Depuis le temps que le scénario était évoqué, le voici maintenant qui se matérialise. Target entre au Canada, alors que Zellers en sort. Qui gagne, qui perd?
La nouvelle de la cession des baux des magasins Zellers n'est pas surprenante outre-mesure. Depuis quelques années déjà, le scénario de la vente de Zellers à Target était évoqué par plusieurs observateurs.
Les choses se passent cependant un peu différemment que ce qui était anticipé, alors que c'est plutôt les baux commerciaux qu'achète Target. Elle en prend 220, et, selon ce qu'on comprend, en utilisera entre 100 et 150 en 2013-14 et en cèdera un certain nombre à d'autres détaillants. Ce qui devrait lui permettre de refinancer en partie ses engagements locatifs et son plan de rénovation de 1 G$.
Qui gagne?
À première vue, Richard Baker, le propriétaire de Hudson Bay et Zellers. Selon les chiffres du Globe and Mail (que l'on n'a pas revalidé), il avait payé le tout 1,1 G$ en 2008 pour racheter l'ensemble. Il cède maintenant les baux de location de Zellers pour 1,8 G$.
Aussi, dans une certaine mesure, les propriétaires de centres commerciaux. Target est un redoutable exploitant aux États-Unis, qui, avec son crédo "cheap is chic" devrait amener plus de trafic dans les établissements. Financière Banque Nationale voit notamment positivement la transaction pour Rio Can, Calloway Reit, Primaris, Homburg Canada et First Capital Reality.
Qui perd?
Qui perd?
Évidemment Walmart qui devrait maintenant faire face au Canada à un détaillant avec un meilleur éventail de produits et beaucoup plus de pouvoir d'achat que Zellers. Target c'est presque 1800 établissements aux États-Unis.
Dans notre esprit, celui qui pourrait perdre le plus est cependant Sears Canada, dont les ventes ont reculé de 8,2% au dernier trimestre et qui donne l'impression d'avoir perdu toute initiative stratégique. Côté vêtements notamment, Target travaille avec des grands couturiers comme Jean-Paul Gauthier pour offrir des produits signés, à des prix qui collent cependant à son crédo ("cheap is chic"). Il faudra prochainement un important coup de barre chez Sears Canada, avec une stratégie qui ne focalise plus uniquement sur le "cost cutting" et pas mal de réinvestissements si l'on veut éviter que la descente ne se poursuive.
Si on était Simons on se sentirait aussi quelque peu interpelé aujourd'hui. Target pourrait en effet venir gruger dans la strate la plus économe de sa clientèle. Au même moment, la transaction menace aussi davantage la strate plus haute-gamme de cette clientèle. Hudson Bay se retrouve en effet maintenant sans canard boiteux. Elle pourra focaliser sur son actif phare: La Baie. Elle envisage d'ailleurs de revenir en bourse, ce qui forcera l'élaboration d'un plan d'action plutôt que le maintien du statu quo.
À plus long terme, Metro, Loblaw et IGA pourraient aussi ne pas aimer le développement. Aux États-Unis, Target est en train de développer PFresh dans 350 de ses établissements (20% de son réseau). Le programme ajoute des items périssables comme de la viande et de la boulangerie à son offre d'épicerie. Si Target draine plus d'achalandage dans ses établissements que Zellers ne le faisait, il risque d'y avoir un peu de volume en moins chez les épiciers. Et l'on n'a pas encore parlé, de par l'échelle du détaillant, du risque de concurrence accrue sur les prix.