François Legault et Charles Sirois veulent bâtir une économie québécoise de propriétaires et non de succursales, disent-ils dans le plan économique qu'ils viennent de déposer. D'accord? Pas d'accord?
Il y a de bonnes idées dans le plan présenté mercredi par la Coalition pour l'avenir du Québec. Certaines peu développées, mais qui gagneraient à l'être davantage, comme ces programmes d'éveil à l'entreprenariat et ces programmes entreprenariat-études.
Il y a cependant aussi de moins bonnes suggestions.
Le plan repose sur trois axes et comporte une dizaine de mesures. Voici chacune, avec notre position.
AXE 1: PROPRIÉTAIRES DE NOTRE ÉCONOMIE
Mesure 1: Créer un fonds de 5 G$ financé par la Caisse de dépôt et par un appel à l'épargne, pour prendre des participations minoritaires dans les projets d'exploitation de nos ressources naturelles.
Position: contre.
Le Fonds des Ressources naturelles du Québec serait financé par la Caisse et par un appel à l'épargne publique. Les proportions ne sont pas définies.
L'idée est d'aller chercher plus que des redevances et de retirer 50 à 60% des bénéfices totaux en s'engageant dans la propriété des projets.
Il manque trop de détails. Commettre une enveloppe de 5 G$ apparaît audacieux. Sur quel horizon de temps? Souvenons-nous des années 2000, lorsqu'on avait demandé à la SGF d'investir 2 G$ sur cinq ans dans son créneau d'intervention. Les lendemains avaient été catastrophiques.
Une trop grosse enveloppe sur un trop petit ensemble (le Québec) nous force à choisir de moins bonnes sociétés. Qui plus est, le secteur des ressources est cyclique. Il est possible que dans trois ans un fonds de 5G $ lancé aujourd'hui en valle 10G$, mais personne ne peut non plus exclure qu'il ne valle alors que 3-3,5 G$.
Il faut laisser la Caisse libre de ses investissements et ses pondérations.
Mesure 2: Accroître les investissements de la Caisse de dépôt au Québec
Position: contre.
On est bien d'accord que les positions de la Caisse au Québec devraient être plus importantes. Mais on doit encore une fois la laisser libre de ses pondérations. S'il y a de l'argent à faire avec un risque adapté à celui recherché par l'institution, elle viendra par elle-même.
La Coalition semble aussi suggérer que la Caisse soit utilisée pour maintenir les sièges sociaux ici. Dans des situations d'OPA hostiles, c'est trop lui demander et c'est placer son rendement à risque. Si c'est ce que l'on veut, il faudrait penser à des solutions législatives plutôt qu'à faire porter les risques sur les pensionnés de l'État.
Mesure 3: Favoriser les regroupements des terres agricoles afin de conserver leur propriété au Québec
Position: favorable
Afin de retenir nos jeunes agriculteurs et nous assurer que nos terres demeurent notre propriété, il faut inciter les institutions financières à créer des mutuelles ou des fiducies régionales à propriété québécoise. Elles pourraient acheter les terres, les financer et les louer à long terme.
On n'est pas très sûr que la mesure permettrait de retenir nos jeunes agriculteurs, mais il est effectivement préférable que nos capacités de production ne soient pas contrôlées par l'étranger. Si l'incitation ne coûte rien à l'État, il est difficile d'être contre.
Mesure 4: Soutenir les transferts d'entreprise aux générations suivantes ou aux employés
Position: contre.
Mesure 4: Soutenir les transferts d'entreprise aux générations suivantes ou aux employés
Position: contre.
Il s'agit d'instaurer des mesures fiscales afin de facilité la passation d'une entreprise à la famille, à un employé ou à un proche résidant au Québec. Le but est toujours de demeurer maître chez nous dans un contexte où 30% des propriétaires se retireront d'ici 2018 soit près de deux fois plus que le taux d'entrée de nouveaux entrepreneurs (16,5%).
