À deux jours de la fin du mois, les actions mondiales se dirigent vers un deuxième trimestre consécutif de déclin, pour la première fois en quatre ans.
Pour le S&P 500, à peine 14 points séparent l'indice-phare du creux atteint le 24 août qui pourrait lui servir de nouveau tremplin, espèrent les techniciens.
L’indice MSCI Monde a perdu 7,3% à ce jour au troisième trimestre, tandis que le S&P 500 est 12% sous son sommet de mai, à la clôture du 28 septembre.
L’onde de choc du scandale de Volkswagen en Europe, la déroute du négociateur londonien de matières premières Glencore et les 10000 mises à pied par Caterpillar alimentent le sentiment de pessimisme.
Aux États-Unis, on assiste aussi à une succession de marchés baissiers, soit des reculs d'au moins 20%. Les ressources et l’énergie ont ouvert le bal plus tôt cette année et le secteur du transport a suivi le mouvement depuis.
La populaire industrie de la biotechnologie vient elle aussi de tomber dans un marché baissier, avec une chute de 27% depuis son sommet de juillet.
Pas étonnant dans de telles circonstances que des gestionnaires vedettes tels que Carl Icahn deviennent ouvertement alarmistes ou que d’autres stratèges optimistes tels que l’économiste Ed Yardeni, perdent peu à peu de leur conviction. Lisez Une catastrophe pend au bout du nez des marchés, dit Carl Icahn.
Surtout que la confiance des investisseurs envers la capacité des banques centrales à raviver l’économie et de sauver les marchés, encore une fois, s’effrite un peu plus chaque jour.
Un test technique que même les généralistes surveillent
Un test technique que même les généralistes surveillent
Dans ce climat d’anxiété aigüe, les yeux se tournent vers l’analyse technique pour au moins tenter d’y voir un peu plus clair, au jour le jour.
Tous regardent le niveau de l’indice S&P 500 afin de voir s’il revisitera le creux de 1867 qu’il avait atteint le 24 août.
Certains y voient un nouveau tremplin d’où le S&P 500 pourra ensuite rebondir, comme il l’avait fait lors du mouvement de recul de 2011.
«Le 24 août correspond à un «flash-crash» et les négociateurs actifs qui ont racheté des actions ce jour là pour un gain rapide, voudront encaisser leurs gains, ce qui provoquera un retour au creux», explique Tony Dwyer, stratège quantitatif américain de Canaccord Genuity.
Si l’expérience de 1987, 1998 et 2011 est un bon guide, le S&P 500 devrait rebondir d’au moins 16% au cours des trois mois suivant le test du creux. Un tel rebond hisserait le S&P 500 à 2150, à la fin de 2015, calcule ce stratège.
Un rebond moyen de 29% sur six mois amènerait le S&P 500 à 2400, à la fin du premier trimestre de 2016, ajoute-t-il. Voici ce qu'il écrivait le 18 septembre.
Les observateurs à contre-courant voient dans le pessimisme de plus en plus généralisé un indicateur que les marchés peuvent effectivement rebondir.
L'indice Investor's Intelligence qui compare les optimistes aux pessimistes indique qu'on pourrait approcher d'un plateau pour la Bourse. Le 25 septembre, l'imdice comptait 26% d'investisseurs optimistes, ce qui n'est pas très loin au niveau de 21,5% atteint lors du creux de 2011, note Dennis Mark, analyste technique de Financière Banque Nationale.
Par contre, seulement 30,2% sont pessimistes, comparativement à une proportion de 49,5%, lors du mouvement de recul de 2011.
La Bourse en tant qu'indicateur précurseur ?
La Bourse en tant qu'indicateur précurseur ?
Chez Bank of America Merrill Lynch, le stratège mondial Michael Harnett surveille la Bourse justement pour voir si elle saura rebondir, après un nouveau mouvement de correction.
Si la Bourse ne rebondit pas comme prévu, ce serait alors peut-être le signe que nous nous dirigeons bel et bien vers une récession mondiale et une récession des bénéfices que les investisseurs appréhendaient, avance-t-il.
En effet, les marchés ne font pas que réagir à l’indécision de la Fed américaine ou encore les mauvaises données économiques de la Chine. Les prévisions mondiales de bénéfices continuent leur glissade et le nombre de révisions à la baisse par rapport aux nombres de révisions à la hausse est le pire depuis juillet 2012, selon Citigroup.
Stéfane Marion, économiste et stratège à la Financière Banque Nationale, garde espoir que l’économie mondiale et les bénéfices reprendront du mieux en 2016, après le ressac actuel, en se fiant à l’amélioration en juillet d’un indicateur mondial de la production industrielle de l’OCDE.
«Si l’amélioration observée en juillet se poursuit en août et en septembre, la production industrielle du troisième trimestre serait la meilleure depuis l’an dernier», note M. Marion,
Le dollar américain : la clé de voûte pour la Bourse
Pour Vincent Delisle, le stratège de Banque Scotia, qui se préparait à une raclée boursière depuis avril, le mouvement de repli pourrait s’avérer une «occasion tactique» de réinvestir des munitions, tout en gardant en tête que le «cycle haussier qui a débuté en 2009 est déjà très avancé», dit-il.
La clé pour la Bourse repose sur le dollar américain, croit pour sa part Martin Roberge, stratège quantitatif canadien de Canaccord Genuity.
La monnaie américaine doit se stabiliser pour remettre la croissance des bénéfices des entreprises américaines sur les rails, pour soulever les cours des matières premières et pour donner du souffle aux marchés émergents.
Pour espérer un rebond comme ceux de 1998 ou de 2011, il faut que le billet vert se stabilise ou faiblisse. En 1998, la Fed avait abaissé ses taux trois fois, affaiblissant le dollar américain. En 2011, le risque que les États-Unis perdent leur cote de crédit triple A avait aussi fait baisser le billet vert.
Cette fois, la Fed se prépare à augmenter ses taux. En plus, le message de ses orientations (dot plot) table encore sur cinq hausses de taux, d’ici l fin de 2016.
«Pourquoi une banque centrale baisserait ses taux au moment où la Fed signale qu’elle relèvera les siens, ce qui accentuera la dépréciation de la monnaie locale et la fuite des capitaux», explique M. Roberge.
Pour briser ce dilemme, le stratège aimerait voir les banques centrales de la Chine et de l’Inde abaisser leurs taux, parce que les devises de ces deux pays fluctuent moins en fonction du dollar américain, contrairement à celles des autres pays émergents, explique M. Roberge.
En raison de la divergence entre les politiques des banques centrales qui fait monter le dollar américain, il est possible que la Bourse américaine mette plusieurs mois à trouver le plancher duquel elle pourra rebondir, cette fois.
La bonne nouvelle cette fois est que l’évaluation des actions américaines et les taux d’intérêt sont plus modestes que lors de la crise asiatique de 1998. Le S&P 500 se négocie à un multiple de 14,5 fois les bénéfices, par rapport à 18 fois au creux de 1998.
Les bénéfices se contractent aux États-Unis, mais l’effet négatif de l’appréciation du dollar américain et de la chute du pétrole devrait s’atténuer, après le premier trimestre de 2016, fait valoir M. Roberge.