BLOGUE. Comme annonce, on peut à première vue difficilement trouver plus mince que celle faite ce matin par Warner Bros. dans une conférence de presse pourtant relativement courue.
La multinationale américaine, qui a implanté un studio de jeux vidéo à la Place Dupuis, à Montréal, va donner 150 titres, principalement des films et des émissions de télévision, mais aussi des jeux vidéo, à la Bibliothèque nationale du Québec.
Du point de vue monétaire, le don est à peine significatif, du moins pour Warner. Même à leur pleine valeur de revente, qui ne représente évidemment pas du tout le coût réel pour Warner, le vice-président et chef du studio de WB Games, Martin Carrier, estime sommairement le don entre 5 000 et 10 000$.
Il y a un peu plus de signification dans le fait que la grande bibliothèque sera dorénavant en mesure de prêter des jeux vidéo. C'est une forme de reconnaissance pour ce que le PDG de la Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ), Guy Berthiaume, a qualifié de « 10e art ».
Ceci dit, cette reconnaissance est plus symbolique qu'officielle. « C'est dans notre rôle de bibliothèque publique que nous accueillons ces jeux, pas dans celui de bibliothèque nationale », a précisé M. Berthiaume. Autrement dit, ces jeux ne seront pas archivés pour la postérité. La loi sur le dépôt légal, qui force par exemple les éditeurs de livres à fournir deux exemplaires à la BAnQ pour être conservés à jamais, ne s'applique encore à aucune forme de document électronique. Même les jeux produits au Québec, donc, sont exclus.
Cela pourrait (devrait?) être corrigé un jour, mais il faudra alors prévoir tout un casse-tête pour ce qui est des supports. Comment arrivera-t-on à faire fonctionner un jeu conçu pour la Wii dans 20 ans? Dans 50 ans?
Bref, s'il y a un signe d'importance quelque part, c'est dans la volonté de WB Games d'être un « bon citoyen corporatif ».
L'inspiration est facile à trouver. M. Carrier est un ancien responsable des relations publiques chez Ubisoft Montréal, un studio qui en a beaucoup fait et qui en fait encore beaucoup en ce sens. L'entreprise supporte notamment des festivals culturels, participe à une chaire de recherche sur l'intelligence artificielle et a longtemps tenu le Campus Ubisoft, un centre de formation. Ces initiatives sont toutes intéressées, mais elles n'en fournissent pas moins un support à la communauté montréalaise.
C'est sans compter l'impact qu'a eu l'arrivée de ce studio qui emploie plus de 1600 personnes dans le Mile-End. « À l'époque, image M. Carrier, le Mile-End, c'était presque comme le Far-West, avec des balles de foin qui roulent dans la rue. » Le quartier est depuis devenu l'un des plus branchés de Montréal. On a aussi vu un effet similaire à Québec, dans le quartier St-Roch, où se côtoient Ubisoft et Beenox.
M. Carrier trouve donc important que Warner joue un rôle de leader dans son quartier, autour du métro Berri-UQAM.
« Nous sommes dans une industrie qui reçoit des sous du gouvernement, rappelle-t-il. Je crois que c'est la moindre des choses. Nous n'avons pas choisi le quartier le plus facile. La perception du coin est à changer. Nous voulons oeuvrer dans un quartier inspirant. Nous voulons que notre présence ait un impact positif. »
L'industrie du jeu vidéo étant l'une des plus compétitives sur le marché de l'emploi à Montréal, M. Carrier reconnaît aussi que les employés « apprécient travailler pour une compagnie qui a à coeur le développement du quartier », un argument de plus, même petit, pour les attirer.
Pour l'instant, WB Games semble bien se plaire dans ses locaux, qui occupent deux étages et qui sont encore en grande partie inoccupés. Les futurs employés ne manqueront pas de place. L'endroit est aussi relativement lumineux. Et, à la blague, M. Carrier rappelle que le quartier a aussi son lot de « petits commerçants ».
« Quand on a le syndrome de la page blanche, il y a le parc à côté… »