BLOGUE. Dans la plus récente édition du magazine Forbes, la journaliste Diana Henriques révèle le contenu de nombreuses lettres et messages échangés avec Bernie Madoff, le plus grand fraudeur de l’histoire des États-Unis. On peut y déceler comment fonctionne l’esprit d’un escroc qui essaie de vivre avec lui-même.
Bernie Madoff est en prison à la suite d’une sentence de 150 ans (eh oui, 150 ans!). Madame Henriques a écrit la biographie de Madoff, publiée l’année dernière (The Wizard of Lies). C’est après la sortie de ce livre que Madoff a commencé à lui écrire de façon régulière.
Pas de sa faute
«J’ai stupidement fait confiance à des clients sans scrupule qui m’ont forcé à prendre des pertes et qui m’ont laissé tomber par la suite…», écrit-il. Le criminel va même jusqu’à tenter de se décrire comme un martyr, ou presque. «J’ai fait l’erreur tragique de tenter de changer la façon dont l’argent est géré et j’ai réussi au début. Par la suite, je me suis perdu et j’ai refusé d’admettre mon erreur.»
Bernie Madoff prétend qu’il a été honnête au moins jusqu’au krach de 1987. «Pendant 30 ans, j’ai fait des profits substantiels pour tous mes clients. » Par la suite, ses clients craignant que le marché boursier continue sa descente l’auraient forcé à liquider des positions. C’est à partir de ce moment que sa version devient floue, contradictoire et peu convaincante.
De toute façon, il a été jugé coupable. Malgré cela, il veut redorer son blason, du moins en partie, en expliquant qu’il n’a pas toujours été malhonnête. De plus, plusieurs auraient profité de lui, sa grande faiblesse étant sa volonté de plaire à tous. «Je n’ai que moi à blâmer pour cela, toutefois», admet-il.
Pas seul
À plusieurs reprises, Bernie Madoff souligne que bien des gens savaient et choisissaient de fermer les yeux. «Il est important de mentionner encore une fois que la plupart de mes clients professionnels étaient bien conscients de la façon dont je transigeais. Banques et fonds ont été dans une forme ou une autre des complices», écrit-il.
«Il est difficile d’imaginer tous les maux et toute la corruption qui existent dans le gouvernement et sur Wall Street.»
Enfin, il tente de démontrer qu’il n’est pas si vilain, par exemple parce qu’il n’a jamais tenté de déguerpir. «Je n’y ai même jamais pensé.»
Comme bien des escrocs, la tentation est grande pour Bernie Madoff de se prendre pour une victime. C’est une tendance humaine que de pointer du doigt les autres pour ses erreurs. M. Madoff n’y fait pas exception.
Quand il mentionne que des pros étaient au courant, je pense qu’il pourrait bien avoir raison. Dans le sens que bien des professionnels devaient, de temps en temps, se poser des questions quant à la légitimité de ses activités. Mais dans les années de prospérité, bien des gens de l’industrie ont le réflexe de regarder ailleurs dans ces situations…en autant qu’ils font de l’argent.
Qu’en pensez-vous?
Bernard Mooney