Si la performance économique récente laisse à désirer, aux États-Unis comme au Canada, un regard à plus long terme est rassurant. Le consommateur américain, en meilleure santé qu'avant, sera la locomotive de la croissance au cours des prochaines années.
Les plus récentes statistiques économiques sont relativement décevantes.
L'évaluation initiale de la croissance aux États-Unis au premier trimestre de 2015 a confirmé que l'économie américaine avait fortement ralenti. À 0,2 %, c'est nettement déprimant si on compare cette donnée à la croissance de 2,2 % au dernier trimestre de l'an dernier et au bond de 4,8 % lors du troisième trimestre.
Sauf qu'une fois décortiquée, cette performance n'est pas si étrange. Les investissements des sociétés ont reculé au premier trimestre, en raison surtout du secteur pétrolier.
De plus, les exportations ont reculé de 1,26 %, là encore dans une démonstration de deux facteurs bien connus, soit la faible croissance en Europe et la montée de la valeur du dollar américain, laquelle nuit à la compétitivité des biens fabriqués aux États-Unis.
Enfin, les dépenses à la consommation, en progression de 0,2 %, ont déçu.
L'épargne augmente aux États-Unis
Les économistes s'attendent à ce que la croissance reprenne à un bon rythme au cours des prochains trimestres. Et les probabilités qu'ils aient raison sont élevées.
Le facteur favorable le plus important est le consommateur.
Rappelez-vous comment les experts prédisaient que les consommateurs américains dépenseraient joyeusement l'argent économisé à la pompe. Voilà que ces derniers les ont fait mentir, car au lieu de dépenser, ils ont préféré épargner ! Le taux d'épargne est ainsi passé de 4,6 %, au quatrième trimestre, à 5,5 %, à la fin de mars 2015.
C'est le taux d'épargne le plus élevé depuis le sommet de 2012, alors qu'il avait atteint 10 %.
Avant la récession, en 2005, le taux d'épargne des particuliers avait fondu comme neige au soleil, tombant à 2 %, un record de médiocrité de tous les temps.
Ce rehaussement de l'épargne nuit à la croissance à court terme. À long terme, toutefois, il favorisera l'essor de l'économie, car il augmentera sensiblement le pouvoir d'achat du consommateur.
Ce dernier a une situation financière de plus en plus resplendissante. Par exemple, savez-vous que le ratio des paiements liés à la dette par rapport au revenu disponible est à un creux jamais vu depuis 1981 ? Cela signifie qu'il y a plus de 30 ans que les obligations financières du consommateur moyen n'ont pas été aussi faibles par rapport à ses revenus.
Évidemment, cela s'explique par les faibles taux d'intérêt, mais aussi par le fait que les consommateurs se serrent la ceinture depuis la crise financière. Par exemple, les achats de biens durables sont nettement inférieurs à la moyenne des 60 dernières années.
Les ménages américains ont amélioré de façon spectaculaire leur bilan depuis quelques années. Ils ont ainsi accru leur valeur nette de 26 404 milliards de dollars américains depuis 2008, une progression de 46,7 % en sept ans. Le consommateur américain a donc un avoir net de 82 912 G$ US.
Les entreprises s'adressent ainsi à un consommateur plus riche qu'avant, qui compte moins d'obligations financières. Ce qui signifie qu'il a plus d'argent dans les poches, qui peut servir à rembourser sa dette, à épargner, à dépenser ou à investir. Ce sera la véritable locomotive de la poursuite de la croissance économique au cours des prochaines années.
En outre, les sociétés sont également en très bonne situation financière. La majorité d'entre elles profitera à long terme de la baisse des coûts de l'énergie. Un facteur qui pourrait aider à stimuler les investissements et les dépenses en immobilisations, encore décevants.
Un portrait beaucoup plus sombre au Canada
De son côté, l'économie canadienne est en moins bonne posture, car elle subit davantage les répercussions de la baisse du prix de l'énergie et de la contreperformance du secteur des ressources naturelles. Contrairement au consommateur américain, le consommateur canadien n'a pas amélioré sa situation financière lors des dernières années.
Le niveau d'endettement des ménages canadiens a atteint un nouveau sommet au quatrième trimestre de 2014, le ratio de la dette des ménages par rapport au revenu disponible atteignant 163,3 %, selon Statistique Canada. Autrement dit, au quatrième trimestre, les ménages avaient contracté environ 1,63 $ de dette pour chaque dollar de revenu disponible.
C'est le troisième trimestre consécutif où le taux de croissance du revenu disponible est plus faible que celui de la dette des ménages sur le marché du crédit.
Si cela est contraire à ce qui se passe aux États-Unis et malgré les sonnettes d'alarme qu'on entend souvent concernant l'endettement canadien, il ne faut pas oublier qu'en raison des faibles taux d'intérêt, le ratio du service de la dette des ménages continue à osciller autour du plus bas niveau observé jusqu'à maintenant (ce ratio correspond aux intérêts versés sur les emprunts hypothécaires et non hypothécaires des ménages, divisés par le revenu disponible).
Autrement dit, malgré l'endettement élevé, il coûte moins cher qu'auparavant de faire face à ses obligations financières. Cela place les consommateurs dans une situation à risque si les taux augmentent, certes, mais on dit cela depuis plusieurs années.
En fait, l'économie canadienne dépend davantage des consommateurs américains. Si ces derniers ouvrent leurs goussets, selon toute probabilité, nos entreprises exportatrices en profiteront.
À plus long terme, tout est donc en place pour que la croissance nord-américaine reprenne de la vigueur, au point de surprendre bien des observateurs.