Longtemps attendu, le voici finalement le nouveau mouvement politique de François Legault. Stimulant? Décevant?
Ca dépend probablement de vos allégeances. Si vous êtes de la droite populiste ou de la gauche populiste, vous tirerez probablement à boulets rouges sur la nouvelle formation. "Non, mais, c'est quoi cette histoire d'augmenter davantage les profs, il faut diminuer les coûts de la machine et ils gagnent déjà suffisamment assez, avec deux mois de vacances", dira-t-on d'un côté. "Non mais, c'est quoi cette histoire de vouloir établir des évaluations de performance des profs, le système parfait pour y aller de représailles contre ceux qui ont à cœur l'intérêt de l'élève et luttent contre les dérives des directions", dira-t-on de l'autre.
Personnellement, sans être emballé, on a trouvé intéressant. Particulièrement l'enthousiasme de Charles Sirois, chez qui ont sent bien la passion du Québec. Surtout, le manifeste se garde de relancer la discussion sur l'avenir économique du Québec sur des bases simplistes, ce qui était un peu notre inquiétude avec la montée d'une droite économique populiste, souvent inconséquente, et parfois même prête à désinformer.
Rapidement quelques commentaires
On a deux humbles suggestions à faire à MM Legault et Sirois pour la préparation du plan d'action de l'automne 2011. Mais avant, quelques commentaires sur le manifeste.
- Si le but du mouvement est de faire consensus et d'amener le Québec à "miser sur ce qui nous rassemble plutôt que sur ce qui nous divise", un premier faux pas a été commis en indiquant qu'il n'était pas exclu que la Coalition devienne un jour un parti politique. Ça va se coaliser dans les prochaines semaines, mais pas dans le sens où on le souhaite…
- Sur le besoin de mieux épauler les entreprises par l'innovation, l'éducation et une meilleure fiscalité, on suit, mais pas sans nuances. Il est notamment difficile de comprendre ce que le manifeste veut dire lorsqu'il parle de "revoir les manières d'imposer les entreprises et les individus de façon à encourager le travail, l'investissement, la productivité et l'épargne." Souhaitons que l'on ne vienne pas encore nous parler de baisses d'impôts. Poursuivre un tel objectif serait antinomique avec celui de remettre de l'ordre dans les finances publiques.
- Sur la révision du modèle de la santé, on est d'accord, sans toutefois se faire d'illusion. Le problème en est un principalement de démographie et de budget.
- Sur la révision du modèle scolaire, il faudra que la Coalition précise sa pensée avec moult exemples sur les réels changements qu'elle voit dans la décentralisation et la responsabilisation des professeurs. Et sur quels critères les hausses de rémunération seraient consenties. L'argent qui est donné est toujours plus difficile à reprendre plus tard si un plan ne fonctionne pas.
Faire de l'éducation le fer de lance du développement économique du Québec est cependant l'axe auquel on croit également. Et auquel sont justement arrimées nos deux suggestions.
Que voici.
1-Créer des facultés d'entreprenariat dans les universités
Le Québec manquera toujours de bons entrepreneurs. Il faut donner le goût aux jeunes de se lancer. Très rarement croise-t-on dans les universités québécoises des étudiants dont l'objectif de carrière est d'être entrepreneurs.
Nous formons actuellement beaucoup d'administrateurs, mais il manque ce qu'on appelle le "spirit". En Beauce, le président de Canam, Marc Dutil, a réussi à lancer une école d'entrepreneurship.
Pourquoi ne pas suivre l'exemple et développer dans nos universités des programmes d'entrepreneuriat?
2-Le DEC +
Une idée que l'on caresse depuis quelques années déjà, et dont un dérivé sera, à notre grande joie, mis prochainement de l'avant par Brébeuf.
Qu'est-ce que le DEC + ?
Il s'agit en fait d'ajouter une année facultative à la fin du collégial (ou de l'université, si on préfère) pendant laquelle les étudiants pourraient aller étudier dans une université à l'extérieur du Québec. Une année d'immersion, peu importe les cours choisis, l'objectif étant la maîtrise d'une nouvelle langue. Au retour, chaque candidat aurait à passer un test pour évaluer sa maîtrise de la nouvelle langue. À l'écrit et à l'oral. Le test passé, le DEC + serait décerné.
Quelqu'un maîtrise déjà bien l'anglais? Fort bien, le DEC + lui serait accordé sans nécessité d'immersion. Il pourrait alors aller faire un séjour dans une université espagnole et obtenir un DEC ++. Rien n'empêche de cumuler.
Résultat?
Au bout de quatre ans, rien. Au bout de huit, guère plus. Au bout de 20: le Québec serait devenu l'une des sociétés les plus polyglottes au monde. Et détiendrait un puissant levier de développement économique. Il serait plus facile d'attirer des capitaux ici puisque l'on offrirait aux investisseurs une main-d'œuvre capable de travailler tous azimuts. Il serait aussi plus facile pour les entrepreneurs d'exporter leurs produits et leur savoir à l'étranger. Les réseaux se créeraient plus aisément et naturellement.
Il y aurait un coût à tout cela, mais tant qu'à hausser les frais de scolarité, aussi bien s'assurer que l'on affecte les nouvelles sources de financement aux bons endroits.
Évidemment, un tel programme ne viendrait en rien affecter la primauté du français au Québec.