Le Québec aura bientôt sa première mine de diamants. Serait-on sur le point de vivre une nouvelle fièvre?
La récente annonce d'un financement de près d'un milliard de dollars pour la construction de la mine Stornoway, a fait germer la question dans notre esprit. Et nous a rappelé d'intéressants souvenirs.
Le 17 décembre 2001, le tandem Ashton Mining/Soquem (Ashton est aujourd'hui Stornoway) publiait un communiqué de presse faisant état de teneurs diamantifères obtenues à 300 km au nord de Chibougamau, dans la région des monts Otish.
Pendant quelques jours, rien, ou à peu près.
Puis, le mot allait se répandre, et la fièvre faire ses premières avancées. «Les teneurs sont plus qu'intéressantes, elles sont aussi bonnes que celles qui ont donné naissance à la mine Ekati, dans les Territoires du Nord-Ouest», disait-on.
Ekati, c'était gros. Le premier gisement de diamants du Canada et l'un des plus importants du monde.
Dans les semaines suivantes, le Québec allait connaître une véritable ruée vers le diamant. En quelques mois, 45 000 demandes de titres miniers (claims) furent déposées au gouvernement. Du jamais vu.
Plusieurs titres de juniors détenant des propriétés diamantifères explosèrent. Comme toutes ses aïeules, la frénésie finit néanmoins par rencontrer son ennemi juré : le temps.
Malgré des teneurs intéressantes, il fallut plusieurs années pour confirmer le potentiel diamantifère des monts Otish (qualité récurrente des diamants, tonnage suffisant, etc). De même qu'aplanir nombre d'embûches (route d'accès, approvisionnement en énergie, etc.). Il fallut aussi traverser une crise économique qui mit l'industrie en situation de surcapacité.
Tous les titres dégonflèrent, et nombre revinrent bien en-dessous du prix d'origine.
Depuis quelques mois, un certain optimisme semble cependant renaître. La mine de Stornoway devrait entrer en exploitation. Grâce à un effort de financement du gouvernement, mais grâce aussi au fait que le marché du diamant envoie maintenant des signaux assez importants.
Va-t-on vers une pénurie de diamants ?
La question se pose en effet.
Les pays d'Asie influent particulièrement sur la demande. En 2000, l'Asie représentait 8 % des ventes mondiales de bijoux. En 2012, la Chine et Hong Kong représentaient 13 % des ventes. La maison Bain & Company prévoit maintenant que ce pourcentage sera de 18 % en 2017.
Pendant ce temps, un certain nombre de mines arrivent à la fin de leur espérance de vie. Et il n'y a pas assez de nouveaux projets pour prendre le relais. La société minière Petra Diamonds note que l'industrie ne compte qu'une trentaine de mines d'importance dans le monde. À part Stornoway, aucune découverte ne s'est hissée dans le premier tiers des gisements depuis 1990.
Bain & Company prévoit que si la tendance se maintient, le marché sera en équilibre pour encore quelques années. À compter de 2019, toutefois, l'offre devrait commencer à reculer. Le scénario de la maison prévoit une production de 169 millions (M) de carats en 2018, qui reculera dans les années suivantes pour atteindre 153 M de carats en 2023.
Devant la baisse envisagée de l'offre et la poursuite d'une hausse de la demande, plusieurs s'attendent à ce que les grands clients des mines tentent de sécuriser leurs approvisionnements. Si le scénario de Bain donne des signes de matérialisation, ces clients devraient être prêts à payer pour des ententes à long terme avant 2018.
En raison du phénomène, BMO Marchés des capitaux voit les prix grimper de 5 % à 7 % annuellement au cours des prochaines années.
Quel titre favoriser ?
Le secteur est spéculatif et rempli de risques d'exécution et de marché. Il n'est pas pour tout le monde. On peut y perdre beaucoup d'argent.
Stornoway (SWY, 0,70 $) est cependant un acteur majeur. Au fur et à mesure que les travaux de la mine avanceront, le titre pourrait s'apprécier. Les analystes estiment la valeur fondamentale de Stornoway à environ 1 $ par action.
À l'époque, des juniors comme Majescor et Dianor avaient un certain nombre de propriétés diamantifères, mais on n'a pas eu vent de nouveaux projets d'exploration de ce côté.
Le consultant Jacques Bonneau, qui est notre personne ressource en matière de mines, nous a cependant récemment parlé d'une société du nom de Nouveau Monde (NOU, 0,20 $). On a causé avec son patron, Éric Desaulniers.
La minière compte notamment au sein de son conseil d'administration Jacques Letendre, qui pendant quelques années a été le patron de l'exploration chez le géant De Beers.
Elle croit avoir trouvé un vaste champ de kimberlite (la roche dans laquelle logent généralement des diamants) au sud-est de la baie James, entre les villages de Waskaganish et Matagami. Le projet est embryonnaire. Des relevés géophysiques doivent être effectués en août et quatre forages à l'automne ou à l'hiver.
Même si la présence de kimberlite était confirmée, il n'y a pas de garantie qu'il s'y trouverait du diamant. Mais le marché paie quand même pour des découvertes importantes de kimberlite. Le titre pourrait lever si les forages sont probants.
Pas nécessairement de fièvre en vue, donc, mais une intéressante histoire à suivre.