BLOGUES. Les investisseurs qui rêvent d'une union entre Rogers Communications et de Shaw Communications devraient se réveiller, croit Neeraj Monga, analyste de la firme de recherche indépendante Veritas Investment Research.
Si sur papier la création d’un premier câblodistributeur presque pancanadien tombe sous le sens, tout comme les synergies potentielles de 500 millions de dollars, une telle transaction se bute à des obstacles énormes, sinon insurmontables, fait valoir M. Monga.
Le principal obstacle : la fiducie familiale créée par Ted Rogers pour assurer la pérennité de son entreprise donne le pouvoir stratégique et décisionnel à ses enfants Edward et Melinda Rogers, tous deux jugés trop prudents pour entreprendre une telle union. Leur approche est davantage financière qu'entrepreneuriale, estime l’analyste.
« Nous ne prévoyons aucune acquisition transformationnelle pour Rogers dans l’avenir. L’union Rogers-Shaw (véhiculée par plusieurs courtiers) n’est que pure spéculation », écrit M. Monga.
Il est peu probable que la société pose un geste qui perturbe soit l’emprise de la famille sur Rogers ou sa stabilité financière. L’acquisition de Shaw mettrait à l’épreuve ces deux principes chers à Edward Rogers.
Une transaction de 13 à 20 milliards
Une transaction de 13 à 20 milliards
Pour mettre la main sur Shaw, un actif unique et rare au Canada, Rogers aurait à offrir le prix fort.
« La famille Shaw pourrait exiger jusqu’à 46 $ par action, soit 12,5 fois son bénéfice d’exploitation pour laisser aller son bloc de contrôle », écrit l’analyste.
Pour maintenir sa coté de crédit de qualité institutionnelle, Rogers aurait à emprunter 1,1 milliard de dollars et à émettre un minimum de 14 milliards de dollars de nouvelles actions de catégorie B, soit 55 % plus d’actions en circulation, calcule M. Monga.
Les deux familles auraient aussi à établir le partage du contrôle de l’entreprise combinée.
L’union aurait aussi des obstacles réglementaires à franchir puisque ensemble Rogers, Shaw et Corus (contrôlé par la famille Shaw) auraient l’emprise de 41 % des parts des téléspectateurs au pays, un seuil qui dépasse la norme de concentration des autorités canadiennes.
Le Bureau de la concurrence et Industrie Canada pourraient aussi exiger des concessions sur les tarifs du service satellite pour éviter que Rogers et BCE forment un duopole et imposent leurs prix.
Rogers pourrait choisir son président à l'interne
Enfin, Rogers Communications se cherche un nouveau président depuis l’annonce de la retraite en janvier 2014 de Nadir Mohammed, que Ted Rogers avait promu pour lui succéder.
Étant donné l’actionnariat de Rogers et sa gouvernance par une fiducie familiale, qui domine aussi le conseil d’administration, le prochain président de Rogers pourrait bien venir de l’interne, avance M. Monga.
« Le nouveau rôle du président se résume à motiver les troupes de façon inspirationnelle », dit-il.
S’il avait à choisir entre les deux titres, M. Monga préfère Rogers qui a davantage les moyens d’accroître son dividende dans les années à venir grâce à son service sans-fil.
Rogers verse 65 % de ses flux de trésorerie excédentaires en dividende, tandis que Shaw distribue 86 % des siens.