BLOGUE. Que disions-nous il y a quelques jours? L'avenir du nouveau cabinet Marois pourrait bien se jouer sur la question de la hausse d'impôt pour les plus riches.
Les derniers développements semblent vouloir renforcer l'hypothèse. On aurait cru que le débat s'amènerait un peu plus tard, mais un article du Soleil soulève bien des réactions. Le journal indique que le gouvernement veut rendre le nouvel impôt pour les riches rétroactif pour 2012 afin de combler l'abolition de la taxe santé.
Il y a un peu de flou dans l'histoire et quelque chose nous dit que le projet de rétroactivité ne concerne pas seulement les riches.
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Le montant de 845 M$ est avancé pour chiffrer le coût de l'abolition de la taxe santé. Or, le budget indique plutôt que la taxe santé doit rapporter 1,005 G$ en 2012-2013 (31 mars). C'est 160 M$ de plus.
Le programme du Parti québécois parle pendant ce temps de revenus de 610 M$ associés à la hausse de l'impôt sur les riches.
On le voit tout de suite, la hausse de l'impôt pour ceux qui gagnent plus de 130 000$ par année n'est pas suffisante pour combler l'abolition de la taxe santé.
Pour y parvenir, il faut aussi réduire les crédits d'impôt pour dividendes (140 M$) et hausser de 50% à 75% l'imposition des gains en capital (255 M$).
Il apparaît donc qu'il n'y a pas que les riches qui sont à risque d'imposition rétroactive sur leur salaire, mais que les investisseurs le sont aussi sur leurs gains en capital.
Justifiable ou pas, la rétroactivité?
Avec l'ancien ministre des finances Raymond Bachand en tête, plusieurs ont vivement critiqué l'approche envisagée par le gouvernement. Ils ont raison.
Lorsqu'il s'apprête à augmenter significativement la contribution fiscale d'une cohorte de contribuables, l'État devrait prévenir quelque temps à l'avance. Et ne certainement pas y aller de mesures rétroactives.
Tombera, ne tombera pas le gouvernement?
Tombera, ne tombera pas le gouvernement?
Quelque chose nous dit que, sans reporter à l'an prochain l'abolition de la taxe santé, le gouvernement Marois reculera sur cette rétroactivité.
Oui, mais, s'il fait cela, on ratera assurément les cibles budgétaires!, dîtes-vous.
Pas nécessairement. Le PQ pourrait abolir la taxe santé pour les mois à venir, mais la maintenir pour les mois écoulés (75% du 200$). Pour combler la différence, il n'aurait qu'à hausser l'impôt des riches d'un pourcentage moindre que ce qu'il prévoyait à son programme électoral (au lieu de grimper de 24 à 28% on grimpe disons à 25,5% jusqu'au 31 décembre).
C'est une proposition qu'il ne serait pas surprenant de voir arriver prochainement.
Et qui devrait changer la dynamique des échanges.
Il est difficile de justifier le renversement d'un gouvernement sur une question de rétroactivité, surtout lorsque celle-ci n'existe plus réellement. À ce moment, il deviendra évident que l'élément pertinent du vote à prendre pour permettre aux mesures d'être implantées ne sera pas sur la rétroactivité, mais sur les hausses en elles-mêmes.
Est-il mieux de demander 200$ par année à tous (sauf les plus démunis) pour payer pour la hausse des coûts de santé, ou faut-il demander uniquement aux riches de contribuer davantage?
La réponse n'est ni au PQ, ni chez les libéraux: il vaudrait mieux demander à chacun de contribuer en fonction de ses moyens.
Les 140 000 salariés touchant plus de 130 000$ représentent moins que 2,5% de la population, mais fournissent déjà le tiers de l'impôt des particuliers. On est personnellement assez inconfortable de demander uniquement aux plus fortunés de répondre aux besoins supplémentaires du système. Le système est pour tous et tous doivent contribuer à son maintien.
Il sera intéressant de voir comment évoluera la situation et si elle forcera le gouvernement à l'immobilisme ou à la chute.
Les libéraux n'ont pas d'avantage à faire tomber le gouvernement sur la position qu'ils défendent: elle ne rapporterait pas en suffrage électoral.
Les caquistes sont aux prises avec une mesure qui prévoit la hausse de l'imposition des gains en capitaux, et une redistribution aux familles moyennes. Ce n'est pas une approche égalitaire, mais ils pourraient plaider qu'ils en demandent beaucoup moins riches et que l'approche du PQ est exagérée. Côté électoral, contrairement aux libéraux, la position aurait du suffrage.
La bouilloire a commencé à siffler et elle devrait siffler encore plus fort dans les prochaines semaines. Il reste à voir jusqu'où chacun est prêt à la laisser sur le feu.
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