BLOGUE. La chute de l'or s'est amplifié lundi, le métal jaune dégringolant d'encore 156,30 $ US l'once ou de 10,4 %, à 1345,10 $ l'once, au plus bas prix depuis deux ans.
La dégringolade prend des proportions historiques : sa baisse de plus de 200 $ US l'once depuis jeudi dernier est la plus violente depuis 1974.
Techniquement, le recul de l'or par rappirt à sa moyenne mobile de 50 jours n'a pas été aussi dramatique depuis au moins 1975, note aussi Bespke Investment Group.
Après 12 années consécutives de gains, l'or a plongé de 28 % par rapport au sommet de 1 888,70 $ US d'août 2011.
Le métail jaune défie tous ceux qui voyaient dans l'or une valeur refuge contre la perte de confiance envers les monnaies ou encore un moyen de miser sur l’inévitable inflation qu’entraînerait l’assouplissement monétaire sans précédent des banques centrales.
Malgré plus de 500 baisses de taux d’intérêt dans le monde, depuis six ans, et des rachats d’obligations qui atteindront l’équivalent de 30 à 60 % du produit intérieur brut respectif des États-Unis, de l’Europe et du Japon, l'or poursuit sa chute.
En tombant sous le seuil technique de 1 540 $ US le 12 avril, les ventes automatiques préétablies par les négociateurs et leurs ordinateurs, ont accéléré les ordres de vente.
En un mot, les investisseurs vendent parce que l’or baisse, craignant d’autres pertes. Le rappel sur marge de la part de courtiers, qui vendent de l'or de clients qui ont emprunté pour investir dans le métal, accentue le mouvement baissier.
Le mouvement à la baisse est amplifié par les fonds négociés en Bourse (FNB) qui possèdent de l’or physique. Les investisseurs vendent ces FNB d’or, obligeant ces fonds de vendre leur or, créant ainsi un cycle baissier.
Le 12 avril, le principal FNB d’or ,SPDR Gold Trust (NY, GLD), detenait le moins d’or en trois ans, rapporte Bloomberg. Les investisseurs auraient retiré un milliard de dollars de ce seul FNB, le 12 avril, selon IndexUniverse.
La décision par la banque centrale de Chypre de vendre 525 millions de dollars américains de ses réserves d'or pour éponger les pertes sur ses prêts aux banques chypriotes, alimente aussi le mouvement baissier, car d’autres banques centrales pourraient l’imiter pour financer leurs mesures d’austérité.
La hausse du dollar américain, qui sert de véritable valeur refuge pour les investisseurs fuyant l’euro ou le yen, entraîne aussi l’or dans son sillage.
L’or a beaucoup enrichi tous les acheteurs non-Américains, dont la monnaie s’est dépréciée par rapport au billet vert, générant d'importants gains que certains investisseurs encaissent aussi.
La chute de l’or n’est-elle pas un signe que l’assouplissement planétaire sans précédent ne réussit pas à stimuler les économies suffisamment pour enrayer la déflation ?
Vincent Delisle, stratège de Banque Scotia, n’y voit rien d’aussi sinistre.
« L’or fonctionne quand le S&P 500 va mal. Comme le dollar américain et le S&P 500 font très bien depuis 12 à 18 mois, l’attrait de l’or ne colle plus. Le ratio qui compare l’indice S&P 500 au cours de l’or a touché un creux en 2010. Ce ratio remonte depuis et ce n’est pas fini. Le mythe de l’or se dégonfle », explique-t-il.
Martin Roberge, stratège quantitatif chez Canaccord Genuity est tout aussi zen.
« L’appréciation du dollar américain et l’amélioration de l’économie mondiale diminuent l'attrait refuge de l’or. Les attentes inflationnistes ne grimpent pas non plus malgré l’assouplissement record des banques centrales. Coincée entre les forces de l’inflation et de la déflation, la bulle de l’or se désenfle, comme toutes les autres bulles avant elle ».