BLOGUE. C’est une très mauvaise idée de vouloir protéger les sociétés québécoises contre les offres hostiles des sociétés étrangères. Très mauvaise idée!
En effet, le ministre des Finances Nicolas Marceau a indiqué vendredi (23 novembre) qu’il avait «l’intention de proposer des modifications à la Loi sur les sociétés par actions, laquelle régit des fleurons québécois comme Rona, Metro et Jean Coutu», tel que l’indiquait La Presse Canadienne.
Le ministre répondait en fait à une question de LesAffaires.com. Lisez le blogue de François Pouliot Protection des sièges sociaux: Marceau lance un gros débat
La PC continue son explication ainsi:
«Québec souhaite faire en sorte que lors du dépôt d'une offre d'achat hostile, le conseil d'administration d'une entreprise ait le droit de ne pas tenir compte seulement des intérêts des actionnaires, mais aussi de ceux des employés, des retraités, des fournisseurs et de la «communauté d'accueil».
Le gouvernement songe aussi à permettre aux administrateurs d'une société cotée en Bourse de ne pas transmettre aux actionnaires une offre d'achat hostile qu'ils jugent inadéquate.
L’intention du gouvernement Marois est probablement bonne. On ne veut pas que des sociétés étrangères se «sauvent» avec d’importantes entreprises d’ici, uniquement parce qu’elles ont les moyens et que nos titres sont déprimés. De plus, on veut conserver le plus possible de sièges sociaux ici, avec toutes les retombées positives que cela entraîne.
Mais encore une fois, l’enfer est pavé de bonnes intentions et ce qu’on prépare pour les investisseurs, petits et grands, mais surtout les petits, c’est l’enfer en trois dimensions.
Pauvres petits actionnaires
D’abord, peu importe les règles de plus en plus musclées de régie d’entreprise (au point qu’elles sont anti-productives, mais c’est une autre histoire), la réalité quotidienne, c’est que bien des conseils d’administration ont toute la misère du monde actuellement à vraiment défendre les intérêts des actionnaires minoritaires.
La tendance est encore à pencher lourdement du côté de leurs «petits amis» corporatifs, peu importe le sort des autres actionnaires.
Donc, lorsque je lis qu’on veut demander à ces administrateurs de tenir compte en plus des intérêts des retraités, des fournisseurs, et de la «communauté d’accueil», je me dis qu’on patauge dans la fiction. Concrètement, cela ne veut rien dire. Ce qui laisse toute la marge de manoeuvre possible et impossible aux conseils d’administration de faire ce qu’ils veulent (ce qui va se résumer le plus souvent à protéger leurs intérêts personnels).
Aussi, donner le pouvoir aux administrateurs de ne pas transmettre une offre jugée inadéquate ouvre la porte au crime en plein jour contre les droits des actionnaires minoritaires. Imaginez le conseil grassement rémunéré d’une société qui ne va nulle part depuis plusieurs années qui reçoit une telle offre...la tentation sera si grande de la considérer inadéquate peu importe sa teneur uniquement pour ne pas perdre son poste !
La réalité c’est que le gouvernement s’attaque à un faux problème. Il tente de protéger, non des fleurons, mais des sociétés en déclin. Les véritables fleurons n’ont pas besoin de la protection de l’État!
En fait, le vrai et urgent problème, c’est que nous avons de moins en moins au Québec d’entreprises de grande qualité à forte croissance gérées par de grands entrepreneurs. Ça, c’est TRÈS inquiétant, mais personne n’en parle.
Bernard Mooney