Analyse. " Et dire que tu disais que Google était une bulle... "
La citation est tirée du dernier film Wall Street, alors que l'un des protagonistes essaie de clouer le bec à un courtier. Elle aurait aussi pu nous être adressée...
" Google : le meilleur des engins de recherche... d'argent ", titrait la chronique en 2004, alors que la société s'apprêtait à entrer en Bourse entre 110 $ US et 135 $ US.
« À près de 120 fois les bénéfices, beaucoup trop cher ! »
Dans les jours suivants, Wall Street entendit évidemment la parole du prophète et l'émission se fit à 85 $ US. Mais dès les premières séances, les investisseurs poussèrent l'action à près de 200 $ US. Un niveau d'où elle n'allait plus jamais revenir...
Et maintenant ?
Évidemment la question que tous se posent.
À plus de 623 $ US, le titre de Google s'échange aujourd'hui à près de 18,5 fois les bénéfices de l'an prochain. Beaucoup plus raisonnable comme multiple, alors que la moyenne historique du marché est à 15 fois.
Une situation qui démontre également cependant que les investisseurs ne sont plus aussi certains de l'ampleur de la croissance à venir pour Google.
Il faut dire que les derniers mois n'ont pas été nécessairement très positifs pour le géant. À 70 %, sa part du marché de la recherche stagne depuis quelque temps. Elle pourrait s'être aliéné pour un bout de temps le marché chinois, avec son refus de cautionner la censure gouvernementale. Et son plan de match à l'égard du sans-fil n'est pas très clair.
DEUX QUESTIONS
Ultimement, on en revient néanmoins à deux questions principales :
1-Quelle sera la croissance du marché en ligne dans les prochaines années ?
2 Quelle sera la part de marché de Google dans cette croissance ?
La croissance à venir du marché en ligne
Evercore Partners prévoit que le marché devrait plus que doubler d'ici cinq ans pour atteindre 119 milliards de dollars américains (actuellement à 55 G$ US). La firme fait notamment valoir que le poids de la publicité liée à la promotion des marques est faible sur Internet comparativement aux autres médias (69 % dans les autres médias aux États-Unis par rapport à 24 % en ligne). Même chose du côté de la publicité locale (85 % des revenus dans les journaux, 30 % en ligne). Evercore s'attend à ce qu’un réalignement s’opère sur quelques années. Elle voit évidemment aussi les revenus liés au secteur de la vidéo et du sans-fil croître aussi.
Globalement, le marché s'annonce donc encore assez bien pour Google.
Quelle sera la part de marché de Google dans cette croissance ?
C'est ici que les choses se compliquent. Tout l'accroissement du marché n'ira évidemment pas à Google. Et il ne s'établira pas nécessairement non plus selon les proportions d’occupation actuelles.
Voici venir de surcroît de nouveaux ennemis, dont on pourrait bien ne pas encore mesurer toute la puissance : les réseaux sociaux.
Facebook est actuellement réputée générer des revenus d'environ 600 M$ US. Evercore Partners prévoit qu'ils pourraient grimper à 13 G$ en 2015. C'est moins que les 21 G$ actuels de Google, mais c'est tout de même toute une envolée, et ce n'est que pour un seul acteur.
En fait, les nouveaux joueurs pourraient bien absorber à eux seuls la croissance du marché de la recherche dans les prochaines années, et même plus.
Google connaît du succès en raison de ses algorithmes qui lui permettent d'offrir à ses annonceurs des consommateurs bien ciblés et de mettre à l'enchère des mots-clés pour alimenter ses coffres.
Or, Facebook apparaît désormais mieux outillée pour cibler le consommateur. Le site évolue derrière des portes closes et est en conséquence inaccessible aux engins de recherche. Il peut par contre suivre le comportement de ses utilisateurs à l'extérieur. Il suffit de penser à ces petites icônes " J'aime " que ceux-ci accolent sur différents articles. La société peut traquer les interactions sociales et les activités de ses utilisateurs, ce que ne permet pas de faire aussi précisément l'engin de recherche de Google.
Quel impact pour Google ?
Evercore évalue que, si Google ne sabre pas dans ses coûts, c'est près de 20 % de sa capitalisation boursière qui pourrait fondre d'ici 2013. Ce qui signifie une chute de l'action d'au moins 100 $. Les revenus seraient touchés non seulement en volume, mais aussi au niveau des prix des mots-clés. Malgré la croissance du marché publicitaire en ligne, la rentabilité du populaire moteur de recherche reculerait donc.
Danger réel ?
Google possède une encaisse de plus de 24 G$ US et n'a aucune dette. Il serait surprenant de la voir demeurer inactive. L'histoire nous a déjà appris une fois qu'il n'était pas sage de parier contre elle...