Après de longs mois de négociations, près de vingt institutions financières, de Credit Suisse à Goldman Sachs, se seraient entendues pour éviter l’effet en cascades qu’a eu la faillite du courtier Lehman Brothers, en septembre 2008, rapporte le quotidien Straight Times, de Singapour.
La valeur de 700 000 milliards de dollars attribuée aux produits dérivés dans le monde, dans l’article, a aussi de quoi frapper l’imagination sur l’ampleur de ces produits de spéculation.
Warren Buffet a déjà comparé les produits dérivés à des « armes de destruction massive ».
Les négociations, pilotées par l’International Swaps and Derivatives Association (ISDA), font partie des pressions exercées par les autorités réglementaires américaines pour que les institutions financières élaborent une solution à la négociation de produits dérivés, en temps de crise.
Éviter la contagion d’une nouvelle crise de confiance
À l’époque, dans la foulée de la faillite de Lehman Brothers, aucune institution ne voulait conclure des affaires avec une autre, de peur qu’elle ne soit insolvable, paralysant complètement le système financier.
Quelque 80 % des institutions ayant des contrats dérivés avec Lehman auraient exigé le règlement immédiat de leurs contrats, dans les cinq semaines suivant sa faillite, précipitant la crise.
Les produits dérivés « dérivent » leur valeur d’un autre actif sous-jacent, soit un panier d’actions, des onces d’or, ou encore des titres adossés à des actifs, obligeant l’institution à vendre l’actif en question pour respecter les termes du contrat.
Rappelons-nous. Même le géant General Electric, et une foule d’autres entreprises, étaient alors incapables de renouveler leur papier commercial de sept jours, un instrument de trésorerie banal qui finance leurs dépenses courantes.
Cette crise de confiance a littéralement amené le système financier au bord du gouffre, d’où les mesures exceptionnelles mises en œuvre par les gouvernements et les banques centrales depuis pour remettre l’économie sur les rails.
Clause de crise difficile à faire avaler
Clause de crise difficile à faire avaler
Un nouveau protocole en temps de crise sera dévoilé officiellement dans quelques jours et entrera en vigueur le 1er janvier 2015, rapporte aussi Straight Times.
Le principe est le suivant. En cas de crise, les institutions ne forceront plus une institution en difficultés à honorer immédiatement les termes de contrats de produits dérivés qui lient les deux institutions.
Cette « clause de crise » vise à donner à l’institution visée le temps de respirer au lieu d’avoir à vendre des placements précipitamment alertant ainsi les autres négociateurs, qui doutent alors de la capacité de l’institution à respecter ses obligations et incitant ainsi d’autres institutions à aussi exiger le règlement immédiat des contrats, et ainsi de suite dans un effet boule de neige d’institution à institution.
L’entente vise à garder l’institution fragile en vie, forçant toute l’industrie à absorber des pertes, dans le but d’éviter une nouvelle crise.
Les autorités veulent aussi éviter à l’avenir le sauvetage coûteux d’institutions telles que celui de l’assureur AIG.
Il reste plusieurs détails à fignoler et aussi un mur de résistance à faire tomber chez les institutions non signataires de l’entente, tels que le gestionnaire BlackRock et les fonds de couverture (hedge funds).
Ces fonds soutiennent qu’ils ont avant tout une obligation fiduciaire envers leurs propres clients.
Il est en effet difficile de réconcilier le fait qu’un produit dérivé, qui vise parfois à protéger la valeur de placements en portefeuille, ne fonctionne pas au moment où cette « police d’assurance » devient le plus nécessaire.
Le nouveau protocole pourrait provoquer encore plus de volatilité dans les marchés puisque des institutions et des fonds voudront peut-être remanier et vendre des contrats de dérivés, afin de minimiser leur risque.
La très grande volatilité dans l’énorme marché des devises donne peut-être un avant-goût des perturbations qui nous attendent.