Première sortie publique du ministre des finances du Canada, Bill Morneau, mardi, devant le Conseil des relations internationales de Montréal (CORIM). Bonne assistance, qui aura pu constater que monsieur Morneau est un habile patineur.
«Aujourd'hui, mon objectif est double: d'abord je veux vous présenter une évaluation claire et honnête de notre situation économique et budgétaire – deuxièmement, et c'est le plus important – vous présenter un aperçu de notre plan en vue de favoriser la croissance de l'économie», a dit monsieur Morneau en déclaration d'ouverture.
Il a effectivement été clair sur la situation économique du pays (qui est difficile), mais ne l'a malheureusement pas du tout été sur la situation budgétaire.
Le gouvernement fédéral est actuellement en consultation prébudgétaire auprès de la population sur son plan d'action. Il invite à soumettre de nouvelles idées pour créer plus de croissance économique. La consultation prébudgétaire est un exercice récurrent à chaque année. Cette année toutefois, elle fait preuve d'une ouverture grand public sans précédent. Nous sommes loin de rencontres privées avec divers groupes d'intérêt. Google et Facebook sont notamment utilisés pour diffuser les échanges.
S'il faut saluer l'exercice, on peut cependant déplorer que le gouvernement ne balise pas mieux la discussion.
L'exercice est dans un but de préparation budgétaire. Les idées de création de croissance sont évidemment les bienvenues. La discussion ne devrait toutefois pas n'avoir lieu que sur les moyens de stimuler la croissance, mais aussi sur leur ampleur et leur durée.
Il n'y a pas de données officielles sur le déficit qu'encourra le gouvernement fédéral à l'an 4 de son programme. Pour qui roule un chiffrier parallèle en adaptant les chiffres et incluant les derniers engagements, force est néanmoins de constater que le déficit pourrait toujours approcher les 15 G$. En campagne électorale, le gouvernement a promis de revenir à l'équilibre à ce moment.
Or, ce montant de 15 G$ en est un qu'il est impossible de résorber sur un an. À titre d'illustration, les Conservateurs ont eu besoin de quatre ans pour dénicher des économies et des récupérations fiscales de 17,7 G$.
La question a été posée à monsieur Morneau s'il anticipait devoir hausser les impôts ou couper dans l'appareil public pour revenir à l'équilibre à l'an 4.
Il a répondu que le premier pas à faire était de créer de la croissance.
Lorsqu'on lui a demandé s'il croyait que les mesures de stimulation créeraient une croissance suffisante pour ramener les finances à l'équilibre, il a de nouveau glissé, soulignant que la question du déficit était importante, mais revenant aussitôt sur la nécessité de créer de la croissance.
Conclusion?
Tout le monde s'entend sur la nécessité de générer de la croissance. Le fait d'être en déficit pour quelques années n'est pas non plus un drame. Il faut cependant aussi savoir reconnaître que notre chiffrier budgétaire est structurellement déficitaire, même avec plus de croissance. Et être clair avec le public sur le moment où l'on entend corriger cette déficience, et sur les solutions auxquelles on songe faire appel.
Cela permettrait de nettement mieux placer la discussion, et de la relever.
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