BLOGUE- Chaque année au printemps, les publications de finances personnelles du pays consacrent leur manchette à l'immobilier, en proposant aux lecteurs des guides annuels dans lesquels on traite des tendances et des marchés intéressants. Dans son édition d'avril 2012, le magazine l'Actualité publie son guide immobilier annuel qui réserve cette année une large place aux condos. Avec raison!
C’est qu’en ce moment, à l’intérieur du monde de l’immobilier, beaucoup de « vrais » acheteurs choisissent ce créneau, principalement pour son accessibilité financière, la sécurité accrue offerte, l’entretien moindre et peut-être aussi pour le côté un peu glamour de vivre en condo…
Cet engouement a incité beaucoup de promoteurs et d’investisseurs à mettre en branle de nombreux projets de construction d’immeubles à condos. En parallèle, beaucoup de spéculateurs ont flairé la bonne affaire en réalisant des opérations de conversion d’immeubles existants en condos pour la revente.
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D’autres investisseurs choisissent d’acheter des condos, construits ou « convertis » pour les offrir en location. Voilà pourquoi, j’ai été étonné de lire le commentaire de M. Kevin Hughes, de la SCHL, qui affirmait « Il y a peu de spéculation et le marché s’adapte aux besoins réels. »1
Si je suis d’accord pour dire que, jusqu’à maintenant, le marché des logements en copropriété au Québec, en général (15 969 unités mises en chantier en 2011) et Montréalais en particulier (56% de l’ensemble des constructions en 2011 étaient des condos) ont réussi à absorber tous ces condos, je maintiens que la spéculation est fort active à l’intérieur de ce créneau du marché.
Les défis du marché des copropriétés
Au-delà des spéculateurs qui gangrènent le marché en tirant des bénéfices sans apporter aucune valeur en retour, d’autres défis se profilent à l’horizon dans le segment de marché des condos :
1- Quantité ne rime pas toujours avec qualité! Afin de profiter de la manne qui passe, certains projets sont très mal construits. Le fait qu’une construction soit neuve n’est pas un gage de qualité, loin de là! Malheureusement, de ce fait, plusieurs copropriétaires auront droit à une cotisation spéciale afin de corriger ce qui a été mal conçu au départ. Dans certain cas, la facture sera très salée!
2- Les frais communs sont régulièrement minimisés et fréquemment volontairement sous-estimés. De plus, il s’agit d’une dépense qui doit s’ajouter au calcul du versement hypothécaire, ce que bon nombre d’acquéreurs négligent. Lorsque que l’on calcule l’ensemble des charges, le condo n’est parfois plus aussi économiquement avantageux par rapport aux maisons jumelées ou même dans certains cas, à l’unifamiliale traditionnelle.
3- Les « règlements de condos » qui, au départ vont dans le sens commun, finissent toujours par augmenter de volume avec les années pour souvent atteindre des proportions qui les rendent, dans leur application quotidienne, quasi invivables! Cela est tellement vrai que certains projets ne permettent la prise de connaissance de leurs règlements aux « étrangers » qu’une fois que leur offre d’achat est signée et acceptée!
Espérons maintenant que la tournée de consultations que le ministre de la justice du Québec, M. Jean-Marc Fournier, qui doit avoir lieu au cours des prochaines semaines, ne sera pas qu’un exercice de relations publiques pré-électorales. Pour le reste, les acheteurs de condos devraient faire montre d’une grande prudence et les spéculateurs-convertisseurs se trouver un vrai travail!
Martin Provencher, auteur-conférencier en immobilier
- La fièvre des condos, par Isabelle Ducas, L’Actualité, Avril 2012, p. 24