Au moment où le bras de fer entre la Grèce et l’Europe se transforme en ultimatum, un consensus remarquablement optimiste émerge pour les marchés et l’économie mondiale, malgré divers signes de surchauffe.
Stratèges et observateurs sont en effet nombreux à prédire un mouvement de repli de moins de 10% en Bourse, cet été ou tôt cet automne, qui fournirait une nouvelle occasion aux investisseurs d’acheter des actions afin de profiter d’une ré-accélération de l’économie américaine et mondiale, plus tard cette année.
La majorité des pros se sont déjà préparés à cette éventualité, puisqu’ils ont accumulé des liquidités et ont acheté un record d’options sur les indices pour se protéger, note Michael Harnett, stratège en chef, Bank of America Merrill Lynch, qui sonde les gestionnaires mondiaux de portefeuille.
Plus près de nous, Vincent Delisle, de Banque Scotia, conserve toujours la répartition de 10% en liquidités qu’il avait établi en avril, afin de sauter sur les éventuelles occasions que le changement de régime des taux de la Fed pourrait susciter.
M. Harnett associe le calme relatif actuel à une transition entre l’ère de l’assouplissement monétaire maximum et le retrait progressif de ces liquidités. Il faut tout de même s'attendre à des rendements plus modeste de toutes les classes d'actif, après cette transition.
«On continuera d’assister à un marché sans direction claire et à des soubresauts inattendus dans différents placements, tant que les données économiques et la remontée des taux par la Fed ne viendront pas confirmer que la conjoncture s’améliore, les États-Unis en tête», explique M. Harris.
La vigueur de l’économie américaine pourrait surprendre
La vigueur de l’économie américaine pourrait surprendre
Stéfane Marion, de la Financière Banque Nationale, lui fait écho et prédit une hausse annualisée de 5% de l’économique américaine, au troisième trimestre ainsi que deux hausses de 0,25% chacune du taux directeur par la Fed, en septembre et en décembre.
L’économiste estime que la création de 475000 emplois de plus mènerait la Fed au point de bascule pour normaliser les taux, soit une fois que tous les emplois à temps plein perdus pendant la récession auront été récupérés.
«Si notre scénario optimiste s’avère juste, il faut s’attendre à des turbulences dans les marchés financiers qui devront s’ajuster à la nouvelle réalité», indique M. Marion.
Le changement de régime par la Fed se fait rarement sans heurt. Même s’il a été bien télégraphié à l’avance par la Fed, la première hausse des taux pourrait être un choc pour bien des investisseurs, à cause de ses effets méestimés sur la valeur de bien des actifs, a récemment prévenu Gary Cohn, président de Goldman Sachs.
Des taux à la hausse ne sonneront pas le glas du marché haussier pour autant, assure M. Marion, puisque la croissance économique alimentera les revenus et les bénéfices des entreprises, sans réveiller l’inflation.
Même si les multiples d’évaluation et les marges n’augmentaient plus, les actions devraient progresser au rythme des bénéfices, raisonne-t-il.
Dans les marchés haussiers de 1990 à 1997 et de 2003 à 2007, les gains se sont poursuivis bien après la première hausse des taux par la Fed, de février 1994 et de juin 2004.
Déjà, la tendance des prévisions de bénéfices pour les titres de l’indice mondial MSCI est redevenue positive. C’est la première fois depuis cinq ans que les prévisions s’améliorent en même temps pour les États-Unis, la Chine, l’Europe et le Japon, précise aussi M. Marion.
Le Canada et les marchés émergents dans le tordeur
Le Canada et les marchés émergents dans le tordeur
Pour atténuer le niveau du risque du portefeuille-modèle en période de turbulences, M. Marion réduit un peu sa répartition dans les actions canadiennes (-4%) et les marchés émergents (-3%), deux marchés associés aux ressources, et il augmente la part qu’occupent les actions américaines (+4%) et celles des marchés étrangers développés (+3%).
Ce changement concorde aussi avec la dépréciation de 0,03 à 0,05 cents US qu’il prévoit pour le huard, au cours des prochains mois. Cette dépréciation ajouterait environ 6% au rendement prévu de 5,7% prévu pour le S&P 500, d'ici la fn de année.
Au Canada, les seuls secteurs auxquels il accorde une répartition supérieure à l’indice sont ceux des banques et des assureurs, ainsi que des logiciels.
Au moment où la mi-année approche à grands pas, voici les prévisions de M. Marion :
Cibles pour la fin de 2015 (en monnaie locale)
S&P/TSX/15600/gain potentiel de 5,3%
Ratio cours-bénéfices réalisés/18,4 fois
Taux canadiens de 10 ans/2,23%
S&P 500/2220/gain potentiel de 5,7%
Ratio cours-bénéfices réalisés/17,6 fois
Taux américains de 10 ans/2,65%