Avant d’établir sa stratégie formelle de placement en janvier, l’équipe des marchés de J.P. Morgan Private Bank a cogité sur des surprises qui dévient du scénario dominant, afin d’identifier des occasions et des risques potentiels.
« Lors de notre retraite fermée bi-annuelle d’une semaine, je demande toujours à mon équipe ce qui pourrait nous surprendre. J’espère que vous trouverez ces surprises potentielles un peu provocatrices, surtout en fonction du consensus. C’est un exercice que nous jugeons utile pour aiguiser notre approche de placement et notre discipline », note Richard Madigan, le chef des investissements, dans son préambule.
Voici ce que ce dernier remue-méninges a donné : 12 scénarios, dont certains sortent des sentiers battus
1. L’économie mondiale reste anémique, l’Europe et le Japon ayant du mal à s’extirper de leur récession. L’économie américaine s’essouffle et retombe à 1,5 %. Les taux à long terme continuent de baisser et le dollar américain recule. Les taux de référence de dix ans rechutent sous 2 %. Les devises des marchés émergents rebondissent parce que le niveau plus élevé de leurs taux attire des capitaux.
2. Les attentes inflationnistes s’accélèrent, en même temps que l’économie américaine gagne en vigueur. Le cours du pétrole trouve son plancher tôt en 2015, se stabilise et repart à la hausse. Le marché américain du travail retrouve le plein emploi plus vite que prévu et la confiance des consommateurs grimpe. La politique monétaire de la Fed devient en retard sur l’activité économique et la banque centrale se rattrape en relevant son taux directeur plus tôt et plus vite que prévu.
3. La divergence des politiques monétaires fait tomber la Bourse américaine de son piédestal. Dans ce scénario, la détente monétaire à l’extérieur des États-Unis stimule ces économies et provoque un retour des investisseurs dans leurs marchés. Le dollar américain cesse de s’apprécier parce que les capitaux retournent vers l’Europe, le Japon et les Bourses des pays émergents. La Bourse américaine cesse alors de mener la charge.
Trop d'euphorie
Trop d'euphorie
4. Une bulle technologique se forme dans un vent d’euphorie. Les fonds d’investissement privés concentrent leur capital dans le secteur de la technologie, en particulier dans les entreprises émergentes encore peu rentables, en quête du prochain Google. La montée du secteur entraîne une marée d’appels publics à l’épargne. L’évaluation des titres de technologie atteint des niveaux frénétiques, dans une spirale haussière qui finit par éclater et entraîner le reste de la Bourse avec elle.
5. Le marasme économique fait grimper la popularité des partis politiques plus marginaux. Le parti communiste Syriza remporte les élections en Grèce et le nouveau gouvernement refuse de rembourser ses dettes. Des réformes inefficaces incitent les Italiens vers des politiques plus populistes. L’Italie se retire de la monnaie unique. Les partis Podemos en Espagne et le Front national en France profitent de ce mouvement pour gagner les élections locales. Les écarts de crédit des pays périphériques d’Europe montent en flèche, en réaction à la débandade de l’euro.
6. Les élections britanniques ne donnent pas de vainqueur clair, mais le parti indépendantiste gagne des appuis. Ce parti impose un vote sur l’appartenance à l’Union européenne, faisant chuter la livre sterling et étouffant sa reprise économique.
7. Les perspectives des pays d’Amérique latine font un virage en U. La présidente du Brésil Dima Roussef impose plus de discipline économique à son pays, ce qui suscite un retour des capitaux. Les élections en Argentine changent le paysage politique qui attire aussi l’attention des investisseurs étrangers. L’investissement direct retourne au Brésil et en Argentine, propulsant ces deux marchés en tête de la performance des marchés émergents.
8. Le mouvement de contestation revient à Hong Kong, obligeant les autorités à mâter plus violemment les manifestants. Les perturbations économiques font fuir les capitaux et font chuter le marché immobilier et la Bourse locale. Le centre financier de Hong Kong est marginalisé, au profit de Singapour et de Shanghai.
La Russie s'enfonce et contamine les banques européennes
La Russie s'enfonce et contamine les banques européennes
9. Un coup d’état en Corée du Nord entraîne une guerre civile. La zone démilitarisée est envahie et les Coréens du Nord fuient vers le sud. La Corée du Sud tombe en récession en raison du coût astronomique de l’unification des deux Corées. Le won coréen chute à son plus bas niveau depuis la crise asiatique de 1997. La Corée unifiée vit une décennie perdue, en raison des coûts économiques et sociaux de son unification.
10. Les mesures sans précédent de détente monétaire au Japon et en Europe, ainsi que la chute du yen et de l’euro, déclenchent une dévaluation concurrentielle des monnaies de l’Asie, la Chine en tête. En conséquence, l’inflation fait un retour en Inde et en Asie du Sud-Est étranglant la reprise économique dans ces pays. L’économie mondiale tombe sous 3 %.
11. La Russie s’enfonce davantage dans une récession sévère en raison de nouvelles sanctions et de la rechute du pétrole. Incapable de fermer les robinets du pétrole et du gaz naturel vers l’Europe, Vladimir Poutine ordonne aux sociétés d’état russes de cesser de verser leurs intérêts sur leur dette émise à l’étranger. Les banques françaises et allemandes en souffrent le plus, faisant plonger leurs actions en Bourse, ce qui oblige les autorités européennes à racheter leurs actions. L’Europe s’enlise dans une spirale déflationniste à la japonaise.
12. Abenonics, soit le terme donné à la détente monétaire sans précédent du premier ministre japonais Shinzo Abe, fonctionne. Le Japon entre dans un cercle vertueux permettant à M. Abe d’instaurer des réformes structurelles. Le Japon est invité à joindre le Partenariat commercial Trans-Pacifique. La Bourse japonaise s’apprécie le plus parmi tous les marchés du monde.