Pas étonnant que les Bourses mondiales aient connu un mouvement de repli à la fin de juillet et au début d’août, les investisseurs professionnels l’ont provoqué en remaniant leur portefeuille, en prévision d’une telle correction.
En un mot, ils « sont « le marché.
C’est ce que révèle le sondage mensuel de 224 gestionnaires mondiaux de portefeuille conduit par Bank of America Merrill Lynch, du 1er au 7 août dernier.
Ces portefeuillistes ont augmenté leurs liquidités les portant à 5,1 % de leur portefeuille, par rapport à une répartition 4,5 % un mois plus tôt.
Quelque 27 % d’entre eux ont aussi plus d’encaisse que de coutume dans leur portefeuille, comparativement à 12 %, un mois plus tôt. Dans les deux cas, il s’agit des fortes proportions depuis juin 2012.
Seulement 44 % des pros sondés surpondéraient les actions au début d’août, une chute de 17 points par rapport au mois de juillet.
De plus, 30 % des pros disaient s’être protégés contre une chute potentielle des marchés, soit la plus forte proportion depuis octobre 2008.
« Le niveau d’encaisse est un signal contraire d’achat. Les transactions pour se protéger d’une baisse militent aussi pour un rebond des actifs financiers », indique Michael Harnett, stratège en chef de Bank of America Merrill Lynch.
Les pros misent aussi sur une appréciation du dollar américain et se réfugient aussi dans les titres à plus grande capitalisation.
Des inquiétudes plutôt que des risques
Des inquiétudes plutôt que des risques
Quelque 45 % des répondants ont placé les événements géopolitiques en tête des raisons pour lesquelles ils ont réduit le niveau de risque de leur portefeuille, à court terme.
Pourtant, les observateurs ne prévoient aucune contagion de ces tensions sur l’économie ou la Bourse, à moins d’une flambée du pétrole. Or, le pétrole du West Texas reste sous 100 $ US le baril depuis 10 jours, tandis que le pétrole Brent est près d’un plancher en 13 mois.
Une première hausse des taux par la Fed américaine figure au deuxième rang de leurs soucis.
Bien que leur conviction dans la cadence de l’économie mondiale d’ici 12 mois est moins forte (56 %) qu’elle était en juillet (69 %), les gestionnaires sont les plus nombreux (71 %) depuis 2011 à prédire une hausse des taux à court terme.
Deux investisseurs sur trois s’attendent à une première hausse du taux directeur par la banque centrale américaine avant juin 2015.
Même si la Fed cessera son programme de rachat d’obligations en octobre, les liquidités mondiales sont les plus élevées en quatre ans. Les entreprises mondiales, à l’exception des financières, disposent notamment de 5 000 milliards de liquidités, rapporte le stratège quantitatif mondial de Bank of America Merrill Lynch, Nigel Tupper.
« La hausse des taux, quand elle arrivera, sera très graduelle », dit-il, comme le dicte d’ailleurs le ralentissement observé récemment dans les ventes du détail aux États-Unis, l’encours des prêts, de la production industrielle et des ventes au détail en Chine et dans la production industrielle en Europe.
Malgré la plus grande prudence de leur répartition d’actif, les gestionnaires de portefeuille se déplacent de l’Europe, où l’économie et les bénéfices déçoivent, aux marchés émergents de l’Asie-Pacifique, dont la Chine, où les perspectives économiques et l’évaluation des actions sont plus attrayantes.
Pour leur part, les stratèges de Bank of America Merrill Lynch, ne perçoivent aucune raison de changer de cap puisque tous les ingrédients favorables à la Bourse sont encore bien présents : une économie croissante, le prolongement de taux faibles, des liquidités en quantité, une évaluation encore raisonnable (15 fois les bénéfices prévus pour le S&P 500) et en bonus, des investisseurs craintifs.