité du nord ne serait pas concurrentielle avec la filière gazière.
Il est temps qu'Hydro et le gouvernement soient plus clairs sur comment ils voient le potentiel hydro-électrique du nord se matérialiser.