Les investisseurs laissent de côté leur anxiété du mois d’août et sautent dans le rallye de fin d’année qui s’amorce.
Grâce au rebond de 11,3% depuis le creux du 24 août, le S&P 500 a complètement récupéré les pertes qu’il avait essuyées depuis le début de l’année.
L’indice reste toutefois légèrement (2%) sous le sommet historique de 2 134 atteint le 20 mai.
Les investisseurs reviennent aussi en force aux obligations de sociétés, ce qui prolonge la source de financement sur laquelle les entreprises s’appuient pour boucler leurs acquisitions et leurs rachats d’actions.
Depuis une semaine, les investisseurs mondiaux ont réinvesti 3,9G$US dans les fonds d’obligations de sociétés, un sommet en huit mois, précise Bank of America Merrill Lynch.
Ce courtier note aussi que ses clients privés achètent des actions depuis sept semaines, bien que sans grande conviction.
Finies pour l’instant les craintes de récession mondiale et américaine, d’atterrissage forcé en Chine, de crise de dette dans les marchés émergents ou encore de défaillance éventuelle de producteurs de pétrole ou de métaux trop endettés.
Tant que les banques centrales du monde veillent au grain et restent accomodantes, les investisseurs semblent disposés à mettre de côté ce qui pousse justement la Chine à abaisser ses taux pour la sixième fois en douze mois et ce qui motive le rachat plus musclé d’obligations « promis » par la Banque centrale européenne.
«C’est le retour du pendule du pessimisme de l’été. Les monnaies des pays émergents résistent mieux cette fois au regain du dollar américain. On entre dans une sorte de cercle vertueux: le rachat additionnel d’obligations par la banque centrale européenne maintient le dollar américain élevé, ce qui ralentit l’économie américaine et, à son tour, garde la Fed sur les lignes de côté», explique Martin Roberge, stratège quantitatif, de Canaccord Genuity.
Les deux-tiers des entreprises surpassent les prévisions
Les bons profits américains servent encore une fois d’antidote à la grisaille économique. Quelque 171 sociétés ou à peu près la moitié du S&P 500 avaient rapporté leurs résultats le 23 octobre.
Jusqu’à maintenant, les deux tiers des entreprises du S&P 500 ont surpassé les prévisions abaissées des analystes au troisième trimestre, une proportion conforme à la moyenne historique, rapporte Lindsey Bell, de S&P Capital IQ.
Les résultats dévoilés surpassent les prévisions par un pourcent, rapporte Bank of America Merrill Lynch. Ce courtier s'attend à ce que le troisième trimestre termine 3% meilleur que prévu. C'est toutefois mois que les surprises de 5 à 6 % des deux tirmestres précédents.
Après les bons résultats d'Alphabet (l’ex-Google), Microsoft (MSFT) et Amazon (AMZN), le secteur de la technologie est celui qui fait meilleure figure jusqu’à maintenant, selon S&P Capitl IQ.
Quelque 59% des sociétés de technologies qui ont rapporté leurs résultats dépassent à la fois les prévisions de revenus et de bénéfices, par rapport à une moyenne de 35% pour l’ensemble des entreprises du S&P 500, précise Mme Bell.
À court terme, la technologie remplace donc la biotechnologie parmi les amateurs de l’approche «momentum», qui consiste à acheter des titres qui connaissent un nouvel élan en Bourse.
Effort de rattrapage pour sauver l’année
Effort de rattrapage pour sauver l’année
Les vendeurs à découvert, qui avaient encore des placements de 90 G$ US en jeu le 20 octobre, selon JP Morgan, rachètent aussi les actions vendues pour esquiver les pertes que provoque le rebond.
Les fonds spéculatifs et traditionnels achètent aussi dans l’espoir que la hausse saisonnière des actions renfloue leur mauvaise performance annuelle.
En effet, seulement 28% des fonds communs de placement sondés par BMO Marchés des capitaux surpassent le S&P 500 depuis le début de l’année, par rapport à une moyenne de 46% depuis 2009.
«La contreperformance des fonds communs et les retraits d’argent par les investisseurs donneront aux pros un incitatif de plus pour investir de façon plus fonceuse d’ici la fin de l’année afin de rattraper le terrain perdu», croit Brian Belski, stratège en chef de BMO, à New York.
Dans les rencontres de M. Belski avec ses clients, plusieurs ont exprimé des doutes quant à la capacité du S&P 500 de s’apprécier d’encore 8% d'ici le printemps. Si c'était le cas, l'indice atteindrait le cours-cible du stratège, soit 2250 points. Ce scepticisme est un signal contraire qui confère justement à la Bourse le potentiel de s'apprécier, dit-il.
Pour illustrer que son cours-cible est réaliste, M. Belski précise qu'il repose sur un multiple de 17,9 fois les bénéfices de 125$ US qu’il prévoit pour les entreprises du S&P 500, dans 12 mois.
Le rattrapage en règle des pros explique aussi comment des colosses tels que Alphabet, Microsoft ou Amazon aient pu grimper d’un énorme 11 à 21% depuis le creux du 24 août. Ces sociétés bien en vue sont en fait bien peu représentées dans les portefeuilles des investisseurs.
M. Belski fonde aussi sa confiance sur un indicateur technique. «Habituellement, nous suivons peu ces indicateurs, sauf lorsqu’ils dévient beaucoup de leur norme historique et attirent notre attention", dit-il.
Or, actuellement, à peine 23% des titres du S&P 500 se négocient au-dessus de leur moyenne mobile de 200 jours, un indice contraire qui indique que peu de titres participent à l'élan boursier. Cette proportion est aussi faible que lors des turbulences de septembre 2011 causées par la crise de la dette européenne et par la décote de crédit américaine, rappelle le stratège.
Depuis 1990, les actions rebondissent de plus de 10% en moyenne, au cours des trois mois après que cet indicateur ait atteint un tel niveau, précise M. Belski.
Chez Bank of America Merrill Lynch, les indicateurs d’achat à court terme sont toutefois déjà retournés au neutre, tellement le rebond a été rapide.