La semaine dernière, j’ai rencontré des investisseurs dans la région de l’Abitibi. Ce fut une expérience très agréable et enrichissante (je les remercie d’ailleurs chaleureusement).
J’ai senti un changement palpable dans l’humeur des gens, si je compare par exemple à ma visite précédente en 2010. À ce moment, bien des investisseurs me parlaient de titres d’exploration de ressources, tentant de me convaincre de leur grand potentiel….
La semaine dernière, zéro mention des titres de ressources de la part des gens que j’ai rencontré.
Ce qui m’a poussé à en parler avec une investisseur qui partage ma philosophie de placement. Elle m’a confirmé le désaveu. En parlant avec elle de la dégringolade des ressources naturelles depuis quelques années et du climat actuel marqué par la grande noirceur, on a fini par se regarder et lancer en unisson, «oups, c’est probablement le temps d’acheter les ressources….». Et nous sommes partis à rire.
Cette anecdote est pertinente parce qu’elle illustre la réaction d’un investisseur qui peut très bien constater le potentiel d’un titre ou d’un secteur, mais rester tout à fait stoïque et ne rien faire tout simplement parce que c’est à l’extérieur de son champ d’expertise.
Le secteur des ressources ne m’intéresse pas. Je constate cependant qu’il est ravagé. Vous n’avez qu’à regarder la performance de la Bourse de croissance où l’indice TSX-Venture a perdu quelque chose comme 60% depuis son sommet de 2011. Ce qui signifie que de nombreux titres sur cette Bourse ont perdu plus de 75% de leur valeur. Ce qui signifie aussi que ceux qui ont spéculé sur ces sociétés ont pratiquement tout perdu.
Pas surprenant que ces investisseurs ne soient plus d’humeur à entendre parler de ressources! J’ai mentionné 2010, mais le sommet de l’enthousiasme pour les ressources a été plutôt en 2008 alors que le prix du pétrole, par exemple, a fracassé les 140$US le baril et que tous, ou presque, étaient convaincus que ce n’était qu’une question de semaines, ou de jours, avant qu’il atteigne les 200$US.
La crise financière de 2008-09 a dévasté ce secteur, comme tous les autres en fait. Il a rebondi par la suite avec le marché boursier. Depuis quelques années toutefois, ce sont les simples lois de l’offre et de la demande qui se manifestent. Le boom des ressources qui a commencé après l’éclatement la bulle techno en 2001 a fait en sorte qu’une extraordinaire quantité de capital a été dirigée vers ce secteur.
La loi de l'offre et la demande
Une partie de ce capital a été détruit dans l’éclatement de la bulle des ressources depuis 2009, mais une autre partie a servi à financer des projets d’exploitation dont la mise en place a pour conséquence d’augmenter considérablement l’offre de matières premières comme les métaux de base.
De l’autre côté, la demande n’est pas aussi grande qu’espérée, pas seulement parce que les attentes étaient trop élevées, mais aussi parce que la reprise économique depuis cinq ans est relativement décevante.
Le résultat est un malaise persistant sur le plan des prix de nombreuses matières premières. Par exemple, l’indice CRB de Reuters/Jefferies est à 277 alors qu’il était à 270 en octobre 2009. Pour vous donner une idée du fossé par rapport au climat de 2007-08, le CRB était à 460 en 2008!!!
Il faut souvent plus d’une décennie avant d’avoir nettoyé tous les excès d’une bulle. Par exemple, en 2012, l’indice Nasdaq était encore à 40% de son sommet de 2000. Par contre, il avait pratiquement doublé à partir de son creux de 2002.
J’ai mentionné plus tôt que je n’avais pas d’intérêt pour ce secteur, pour de nombreuses raisons, certaines personnelles. Cela ne veut pas dire qu’il soit impossible d’y faire de l’argent. Un investisseur qui connaît bien ce domaine, qui a une approche intelligente et qui est patient peut sûrement y faire de l’argent. En autant qu’il n’oublie jamais la nature cyclique des ressources.
Bernard Mooney
P.S. Depuis ma discussion, le secteur des métaux du TSX a perdu 7%!