Une exemption fiscale de 1,5 M$ viendrait remplacer celle de 750 000$ pour la vente entre personne non liées. Contrairement à la situation actuelle, les personnes liées y seraient admissibles.
C'est une mesure qui coûterait 385 M$ annuellement au trésor. Dans le contexte budgétaire actuel, elle est trop onéreuse.
Mesure 5: Encourager les Québécois à investir à long terme dans des actions d'entreprises installées au Québec.
Position: contre.
Afin de stabiliser l'actionnariat des entreprises québécoises, la coalition propose deux choses:
1-que les entreprises à charte québécoise offrent des actions à droit de vote multiple aux actionnaires qui détiennent leurs actions plus de 12 ou 24 mois;
2-examiner la possibilité d'augmenter à 75% l'exonération sur le gain en capital si les titres de ces sociétés ont été conservés six ans et à 100% si ils ont été conservés 12 ans.
Sur le point 1. À terme l'allocation de droits de vote multiple risque d'ébranler le contrôle de certaines entreprises québécoises. Et à peu près tous les actionnaires que l'on connaît (particuliers et institutionnels) ne votent de toute façon jamais pour des considérations sociales et toujours pour leur poche. Leur donner plus de contrôle ne permettrait pas d'atteindre le but recherché.
Sur le point 2. Les finances publiques ne permettent pas l'instauration de nouveaux crédits d'impôt.
AXE 2: ENCOURAGER LA CRÉATION DE VALEUR
Mesure 6: Augmenter les crédits d'impôts aux entreprises qui investissent en technologie
Position: favorable.
Il s'agit de revoir les enveloppes de crédit d'impôt aux entreprises en se livrant à une évaluation économique rigoureuse et d'utiliser les économies pour bonifier les crédits des entreprises qui investissent en technologie.
D'accord pour la révision, et la technologie permet normalement de gagner en productivité, ce dont on a besoin. Pas de coûts supplémentaires. C'est parfait.
Mesure 7: Convenir avec les fonds fiscalisés (FTQ, CSN et Desjardins) d'ajouter une nouvelle mission concernant la commercialisation de produits québécois à l'étranger.
Position: favorable.
Mesure 7: Convenir avec les fonds fiscalisés (FTQ, CSN et Desjardins) d'ajouter une nouvelle mission concernant la commercialisation de produits québécois à l'étranger.
Position: favorable.
C'est en vendant dans les autres marchés que l'on crée de la richesse ici et que l'on se bâtit des sièges sociaux. Plus que d'accord.
Mesure 8: Favoriser l'émergence de fonds d'investissement ouverts à l'épargne publique et investissant dans des entreprises technologiques.
Position: favorable, mais…
Il s'agit de créer des Fonds qui auraient des déductions fiscales comparables aux anciens REA. Le Québec appuie bien ses entreprises technologiques en phase de démarrage, mais lorsque celles-ci arrivent à une étape subséquente, elles sont souvent rachetées par des sociétés étrangères faute de capitaux permettant la poursuite de la croissance.
Cette mesure doit aussi être financée à même une révision des crédits d'impôt. Avec la mesure précédente, ça commence à faire beaucoup. Il reste à voir jusqu'à quel point on réussira à trouver suffisamment de crédits vraiment peu justifiables pour la mettre en oeuvre.
AXE 3: METTRE FIN À LA SPIRALE DE L'ENDETTEMENT PUBLIC
Mesure 9: Utiliser 100% des nouvelles redevances sur les ressources naturelles non renouvelables pour rembourser la dette.
Position: en partie favorable
Ce ne sont pas 25% des nouvelles redevances, mais 100% qui devraient être consacrées au remboursement de la dette, dit la coalition. Elle estime qu'il faut réduire l'endettement du Québec avant de réduire les impôts. Une question d'équité générationnelle.
Favorable, mais on commencerait par atteindre le break even.