La Bourse de Londres n'obtient finalement pas les suffrages nécessaires pour procéder à l'acquisition de celles de Toronto et Montréal. Assurément dans le sac pour Maple? On ne parierait pas la maison là-dessus.
C'est une importante victoire qu'a remporté mercredi le groupe Maple. Et ce même si des agences comme ISS et Glass Lewis avaient recommandé de favoriser Londres.
Dans le sac pour Maple?
Humm, on ne miserait pas trop gros là-dessus. Quelque chose nous dit que Londres n'espère effectuer qu'une retraite temporaire, alors qu'entre maintenant en scène les véritables décideurs de l'affaire: le Bureau de la concurrence et sa commissaire, Melanie L. Aitken.
C'est une chose pour Maple de faire une offre plus importante que sa concurrente, il faut cependant ensuite qu'elle soit capable de satisfaire les pourvoyeurs de fonds (les 13 institutions canadiennes) en leur procurant du rendement. Des projections de rentabilité leur ont sûrement été livrées, il reste à voir si le Bureau donnera un feu vert à leur atteinte.
On a beau tourner le projet dans tous les sens, il ressort que la majeure partie de la création de valeur promise repose sur deux axes:
1-la fusion du concurrent Alpha avec la Bourse de Toronto pour recréer un joueur ultra dominant sur le marché des actions canadiennes;
2- la fusion de CDS, la chambre de compensation pour les actions et obligations (détenue par les banques) avec la chambre de compensation de la Bourse de Montréal pour y créer une super chambre de produits traditionnels (actions, obligations) et dérivés.
Dans chaque cas, la création de valeur proviendra dans un premier temps des économies de coûts qui pourront être faîtes en n'opérant qu'une entité plutôt que deux (un seul système informatique plutôt que deux, des employés de moins, etc.).
Dans un deuxième temps (et encore une fois dans les deux cas), la création de valeur devrait cependant aussi provenir de hausses de prix plus faciles à implanter en raison des positions dominantes.
La situation
C'est de ce deuxième axe que provient le problème. Si le Bureau de la concurrence trouve que la situation est trop propice à l'abus sur les prix et n'autorise pas l'une ou l'autre des fusions, le projet est mort.
La situation
C'est de ce deuxième axe que provient le problème. Si le Bureau de la concurrence trouve que la situation est trop propice à l'abus sur les prix et n'autorise pas l'une ou l'autre des fusions, le projet est mort.
La fusion d'Alpha avec la Bourse de Toronto est particulièrement préoccupante à ce chapitre. Maple a beau dire qu'il y a d'autres joueurs et qu'une grande partie du marché glisse sur les bourses américaines avec un nombre croissant d'inscriptions transfrontalières, il reste que le risque de prix haussier est élevé. CI Financial, Raymond James, Haywood Securities et quelques autres ne se sont pas prononcées pour rien en faveur de Londres. Ces firmes redoutent un comportement abusif.
C'est un peu différent pour la fusion de CDS avec la Bourse de Montréal.
Il y a un risque quant aux prix demandés pour la compensation, CDS passant d'une situation sans but lucratif à une situation à but lucratif. Un risque d'autant plus présent que le président du groupe TMX nous confiait mercredi avoir déjà discuté à quelques reprises de l'achat de CDS dans le passé, mais s'être heurté à un refus de celle-ci. Les banques, qui, rappelons-le, sont en fait les principales actionnaires de CDS, ont-elles à l'époque refusé parce qu'elles redoutaient qu'il leur en coûte après coup très cher en coûts d'utilisation?
Un élément important plaide cependant en faveur de cette fusion.
Un gros débat a présentement cours sur l'endroit où devraient se négocier les swaps de taux d'intérêt des institutions financières canadiennes, ces produits hors cote qui, selon les ententes du G20, devront bientôt passer par une chambre de compensation.
Les plus grosses institutions favorisent apparemment des chambres de compensation étrangères qu'elles utilisent déjà alors que les plus petites, comme la Nationale et Desjardins, favorisent une solution canadienne. C'est un énorme marché, sur lequel la Banque du Canada aimerait bien conserver son influence. Il faudra de l'échelle pour l'obtenir, et ce n'est pas en demeurant fragmenté que les chances augmenteront.
Il sera donc intéressant, pour cette seconde fusion, de voir si le Bureau acceptera d'adopter une grille d'analyse qui ne tienne pas uniquement compte d'une approche consommateur.
Un mauvais synchronisme pour Maple
Un mauvais synchronisme pour Maple
Le synchronisme n'est en outre pas idéal pour Maple. La transaction survient alors que le Bureau de la concurrence semble, ces derniers temps, avoir décidé d'intervenir avec plus de force dans différents secteurs.
On vient de le voir intervenir dans l'entente entre Air Canada et United Continental. Il a récemment causé beaucoup de remous dans l'industrie du courtage immobilier et celle des cartes de crédit. Sans compter son intervention dans le cartel de l'essence.
Les dents du Bureau semblent s'être aiguisée avec l'arrivée de sa nouvelle commissaire, Melanie Aitken, en 2009. Avocate, et ancienne du contentieux de Davies Ward Phillips & Vineberg, elle est réputée ne pas hésiter à confronter les prétentions de plusieurs industries.
Elle a maintenant l'avenir du Montréal financier entre ses mains.