Le mari de Pauline Marois a sollicité du financement à au moins deux dirigeants de firmes d'ingénierie. Des prête-noms ont été utilisés dans un cas. A-t-il mal agi?
Après Philippe Couillard et son paradis fiscal, c'est au tour de madame Marois et de son mari d'être placés dans une situation inconfortable.
La SRC cite un dirigeant d'une firme d'ingénierie qui affirme sous serment avoir reçu la visite de Claude Blanchet, au printemps 2007. Il lui aurait demandé une contribution de 25 000$ en provenance de différents donateurs, et ne dépassant pas 3000$ par donateur.
Un autre dirigeant dit de son côté avoir été approché pour des dons de 5000$. Dans ce cas, au moins deux employés auraient été remboursés par l'entreprise pour leur don.
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Voyons-y de plus près.
Monsieur Blanchet avait-il le droit de solliciter?
Oui. Rien n'interdisait au conjoint ou à la conjointe d'un candidat électoral de faire de la sollicitation pour du financement. L'important est de le faire dans les normes. Pas plus de 3000$ pour chaque individu.
Monsieur Blanchet savait-il au sujet des prête-noms?
Rien n'indique qu'il savait.
Pouvait-il faire preuve d'aveuglement volontaire?
Au milieu de 2006, le rapport Moisan avait mis en lumière cette pratique à l'intérieur de certaines firmes, monsieur Blanchet savait donc la chose possible. À sa décharge, le rapport ne suggérait pas de mesures très fortes pour lutter contre la pratique et suggérait aussi de hausser à 5000$ la contribution personnelle autorisée. Ce qui laisse entendre qu'au moment des événements, si l'on connaissait le problème, on mesurait encore mal son étendue. On ne sait jusqu'à quel point il la mesurait lui-même.
En outre, parce qu'on ignore la taille des firmes en question, il est difficile de jauger si monsieur Blanchet aurait dû à sa face même constater un haut risque d'utilisation de prête-noms. Dans les bureaux d'avocats, par exemple, il est courant que des associés soient libéraux et péquistes. Une somme de 25 000$ (et encore plus de 5000$) peut être facilement atteinte par la seule contribution des associés dans une firme d'une certaine envergure, sans que l'on soit obligé d'avoir recours aux employés.
Sur ces deux cas, à cette époque. Il n'est pas évident que l'on puisse conclure à un outrageant aveuglement volontaire.
S'il y a eu d'autres cas, plus tard, la question gagnera cependant en pertinence.
Prête-noms ou pas, M. Blanchet aurait-il dû s'abstenir, au plan éthique?
Prête-noms ou pas, M. Blanchet aurait-il dû s'abstenir, au plan éthique?
Est-ce que le mari de celle qui est pressentie pour devenir chef de parti ne devrait pas se douter que le simple fait qu'il sollicite une contribution risque de jeter l'espoir d'un éventuel retour d'ascenseur? Et, conséquemment, éthiquement s'abstenir?
C'est ici que risque de se situer la discussion.
Certains avanceront que cet espoir de retour d'ascenseur était aussi présent à tous ces soupers à 500$ où l'on faisait venir des ministres. Ils ajouteront que plusieurs de ces ministres ont aussi fait de la sollicitation de financement. Il faut, diront-ils, juger avec l'époque. Si c'était à ce moment socialement tolérable pour les ministres de solliciter et d'organiser le financement, ne l'était-ce pas aussi pour monsieur Blanchet?
D'autres feront valoir que ce n'était pas socialement acceptable à l'époque d'agir ainsi, la preuve en étant qu'on en est venu à changer la loi pour éviter ces sollicitations. Et que, si on a changé la loi, c'est que c'était peut-être légal, mais plus difficilement éthiquement acceptable.
Sur cette question, on laissera chacun libre de conclure. En signalant cependant qu'il y a beaucoup de monde dans le même bateau que monsieur Blanchet…
Ces opérations ont-elles eu lieu?
Une autre importante question, sinon la plus importante.
Monsieur Blanchet nie que ces approches aient eu lieu.
S'il a raison, c'est la SRC qui sera en difficulté avec la force de ses sources. S'il ment, il est cuit. Et il risque d'emporter madame Marois avec lui.
Madame Marois a soutenu que son mari avait occasionnellement fait du financement, mais toujours à l'intérieur du cadre de la loi. Les situations dépeintes par la SRC étaient à l'intérieur de ce cadre. Si elles n'ont pas eu lieu, d'autres apparentées ont-elles eu lieu?
Cette affaire ne se conclura pas avant que monsieur Blanchet n'ait précisé quel type de financement occasionnel il effectuait, et comment il l'effectuait.
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