Les forces policières qui paradent «en mou», les camions de pompier vandalisés, les cols bleus qui brandissent la menace d'une grève générale... Voilà les dernières manifestations d'un malaise qui n'ira pas en s'amenuisant. Nous sommes engagés depuis 15 ans dans le processus de transformation des régimes de retraite. De l'idée même de la retraite !
Aujourd'hui, la réalité vient chatouiller ceux qui bénéficient des régimes les plus généreux. Cette réalité fait que les paramètres sur lesquels ont été fondés nos régimes de retraite ont évolué avec les années : les gens vivent plus longtemps et en meilleure santé, on compte de moins en moins de travailleurs pour chaque retraité, les rendements des instruments financiers sont au mieux erratiques, sinon faibles.
Alors que la réalité change, l'intégralité des conditions de travail (et de retraite) reste un principe sacré pour les leaders syndicaux. Inaltérables, ces conditions ne peuvent être modifiées qu'en faveur des membres, sans tenir compte de ce qui se passe hors de l'appareil étatique. Pourtant, alors que les représentants des employés du secteur public se braquent sur la question de la retraite, ailleurs, les mentalités commencent à évoluer.
La retraite paradisiaque, avec les vagues, le sable fin et le coucher de soleil, est devenue un cliché publicitaire grotesque. Les gens ne s'y méprennent plus : ils n'ont pas les moyens de passer 30 ans sur un bateau de croisière, dans un VR ou sur un terrain de golf. Et ceux qui ont la capacité financière de s'aventurer dans cette voie sont souvent envahis après quelques années par un vague sentiment d'ennui et de désoeuvrement.
Ceux qui n'aiment pas leur travail, et je les comprends, considèrent la retraite comme une libération. Mais il y a des professionnels épanouis, des ouvriers manuels heureux, des entrepreneurs passionnés. Ces gens définissent de plus en plus des projets de retraite qui donneront un sens à leur existence, qui leur permettront de participer à la vie civique, d'être utiles, et ce, aussi longtemps que leur santé le leur permettra. C'est l'idée de retraite qui fait son chemin. La retraite n'est plus une coupure. Elle est une phase où l'on s'engage graduellement, à un âge moins défini (55, 65, 75 ?), d'où ne sont pas exclues les activités professionnelles, mais qui évacue les éléments irritants d'une carrière. Et d'un point de vue financier, cela change tout !
L'ère de la retraite progressive est à nos portes.