Une foule d’indices suggèrent que l’industrie américaine de la biotechnologie est en proie à une bonne fièvre spéculative.
Ce secteur a toujours été hautement spéculatif, car il repose sur l’espoir que les recherches des entreprises débouchent sur des médicaments vedettes.
C’est une industrie difficile à évaluer puisqu’une entreprise peut transformer des pertes chroniques en profits de milliards de dollars presque instantanément si le médicament réussit ses essais cliniques.
Tout le monde cherche le prochain Viagra ou Lipitor ou espère répéter le succès fulgurant de Biogen, Amgen ou encore Gilead Sciences.
Business Insider, The Financial Times, The Economist et divers blogues financiers craignent que la dernière vague effervescence devienne une autre bulle qui ne pourra qu’imploser, comme le marché immobilier en 2007, l’or en 2011 ou l’industrie solaire en 2008.
« Il n’est pas surprenant qu’une partie des liquidités sans précédent que fournissent les banques centrales se retrouve dans des actifs financiers, comme la biotechnologie, après avoir quitté les ressources, l’or et les marchés émergents », explique Jacob Marcus, stratège chez Bank of America Merrill Lynch.
Une évaluation aussi chère qu’en 2006 ou 2000, dépendant du ratio
Une évaluation aussi chère qu’en 2006 ou 2000, dépendant du ratio
L’un des fonds négociés en Bourse (FNB) de cette industrie l’iShares Nasdaq Biotechnology Index ETF (NY, IBB) a explosé de 71 % depuis un an, quatre fois le gain du S&P 500.
Le nombre d’actions de ce FNB est aussi près d’un record.
Les FNB de biotechnologie s’approprient aussi la part de lion (850 M$ US ou 13 % de l’actif en gestion) des ventes parmi tous les fonds négociés en Bourse aux États-Unis, depuis le début de 2014, rapporte Credit Suisse.
L’indice Bloomberg de biotechnologie se négocie à un multiple de 174 fois leurs bénéfices et 6,75 fois leur valeur comptable, comparativement à des multiples respectifs de 17 fois et de 26 fois pour le S&P 500, indique Dave Lutz, de Stifel Nicolaus.
Le titre de biotechnologie moyen n’a pas été aussi chèrement évalué depuis 2006, se négociant à un multiple d’évaluation de 60 % supérieur à celui du S&P 500, soit le double de la norme historique, indique pour sa part Savita Subramanian, stratège quantitative chez Bank of America Merrill Lynch.
« Disons qu’à 30 fois les flux de trésorerie, le secteur n’a pas été aussi cher depuis la bulle de 1999-2000 », dit aussi Martin Roberge, stratège quantitatif, de Canaccord Genuity.
Entrées en Bourse record
Les transactions dans l’industrie font rage si bien que des acquéreurs tels que Eli Lilly et Roche se plaignent que les prix soufflés ont fait disparaître les cibles d’acquisitions.
On assiste aussi à un record d’entrées en Bourse depuis le début de 2014. Quinze entreprises sont entrées en Bourse.
Lors de la seule première semaine de février, huit entreprises ont récolté 502 millions de dollars américains, un record en une semaine pour cette industrie. Des entreprises britanniques et néerlandaises traversent l’Atlantique pour s’inscrire à la cote du Nasdaq.
Intercept Pharmaceutical (Nasdaq, ICPT), qui veut traiter des maladies du rein, a explosé de 220 % à son entrée en Bourse, le 8 janvier.
Spéculation ou bulle ?
Spéculation ou bulle ?
Certains observateurs, tels que Richard Bernstein, chef des investissements de la firme qui porte nom, ne voient pas de bulle, mais une simple vague de spéculation.
Cam Hui, gestionnaire chez Qwest Investment Fund Management, croit qu’il est trop tôt pour parler d’une bulle, mais il reconnaît que le secteur a tous les ingrédients pour devenir la coqueluche des spéculateurs, après avoir passé dix ans à se remettre de la bulle de 2000.
« Leur mouvement haussier pourrait durer beaucoup plus longtemps qu’on ne l’imagine », écrit-il sur Seeking Alpha.
Tant que l’économie mondiale requerra des liquidités et des taux zéro de la part des banques centrales, les chances sont bonnes que les capitaux continuent de courir les placements les plus performants, croit aussi M. Marcus.
Même s’il se dit dans le camp de la bulle, M. Roberge ne croit pas que le secteur ait atteint son zénith.
« Une bulle crève habituellement lorsque la Fed draine des liquidités. Présentement, la banque centrale en ajoute moins qu’avant », dit-il.
Ce blogue reviendra le 10 mars, après la relâche.